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Laboratoire de la citoyenneté

Chers amis internautes , avec un peu de retard sur le calendrier initial et pour des raisons indépendantes de notre volonté, nous inaugurons ce jour, dans le cadre du partenariat liant Lnt à Osiwa une nouvelle rubrique que nous avons intitulée « laboratoire de la citoyenneté ». Conçue comme une rubrique spéciale où des experts décryptent dans un langage simple l’ensemble des textes de lois  qui régissent les élections au Bénin, ce « laboratoire de la citoyenneté »  est d’abord  un espace de dialogue avec les internautes.

L’objectif principal est de permettre au citoyen lamda de comprendre d’abord les lois votées par les députés en son nom et de se familiariser avec les textes qui lui permettront d’exprimer librement son  suffrage. De manière pratique, cette rubrique hebdomadaire commencera par un texte rédigé par un juriste de haut niveau, spécialiste des questions électorales. Les internautes auront toute la latitude pour débattre entre eux dans un forum du même nom à charge pour eux (rejoignez le forum sur le lien ci-contre avant qu’il ne soit plein https://chat.whatsapp.com/EWClalk2TDz0rZz1AfJV76 ) de questionner les experts sur les aspects qui les intéressent particulièrement. L’ensemble de la rédaction est mobilisé pour faciliter ces échanges.

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I/-  DE LA DEMOCRATIE

« La pire des démocraties est beaucoup préférable à la meilleure des dictatures. » Ces mots de Duarte Barbosa magnifient la forme de gouvernance appelée démocratie et l’érigent en la meilleure qui soit au profit de l’Homme. « Gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple » selon l’expression d’Abraham Lincoln, la démocratie est l’un des multiples régimes politiques de par le monde. Elle tire sa source de plusieurs instruments juridiques. On distingue les sources d’origine externe  et la source interne. 

A travers des textes juridiques internationaux, de nombreux Etats ont proclamé explicitement ou implicitement leur foi en la démocratie. Ce sont à titre illustratif : la Charte des Nations Unies, la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, l’Acte Constitutif de l’Union Africaine, la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, la Charte Africaine de la Démocratie, des élections, et de la Gouvernance, le Protocole de la CEDEAO sur la Démocratie et la bonne gouvernance…

Sans employer expressément le mot « démocratie » la Charte des Nations Unies est porteuse de valeurs et principes propres à ce type de régime.  Les premiers mots de son « Préambule » « Nous, peuples des Nations Unies » sont le reflet du principe fondamental de la démocratie, à savoir que la volonté des peuples est la source de la légitimité » des pouvoirs politiques. Au troisième considérant dudit « Préambule » les Etats membres en proclamant « à nouveau notre [leur] foi dans les droits fondamentaux de l’homme, dans la dignité et la valeur de la personne humaine, dans l’égalité de droits des hommes et des femmes […] » adhèrent aux fondamentaux de la démocratie. Mieux que la Charte, la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme énonce les droits de l’Homme en démocratie : « tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits […] » (article 1er), « tout être humain  a droit à la vie, à la liberté et à la sûreté de sa personne » (article 3)… Les Etats africains ne sont pas restés en marge de l’option en faveur de la démocratie.

A travers l’Acte constitutif de l’Union africaine les Etats membres ont solennellement exprimé leur résolution « à promouvoir et à protéger les droits de l’homme et des peuples, à consolider les institutions et la culture démocratiques, à promouvoir la bonne gouvernance et l’Etat de droit ». Ils ont réitéré cet engagement en adhérant à la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples laquelle constitue tout comme la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme un répertoire des droits en démocratie. Elle évoque le droit de toute personne « à la jouissance des droits et libertés reconnus et garantis dans la présente Charte sans distinction aucune, notamment de race, d’ethnie, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou de toute autre opinion, d’origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation » (article 2). 

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Au moyen de la Charte Africaine de la Démocratie, des élections, et de la Gouvernance les Etats membres ont expressément réaffirmé leur « volonté collective d’œuvrer sans relâche pour l’approfondissement et la consolidation de la démocratie, de l’Etat de droit ». Ils ont martelé dans le cadre du Protocole de la CEDEAO sur la Démocratie et la bonne gouvernance… leur opposition à « tout changement anti-constitutionnel » du pouvoir et interdit  « tout mode non démocratique d’accession ou de maintien au pouvoir » (article 1er point C). L’adhésion manifestée au plan externe pour la démocratie se traduit dans l’ordre juridique d’origine nationale.

L’article 2 de la Constitution en vigueur au Bénin dispose : « La République du Bénin est une et indivisible, laïque et démocratique. Son principe est : le Gouvernement du Peuple, par le Peuple et pour le Peuple. »

En édictant une telle disposition, le Pouvoir Constituant Originaire de 1990 a fait ressortir le régime politique adopté par le Bénin à travers la Constitution tout en y joignant sa définition. Ce régime, c’est la démocratie. Le Constituant Originaire la conçoit comme « le Gouvernement du Peuple, par le Peuple et pour le Peuple ». Par ce mode de gouvernance, seul le peuple est souverain, détenteur du pouvoir. Pour une meilleure appréhension, il apparait utile d’insister sur les contours de la démocratie et d’en préciser les déterminants.

Qu’est-ce que la démocratie ?

Étymologiquement dérivée du grec demokratia, la démocratie désigne, dans son acception basique, un système où le peuple (demos) exerce le pouvoir (kratos). Cette dimension originale traduit la caractéristique fondamentale de la démocratie, à savoir le règne du nombre − par opposition aux systèmes non démocratiques tels que l’autocratie (le règne d’un seul), l’oligarchie (le règne de quelques-uns) et l’aristocratie (le règne des « meilleurs »). Le peuple se révèle donc être le maître du pouvoir dans une démocratie. 

