Me Renaud Agbodjo justifie la récurrence des recours des Béninois à la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (Cadhp) par une situation de crise entre les justiciables et la justice béninoise. Invité sur Sikka Tv, il s’est prononcé aussi sur la nouvelle attitude de l’Etat béninois vis-à-vis de cette Cour.En principe, la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (Cadhp) n’est saisie qu’après l’épuisement des voies de recours à l’interne, en ce qui concerne les violations des droits de l’homme. Mais force est de constater qu’au Bénin, non seulement il y a désormais une volonté manifeste des Béninois à saisir cette instance mais surtout sans avoir même épuisé ces voies à l’interne. La raison est toute simple, selon Me Renaud Agbodjo.
«C’est bien attendu parce qu’il y a forcement une crise de confiance entre les justiciables béninois et la justice» explique l’avocat dans l’émission «100% Bénin» du mercredi 14 août 2019 sur Sikka Tv. A ses dires, au Bénin désormais, le justiciable va devant la justice « en victime expiatoire » en se disant: «En tout état de cause, que j’aie raison ou pas, je pars en défaitiste, on va me condamner ».
Le Bénin dans l’exception
L’avocat rappelle que la Cadhp, dans sa décision provisoire sur l’affaire Ajavon/Etat béninois avait constaté que la justice béninoise n’était pas libre et que le pouvoir exécutif s’y impliquait trop. «Aujourd’hui, la justice béninoise est chapeautée en termes de procédure disciplinaire par le Conseil supérieur de la magistrature composé à majorité d’hommes beaucoup plus politiques» ajoute l’avocat.
A l’en croire, dans ces conditions le citoyen a le droit de saisir le Cadhp car, l’une des conditions qui fait exception à l’épuisement des voies de recours interne, c’est l’inefficacité desdites voies. «Sur le fait que la justice interne n’est pas indépendance, la Cadhp peut se déclarer compétente et rendre sa décision ». Me Renaud Agbojo soutient qu’il faut travailler à ce que la justice béninoise retrouve ses lettres de noblesse, que les magistrats puissent travailler en toute sérénité et qu’elle puisse regagner la confiance du citoyen.
L’Etat béninois veut reconnaître les décisions de la Cadhp
Mais en attendant, l’Etat béninois a le devoir de respecter les décisions de cette Cour. L’invité de Sikka Tv estime qu’il est désormais dans cette dynamique. C’est du moins son analyse de la communication qu’il y a eu, selon lui, autour de l’ordonnance provisoire rendue par la même Cour semaine dernière sur des mesures provisoires demandées par l’ancien président de la République du Bénin, Boni Yayi. Même s’il trouve que c’est beaucoup plus une communication politique que juridique, il avoue que c’est heureux qu’il en ait eu.
« Tout porte à croire selon le mode de communication auquel nous avons eu droit, que l’Etat béninois semble désormais vouloir reconnaître les décisions de la Cour africaine des droits de l’homme […] et ne peut plus trouver d’inconvénient à ce que de plus en plus des Béninois aillent saisir la Cour». En le disant, Me Ranaud Agbodjo fait allusion à l’ordonnance provisoire de cette même Cour à laquelle l’Etat béninois n’a pas encore donné une suite favorable dans l’affaire 18 kg de cocaïne.
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