Avons-nous un peu pitié du pays, de l’image qu’il présente à l’extérieur ? Si le Bénin était un homme, il serait un pestiféré que tout le monde rejette partout où il passe. Cet homme présenterait un visage hideux avec autant d’actes ignominieux qu’on lui impute en si peu de temps. Il n’y a pas si longtemps, à peine cinq ans en arrière, on a agité par ici des affaires d’empoisonnement et de coup d’Etat.
Un président de la république accuse un citoyen, son principal bailleur, de vouloir attenter à sa vie par empoisonnement et puis par de coup d’Etat. Cette affaire avait fait le chou gras des médias internationaux et était connue de tous. « Je connais bien le Bénin. C’est chez vous qu’un homme d’affaires veut empoisonner le président de la république », m’avait lancé un colonel mauritanien en 2014 à un séminaire international à Garmish, dans le sud de l’Allemagne ; ajoutant avoir suivi ce dossier de bout en bout sur Rfi.
Dans beaucoup de cas, il n’est pas rare d’entendre de la part de beaucoup d’amis et confrères de la sous région, cette petite phrase : « vous aimez trop les problèmes chez vous ». Et malheureusement, le court des évènements ici semble bien leur donner raison. A peine l’euphorie de la présidentielle de 2016 -parfaitement réussie- éteinte, que le pays retourne dans les mêmes travers. En Octobre 2016, une fétide affaire de drogue éclabousse le pays. Est mis en cause puis arrêté le président du patronat du Bénin Sébastien Ajavon, accusé d’avoir fait transporter dans ses conteneurs frigorifiés destinés à la volaille, un paquet de 18kg de « cocaïne pure ».
Ses huit jours de garde à vous ont transformé le pays en un vaste champ de tension et de contestation. Cette tension ne s’est estompée que lorsque la justice libère l’intéressé au bénéfice du doute. Cette nouvelle affaire relance une fois de plus les mêmes appréhensions, les mêmes qualificatifs. Les échos des interprétations de plusieurs personnes nous parvenaient de l’extérieur, et montraient le scepticisme par rapport à cette thèse de trafic de drogue.
Un sachet de drogue déposé dans un conteneur frigorifié, laisse plusieurs personnes pantoises. Ils sont nombreux à croire à raison que le Sébastien Ajavon qui est visé ici, c’est beaucoup plus l’homme politique, arrivé 3e de la présidentielle de 2016, et challenger sérieux du président Talon à celle de 2021. L’image que le Bénin a donné dans cette affaire, c’est celle d’un pays qui s’acharne contre les opérateurs économiques.
Depuis quelques semaines, c’est l’affaire de « faux médicaments » qui défraie la chronique. Le député Atao Mohamed Hinnouho est poursuivi pour trafic de faux médicaments. Il y a quelques jours, l’affaire a connu un rebondissement. Tous les six grossistes répartiteurs du Bénin ont été mis sous mandat de dépôt, pour dit-on, avoir acheté des médicaments chez New Cesamex, une firme indienne qui collabore avec l’épouse du député accusé, recherché et exilé au Nigéria. Dans cette nouvelle affaire, il n’est pas évident qu’on ait pensé à l’image du pays. Cette image laisse croire que les Béninois ne consomment que de faux médicaments, dans la mesure où tous les grossistes répartiteurs qui importent des médicaments au Bénin et qui les livrent aux officines achètent de faux médicaments.
Dans les affaires de « 18kg de cocaïne pure » et celle des « faux médicaments », deux personnes sont visées mais c’est tout le pays qui en paie le prix. Car, en vérité, les investisseurs étrangers seront réticents à investir dans un pays où le président du patronat est arrêté aussi facilement pour des soupçons de trafic de drogue, puis libéré quelques jours après pour insuffisance de preuves. Si on traite ainsi le premier des hommes d’affaires béninois, qu’adviendra-t-il d’eux ? Qui aurait envie d’investir ou même de venir vivre dans un pays où il est sûr de ne consommer que de « faux médicament » s’il veut se faire soigner…
Le comble, c’est une certaine liberté notée dans le discours présidentiel qui plonge davantage le Bénin dans la boue. Devant les évêques béninois et à l’Elysée lundi dernier, comme s’il était dans une opération de rachat moral, Patrice Talon affirme être l’un des responsables de la situation critique dans le pays. La chaine de télévision française Arte ne l’a d’ailleurs pas raté, en l’accusant « d’avoir avoué qu’il est voleur ». La campagne de sabotage du Bénin est à son comble. Talon ne doit plus s’étonner donc que les nombreux bons du trésor et emprunts obligataires lancés à tout vent par le gouvernement, soient de plus en plus infructueux. C’est la rançon de la politique de sabotage de son propre pays
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