En plus de l’opposition à la tyrannie, trois facteurs caractérisent l’idée et la pratique de la démocratie. Premièrement, la démocratie est un ensemble d’institutions utilisées pour parvenir à des décisions politiques dans lesquelles les citoyens détiennent le pouvoir à travers des élections. Deuxièmement, la démocratie est un régime politique dans lequel les dirigeants sont tenus pour responsables de leurs actions dans le domaine public par les citoyens agissant indirectement par le biais de la concurrence et de la coopération entre leurs représentants. Troisièmement, la démocratie est une norme politique fondée sur l’égalité et la justice.

Ces traits présentés de la démocratie montrent qu’elle n’est pas réductible à l’organisation d’élections, même si celles-ci sont au cœur du système. Les citoyens doivent contrôler le processus politique de façon continue, au-delà de la phase électorale. En outre, la démocratie n’est pas seulement l’expression de la souveraineté populaire (gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple) mais elle intègre également les valeurs que sont la responsabilité et l’obligation de reddition de comptes.

Enfin, la démocratie induit une approche de comportement ou de fonctionnement nécessaire à sa pleine intégration, à sa sauvegarde et à sa durabilité, et qui, est essentielle pour la protection des institutions, l’obligation de rendre des comptes laquelle incombe à ceux qui détiennent le pouvoir et le respect et la protection de l’Etat de droit et des droits humains. Un tel fonctionnement est un élément déterminant pour la qualité de tout processus de transition en tant que tentative ouverte de réalisation de la démocratie.

Tirant leçon de son passé politique et constitutionnel marqué par des violations massives des droits humains et libertés fondamentales, le peuple béninois a opté pour une légifération réactionnaire afin de ne plus avoir à subir ces maux. Comme le faisait remarquer le Professeur Théodore HOLO à propos de l’échec du dernier espoir en 1989, les masses vont « exiger le pain et la liberté ».

Ainsi, dans son processus de libéralisation politique ouvert au début des années 90 avec le vent du renouveau démocratique, le Bénin s’est résolument-il engagé sur la voie de la démocratie substantielle. Ceci a conduit à la Conférence Nationale des Forces Vives organisée du 19 au 28 février 1990 et au cours de laquelle les jalons de la démocratie béninoise ont été posés.

Quels sont les déterminants qui gouvernent la démocratie ?

La démocratie comprend le respect de tous les droits de l’Homme et libertés fondamentales, notamment la liberté d’association et de réunion pacifique, la liberté d’expression et d’opinion, la liberté de pensée, de conscience, de religion ou de conviction, le droit d’être reconnu partout en tant que personne devant la loi et le droit de participer à la conduite des affaires publiques, directement ou par l’intermédiaire de représentants librement choisis, de voter dans le cadre d’un régime pluraliste de partis et d’organisations politiques et d’être élu au cours d’élections honnêtes, périodiques et libres au suffrage universel et égal, et au scrutin secret garantissant la libre expression de la volonté populaire, ainsi que le respect de l’Etat de droit, la séparation des pouvoirs, l’indépendance du pouvoir judiciaire, la transparence et l’obligation de rendre des comptes dans l’administration publique et la prise de décisions, et des médias libres, indépendants et pluralistes.

L’Etat de droit est ancré dans un régime politique qui vise à établir l’égalité, limiter les contrôles et garantir la liberté. Un tel gouvernement représentatif est envisagé comme la source d’un modèle social juste assorti de libertés positives, de sorte que le principe de légalité est lui-même un élément de la démocratie.

En effet, les principes de l’Etat de droit, parmi lesquels la primauté de la loi, l’indépendance et l’impartialité du pouvoir judiciaire, la sécurité juridique, l’égalité, la non-discrimination, la séparation des pouvoirs, la transparence et l’obligation de rendre des comptes sont inséparables de ceux d’un ordre démocratique qui fonctionne.

La démocratie constitue un milieu naturel pour la protection, la promotion et la réalisation effective des droits de l’Homme et la réalisation de la justice. Une évaluation objective du degré de respect des droits de l’Homme et de l’Etat de droit permet une appréciation correcte de l’état de la démocratie dans un pays donné. En particulier, la preuve de l’accès aux affaires publiques et de la participation à celles-ci ainsi que l’expression du choix souverain du peuple fournissent des indications tangibles du respect des valeurs démocratiques et de l’efficacité des institutions en charge de la gouvernance dans un ordre démocratique.

L’interdépendance entre la démocratie et les droits de l’Homme est consacrée dans plusieurs instruments internationaux relatifs aux droits de l’Homme, notamment le Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques et la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme. 

Le Comité des Droits de l’Homme, dans son Observation Générale n° 25, souligne encore cette interdépendance en démontrant que l’article 25 du Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques, qui reconnaît et protège le droit de tout citoyen de prendre part à la direction des affaires publiques, le droit de voter et d’être élu et celui d’accéder aux fonctions publiques, est intrinsèquement lié à d’autres droits et principes démocratiques fondamentaux, tels que le droit à la liberté d’expression (paragraphe 12), la non-discrimination (paragraphe 3) et la responsabilité (paragraphe 9).

Par HUGUES TOSSA

2 réponses

  1. Avatar de Vigan
    Vigan

    C’est une bonne initiative

  2. Avatar de Le flux
    Le flux

    Je remercie la lnt et osiwa pour cette initiative.en lisant ce texte j’ai compris beaucoup de choses. Vraiment merci a vous

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