Bénin : radiographie d’une crise

Comment se porte- il le Bénin ? Vous n’aurez pas volé une mention très honorable appuyée des félicitations du jury si vous formulez votre réponse ainsi qu’il suit.  » Un pays partagé entre espoir et désespoir.  Un pays qui se contente, en lieu et place des belles et bonnes choses qu’on lui a promises, de gérer une crise sociale dure et qui dure. »

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Autrement dit, le Bénin est pris en sandwich entre un mieux être rêvé, mais dont la réalisation se fait toujours attendre et un malaise social persistant qui brouille toutes ses perspectives. Comme on le voit, la question sur la santé du Bénin ne suffit plus. Il y a lieu d’aller plus loin et de s’interroger sur l’orientation globale du pays. Autrement dit : où va le Bénin ?

Le rêve était déjà dans le projet de société du candidat Patrice Talon. Il n’a fait que s’étoffer et se légitimer avec le Programme d’Action du Gouvernement (PAG) du Président Patrice Talon. Depuis, les Béninois dorment et se réveillent telle Alice au pays des merveilles. Ils égrènent dans leur tête un chapelet de projets et de promesses. Mais le temps de l’action tarde à prendre le relais du temps du rêve. Alors, celui-ci se rétrécit et se dissipe. Les populations éructent leur déception. En tout, elles suspectent mensonge, détectent mirage. Un pacte de confiance commence à s’effriter.

Le malaise social est né de la série de grèves qui a brouillé depuis les relations de certains secteurs vitaux avec l’Etat : école, santé, justice. L’Assemblée nationale a tenté, mais sans succès, de faire régenter le droit de grève. Le Gouvernement accepte le dialogue mais peine à faire bouger les lignes. Pendant ce temps, les populations souffrent, suant de fatigue et d’angoisse. Tout ce que le pays compte d’instances de légitimation – confessions religieuses, têtes couronnées, personnalités et bonnes volontés – s’en vont offrir leur médiation, mais s’en retournent à leur base Gros Jean comme devant, totalement désillusionnées.

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Ainsi se diagnostique-t-il le mal actuel du Bénin. Mais vers quel nouvel horizon de vérité orienter nos pas, déterminés à reprendre l’initiative sous la dictée d’une boussole sûre ? Voici, pour ce qui nous concerne, une option gagnante : les trois « R ».

R comme Réforme. Il ne s’agit pas, structurellement parlant, de bouleverser de fond en comble l’ordre établi, l’architecture d’ensemble de notre pays. Nous bénéficions de sérieux acquis. Nombre d’entre eux se sont consolidés au fil du temps. D’autres ont mûri à l’épreuve de l’action. Nous n’avons besoin ni de messie ni d’oiseau rare. Il sera plutôt nécessaire, sur plus d’un point, de réexaminer l’existant. Il faut en ravaler la façade, le remettre au goût du jour, le soulager des scories dont nous l’avons inutilement encombré. Nous devons, par conséquent, nous engager dans des réformes hardies qui touchent à la vie entière du pays. Verticalement, de l’Etat central aux quartiers et aux hameaux du Bénin. Horizontalement, de la Culture à l’Emploi, de l’Ecole à la Santé, de la Diplomatie à la Justice et au Sport etc.

R comme Rectification. Le « Nouveau départ » s’est déjà essayé à quelques réformes. Elles ont tourné court. L’échec aura sanctionné l’essai. Deux exemples : le projet de révision de la Constitution et la politique de libération des espaces publics. L’échec, loin de signer ou de valider une paralysie doit être vu comme une opportunité. Ces deux réformes avortées doivent être courageusement reprises. Elles doivent bénéficier, pour une reformulation réussie, des enseignements du terrain, notamment sous l’angle de la méthode. En somme, c’est d’une rectification qu’il s’agit : changer notre fusil d’épaule, revoir nos stratégies d’action, faire nôtre ce mot de Montesquieu : « Pour faire de grandes choses, il ne faut pas être au-dessus des homme. Il faut être avec eux ».

R comme Réorientation. Ici, une seule question : pouvons-nous accepter comme allant de soi, près de 60 ans après notre indépendance, que la gestion du Port autonome de Cotonou soit confiée à l’expertise et au contrôle d’un groupe étranger ? La réorientation que nous souhaitons est de substance mentale, de portée symbolique, d’exigence sécuritaire. Elle concerne nos choix de base, nos approches identitaires, nos destinations finales dans l’ordre du développement. Ce sont, par conséquent, nos têtes que nous devons nous appliquer à faire scanner et à rectifier. Afin que le charbonnier soit et reste maître en sa maison, maître en son pays

Une réponse

  1. Avatar de Sonagnon
    Sonagnon

    La lecture de ce diagnostic sur le Bénin qui n’est d’ailleurs pas complet enseigne déjà qu’il est impératif que le peuple souverain se prononce sur la gouvernance de Patrice TALON.
    Le diagnostic n’est pas complet disais-je, car j’ai l’impression que l’auteur qui est un observateur averti de la scène politique béninoise a volontairement évité les sujet qui fâchent.
    Les maux dont souffre notre pays sous Patrice TALON sont plus sérieux que ne révèle l’auteur de l’article.
    Le pays est moralement, financièrement et socialement malade et agonissant, car n’ayons pas peur des mots. C’est au prix d’un diagnostic sans complaisance qu’on peut trouver une thérapie adaptée.
    La lutte contre le désert de compétences passe aussi par là.

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