Affaire Mètongnon au Bénin : La pratique de la justice à l’épreuve du droit

Dans presque tous les pays du monde, la justice est l’instance chargée de statuer sur les conflits sociaux. Et cette charge incombe à des hommes qui peuvent être intègres ou succomber aux inclinations.Pour résoudre le problème, le législateur a conçu un texte, le code de procédure pénale, qui contient des lois qui encadrent le fonctionnement de la pratique judiciaire. Il s’agit de faire reposer la procédure judiciaire ainsi que les décisions des juges, à toutes les étapes du procès, essentiellement sur le droit. L’objectif étant d’annihiler autant que possible les influences internes ou extérieures dont les juges peuvent faire l’objet.

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Dans le cas de l’affaire de placement des dépôts à termes de la Cnss auprès de la Bibe, les avocats des mis en cause et les juges sont divisés depuis l’étape des enquêtes sur l’interprétation des lois. C’est ce qui s’est encore passé hier 19 décembre 2017, à l’ouverture du procès qui met en accusation Laurent Mètongnon et ses co-accusés, pour corruption et abus d’autorité. C’est dire que le véritable enjeu de ce procès sera que la justice dise le droit et rien que le droit. Un défi pour une justice qui doit préserver sa réputation d’institution impartiale, et une exigence pour les avocats de la défense qui dénoncent de façon récurrente des cas de violation de la loi.

L’invite de la défense au juge de prendre acte de sa récusation

Les avocats de la défense ont exprimé au juge leur indignation de le voir tenir à conduire l’audience d’un procès pour lequel il a été récusé. Me Baparapé a expliqué au juge que c’est la constitution elle-même qui donne droit aux accusés de récuser un juge, s’ils mettent en doute son impartialité. La défense a souhaité que le juge ne puisse plus poursuivre le procès, et qu’il prenne acte de sa récusation.

Une situation qui a créé un climat délétère et une vive tension que le juge lui-même a encore su calmer, en renonçant tacitement à faire appliquer sa demande d’expulsion de la salle d’audience, de Me Aboubacar Baparapé. Surtout que ce dernier avait reçu au passage le soutien de l’ensemble de ses confrères qui entendaient quitter aussi la salle si jamais Me Baparapé devait être expulsé.

Au cours d’une de ses interventions, Me Baparapé a expliqué au juge les menaces qui pèsent sur le procès. Il dit « ce procès est sorti du couloir du droit et est devenu politique à travers l’influence des politiques sur le déroulement de la procédure. Et tout le monde sait que lorsque la politique s’empare d’un procès, le droit sort par la fenêtre ».

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Le procureur a lui aussi reconnu le droit de la récusation du juge par les accusés, en indiquant que le juge peut se prononcer ou s’en remettre aux juges de la Cour constitutionnelle. Il a par ailleurs souhaité que l’affaire soit placée en délibéré. Le juge a finalement pris acte de toutes ces observations et a décidé de renvoyer le procès au 30 janvier 2018, le temps que les juges de la Cour se prononcent sur sa récusation.

Conformer la procédure et les décisions de justice au droit

La question de la conformité au droit des décisions des autorités judiciaires a été évoquée depuis l’audition à la Bef, en passant par la comparution des mis en cause devant le procureur de la République, jusqu’à l’actuel déroulement du procès. Les avocats de la défense ont de tout temps dénoncé des vices de procédure, tant pour ce qui est de la garde à vue que de la mise sous mandat de dépôt des prévenus, en passant par la programmation du procès.

A chaque fois, les avocats de la défense ont évoqué des dispositions de lois qui permettaient que les mis en cause comparaissent libres et que leur procès soit programmé un, deux ou trois jours au plus, dans le cadre du flagrant délit selon l’article 402 du code de procédure pénal. A la Cour constitutionnelle donc, gardienne de la conformité des décisions aux lois, de dire le droit sur cette récusation du juge. Et à la justice de continuer à rayonner par son impartialité et ses décisions essentiellement inspirées par le droit

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