Ça fait aujourd’hui trois mois que nous avons posé nos valises au Bénin, après dix huit années d’expatriation… Je me rappelle encore du jour où j’ai reçu nos billets d’avion en aller simple pour le Bénin. Ce fut une énième appréhension, des questionnements, mais surtout une forte excitation à me lancer dans cette nouvelle aventure de « retour au pays ».
Il y a trois mois, quand nous avons foulé le sol de l’aéroport de Cotonou en sachant que cette fois-ci c’est pour y revivre, la sensation fut différente. Probablement aussi, à cause de l’excellent service que nous avons eu à l’arrivée : wifi gratuit, guichets immigration automatiques pour les Béninois, etc., bref un ensemble de détails qui nous ont agréablement surpris.
Hélas, cette première bonne impression du « retour au pays » fut de courte durée, puisque deux jours après mon fils a eu un malaise en pleine nuit. Paniquée à Calavi (environs 30 kilomètres de Cotonou), j’ai été confrontée aux premières réalités de mon pays. Les soins de santé sont une catastrophe, surtout quand on est obligé d’aller dans un centre hospitalier public. L’image apocalyptique du service d’urgence de l’hôpital de zone de Abomey-Calavi me hante jusqu’à ce jour.
Il faut noter que Calavi est demeurée une simple cité dortoir, sans infrastructures de bases de bon niveau. Rajouter à cela les embouteillages immenses entre Cotonou et Calavi, on peut être bien tentés d’avoir un pied à terre à Cotonou, au grand regret de délaisser sa maison bien aimée de Calavi, bâtie au prix de tant de sacrifices.
Trois mois après notre retour, nous commençons à prendre nos marques, même si certaines situations continuent par me choquer au quotidien. Je me promène souvent dans les rues de Cotonou avec mon appareil, prête à immortaliser les scènes inédites de nos cités. Entre les poteaux électriques plantés en plein milieu de rues, de la volaille vivante en vente en plein feux tricolores, des gens qui urinent dans tous les coins de rue sans gène ni pudeur, des sachets plastiques qui sont partout et qui servent en plus d’emballage pour des denrées alimentaires chaudes, malgré leur dangerosité… je me demande souvent à quel moment nous sommes tombés si bas.
Trois mois après notre retour, j’attends toujours tous mes papiers administratifs pour commencer mes activités professionnelles. Dans un des pays où j’ai vécu en Afrique, j’ai enregistré une de mes sociétés en six heures. Ici, j’attends toujours, pour des raisons que je ne comprends d’ailleurs pas très bien.
L’attente fait justement partie des choses qu’on apprend à gérer ici. On attend toujours et pour tout. Le temps n’a pas la même valeur pour tout le monde. Et pour cela, on le perd, on le gaspille à longueur de journée. Les rendez-vous qui ne sont jamais respectés, les gens qui vous disent « je suis en route » quand ils sont encore sous la douche ou à Porto Novo… bref, le gâchis du temps est l’une des choses qui me font me tirer les cheveux au quotidien. Il paraît que d’ici là je m’y habituerai. Il parait aussi que d’ici quelques mois, je ne verrai plus tout ce qui me choque dans notre belle cité. Les gens avant moi en ont fait l’amère expérience.
Aussi, par rapport à cette notion de temps, aujourd’hui trois mois après notre retour, j’attends toujours l’occasion de rencontrer les quelques amis que j’avais au Bénin, qui pour diverses raisons sont tous aussi occupées les uns que les autres. C’est vrai que j’étais prévenue. J’avais d’ailleurs lu divers articles sur la thématique du « retour au pays », et avais compris que c’est souvent dans son propre pays qu’on peut se sentir rapidement seul. Heureusement, comme dans la plupart des pays où j’ai vécu, on retrouve des associations qui offrent diverses activités qui permettent de se réintégrer.
Trois mois après notre retour, ce qui frappe aussi c’est la multitude de débats politiques dans les rues et coins de quartiers, sur toutes les radios, sur les réseaux sociaux et dans toutes les conversations. A croire que les sujets de développement ou de société ne concernent personne. Si on utilisait le tiers de l’énergie gaspillée dans ces débats politiciens (qui malheureusement n’apportent rien au quotidien de la population), pour questionner, exiger, réclamer, proposer des alternatives de solution, et améliorer notre quotidien, nous saurions êtres plus pragmatiques et le résultat de notre développement bien plus visible.
Trois mois après notre retour, face à certaines situations incongrues de notre cité, je me suis lancée dans des combats citoyens qui m’obligent à arpenter quelques couloirs de l’administration Béninoise : quel parcours du combattant malgré la compétence de la plupart des agents que je croise. Mais quel bonheur aussi, de tomber sur des gens qui sont prêts pour au changement et qui soutiennent divers élans de citoyenneté.
Au delà de tous ces soubresauts, aujourd’hui, trois mois après notre retour, je suis heureuse d’être ici et d’essayer d’apporter ma petite contribution à ce qui se construit au Bénin. Etre utile pour mon pays et pouvoir défendre des causes communes, sont mes belles réalisations de ce trimestre. Le chemin va certainement être long et probablement jonché de nombreuses embûches, mais je reste persuadée que la chose la plus importante est d’essayer. Celui qui n’essaye pas n’a aucun mérite à critiquer celui qui échoue. Individuellement, nous avons une responsabilité pour incarner le changement que nous voulons tous dans notre Bénin.
Ensemble pour l’amélioration des services au Bénin.
L’auteur est Consultant/Formateur en Qualité de Service et Directrice de Publication de www.theservicemag.com
Sidossou@theservicemag.com
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