Au Bénin, le ratio Masse Salariale-Produit Intérieur Brut est inquiétant. Pour peu que l’on s’y intéresse, on découvre que les salaires des agents de l’Etat, indexés et ciblés à tort comme un boulet au pied de l’Etat, ne représentent qu’une infime portion de cette masse salariale. A l’opposé de cette faible quotité allouée aux agents de l’Etat, les salaires politiques se taillent la part du lion dans la cagnotte budgétaire affectée à la masse salariale.
Conscient de cette anomalie, le président Talon a décrété, au lendemain de son accession à la magistrature suprême, la politique de réduction du train de vie de l’Etat à travers la cruelle devise «Serrer la ceinture» lancée impitoyablement à ses compatriotes à Parakou le 15 novembre 2016.
Curieusement, contre toute logique, quelques mois plus tard, par décret N°042 du 25 janvier 2017, le Chef de l’Etat va renforcer l’injustice salariale en multipliant les salaires des préfets, secrétaires généraux des préfectures et autres chargés de missions des préfets par 20. Il en résulte que les préfets, qui étaient à moins de 250 000 F CFA le mois se sont vu octroyés la bagatelle somme de 5 000 000 de F CFA par mois dans un pays où le SMIG est à 40 000 FCFA par mois. Concrètement, un préfet au Bénin gagne 125 fois le salaire d’un agent de l’Etat payé au Salaire Minimum Interprofessionnel Garanti (SMIG).
Cette situation ayant naturellement provoqué la légitime colère des Ministres, le chef de l’Etat s’est retrouvé dans la triste obligation d’ouvrir la boîte de pandore salariale. En effet, selon nos indiscrétions, des Ministres sont payés à 16 000 000 FCFA le mois, soit 400 fois le SMIG, certains à 12 000 000 FCFA et d’autres à 8 000 000 FCFA. Convaincu que cette politique salariale fantaisiste ne peut durer longtemps sans la complicité des collaborateurs immédiats des Ministres que sont les directeurs de cabinet, le Chef de l’Etat, suivant décret N°2017-570 du 13 décembre 2017 fixant les rémunérations des cadres nommés aux fonctions de directeur de cabinet, secrétaire général, directeur adjoint de cabinet et de secrétaire général adjoint dans les ministères, a revalorisé les salaires de ces agents suivant une grille dont lui seul a le secret :
- Directeur de cabinet………… 2 300 000 F
- Secrétaire Général…………….. 2 200 000 F
- Directeur adjoint de cabinet….. 1 800 000 F
- Secrétaire général adjoint 1 700 000F.
Publier tous les salaires politiques
Cette générosité présidentielle ne peut être sélective. Pour être la chose la mieux partagée, elle doit s’étendre à tous les autres agents de l’État que sont les directeurs centraux, techniques et chefs service, aux présidents et membres des autres institutions, ainsi que les directeurs de cabinet et secrétaires généraux desdites institutions.
Mieux, afin d’impacter toutes les couches sociales, le Chef de l’Etat, de concert avec le Conseil National du Patronat, doit augmenter le SMIG. Cette démarche a l’avantage de désamorcer la bombe sociale constituée par l’instauration du copinage salarial. Tous les Béninois ont droit à une équitable répartition de la prospérité nationale.
Enfin, pour faciliter l’éclosion de la transparence et l’avènement de la justice salariale, le président de la République doit publier son salaire ainsi que toutes les autres rémunérations politiques et convoquer une conférence nationale des salaires.
Le fétiche constitué par les salaires a assez sévi dans l’opacité et l’obscurité. Il est grand temps de le démystifier pour réduire l’injustice salariale prônée par le régime de la rupture.
Gustave S .Gognon
Juriste
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