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Cellule des plaintes et dénonciations : Talon a-t-il perdu le combat contre la corruption ?

CPD : entendez Cellule d’analyses et de traitement des plaintes et dénonciations. C’est la nouvelle réponse anticorruption que le gouvernement vient de mettre en place avec des risques de délation et de calomnie qui pourraient s’ensuivre. Pavel Morozov : ce nom ne dit presque rien à personne au Bénin. Pourtant il est le symbole caractéristique de la dénonciation et de la délation à l’ère du régime soviétique. 03 septembre 1932, Village Guérassimovka,  situé quelque part entre l’Oural et la Sibérie. Pavel Morozov, alias Pavlik âgé de 13 ans est retrouvé raide mort dans les bois.

L’histoire officielle veut que ce jeune écolier brillant, chef des pionniers de son village, ait surpris son père Trofim Morozov, un cadre du régime soviétique et foncièrement contre les méthodes de gouvernance stalinienne, en train de falsifier des documents en faveur des opposants. Il avertit les autorités,  le père est arrêté, emprisonné dans le goulag où il trouva la mort après de maints sévices. Pour se venger contre cette traîtrise, Pavlik sera tué par les paysans.  La Guépéou (l’ancêtre du KGB) avait alors arrêté ses grands parents, un de ses oncles et un de ses cousins pour ce crime. Accusés de «  terrorisme contre l’État », tous quatre ont été fusillés.

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En réalité, Pavlik n’était ni pionnier ni brillant écolier. Sans doute son père a-t-il falsifié des documents pour de l’argent. Mais si Pavlik l’a dénoncé, c’est sous la pression de sa mère, qui voulait se venger d’avoir été abandonnée pour une autre femme. Ce sont du moins les conclusions auxquelles est arrivé Youri Droujnikov, un écrivain qui a longuement enquêté sur cette affaire dans les années 1970 . Une stèle pour immortaliser ce jeune calomniateur trône encore aujourd’hui devant la mairie de ce village. Ailleurs toujours en Russie, des rues, des écoles et des bibliothèques portent son nom. Il est le symbole ultime de la transformation des liens sociaux de la dictature stalinienne. Mais également l’icône de la délation. 

D’où la naissance du « mythe Pavlik » et la création de la police politique, la Guépéou. On me pardonnera d’évoquer cette anecdote mais ce rappel semble être nécessaire car ce mythe a été exploité plus tard en Afrique et dans certaines parties du monde pour mettre en place des systèmes de répression  notamment au Zaïre (RDC) de feu Mobutu, en Guinée Conakry de feu Sékou Touré et du Maroc de Hassan II et Feu président Mathieu Kérékou y avait fait recours dans les années 80. Ce qui a entraîné des arrestations de plusieurs étudiants et fonctionnaires traités d’antirévolutionnaires. En se référant à ce système qui a inspiré les autorités béninoises actuelles, il convient de tirer deux leçons. Primo, la dénonciation est une méthode mais n’est pas la meilleure solution pour lutter contre la corruption. Secondo, le gouvernement du président Patrice Talon en faisant ce choix semble capituler face à la corruption.

Dénonciations calomnieuses

En fait, le système de plainte et de dénonciation est un couteau à double tranchant. S’il est mal utilisé, il peut entraîner des conséquences désastreuses aussi bien au sein de la cellule familiale que dans la société : cas de Pavlik. Car, bien souvent, le dénonciateur n’est pas toujours animé d’une bonne foi. Il ne cherche dans certains cas ni à exercer un devoir civique ou patriotique ni à aider les autorités dans le rétablissement d’une justice. Mais, il agit pour régler des comptes par vengeance, jalousie, cupidité ou tout simplement dans l’intention de nuire à son prochain. Dès que la CDP sera mise en œuvre au Bénin, il faut s’attendre à des dénonciations calomnieuses et des arrestations arbitraires. Il suffit d’un petit contentieux entre deux individus dans un quartier et bonjour les dégâts.

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Un mari jaloux peut facilement envoyer son rival devant la CPD par une dénonciation mensongère. Quiconque se sent offensé au cours d’une banale altercation peut se venger en envoyant son protagoniste devant les membres de cette cellule.  Dans ces cas de figure comment prouver la véracité des faits ? La CPD exige que ce soit le dénonciateur. Mais qui vérifiera les preuves du dénonciateur ? Au demeurant, quelle sera la composition de cette fameuse cellule ? Pourquoi est elle logée à la Présidence de la République? Pendant ce temps-là que feront les officiers de police et les magistrats de nos tribunaux ordinaires ?  De toutes les façons, les assurances du gouvernement,  n’offrent aucune garantie de crédibilité, de transparence et de justice pour les citoyens. Personne ne sera à l’abri des abus de cette structure.

Échec et mat

Alors même qu’il a fait de la lutte contre la corruption et l’impunité son cheval de bataille depuis son accession au pouvoir, le président Patrice Talon peine à trouver des solutions adéquates face à ce fléau. Il ne se passe pas un seul jour sans que la presse ne relate des cas de malversations. Des dossiers de malversations financières s’amoncellent sur les bureaux des magistrats. En témoigne le dernier cas au ministère de l’enseignement où des millions de francs CFA ont été emportés par une vingtaine de cadres. Ce qui montre que les réformes entreprises depuis plus de cinq ans n’ont pas découragé les fonctionnaires véreux.

Pour palier à cette situation, le gouvernement n’a rien trouvé de mieux que de faire recours à des dénonciations. Face à ce constat, on est tenté de dire que le régime Talon n’a pas encore trouvé les solutions adéquates pour lutter contre la corruption malgré l’existence de nombreuses institutions qui sont censées s’y atteler notamment la CRIET, le Haut commissariat à la prévention de la corruption, la Cellule nationale de traitement des informations financières (CENTIF) de même que plusieurs organisations de la société civile.

5 réponses

  1. Avatar de SENGHORINE
    SENGHORINE

    Au rédacteur de cet article : vous ecrivez:  » Pour palier à cette situation, »
    VEUILLEZ RETENIR définitivement: On dit simplement « Pour pallier cette situation »

  2. Avatar de Tchité
    Tchité

    Il faudra aller où et à qui pour porter plainte contre le chef de l’état lui-même ?

    1. Avatar de AGBIGBI
      AGBIGBI

      très simple chez Tchité, le conseiller spécial et très puissant responsable des pratiques occultes de Paul Biya , une sorte de Maixent Accrombessi chez les Bongo

  3. Avatar de Gombo
    Gombo

    Excellent article !
    En réalité la fuite en avant du clan au pouvoir n’a d’autre but que jeter de la poudre aux yeux et masquer la corruption d’en haut! Voyons un peu!
    42 milliards soustraits au 1er conseil des ministres
    Captage des revenus par le PVI
    Siphonage des fonds du coton par le cartel
    Commissions et ristournes opaques sur les montages financièrs d’emprunt obligataire par intermédiaires liés au clan
    Bref quand ceux d’en haut s’en mettent plein les poches, il ouvre la voie et donne l’exemple du vol à grande échelle pendant qu’on arrête les jnsutitteurs accusés de voler un sac de riz…
    De qui se moque t-on ?

    1. Avatar de TALON-BI Zékré
      TALON-BI Zékré

      Févi, ninnouwi ana gba févi kpodo wokpo! nouvonon daho, mens comme tu urines dans ton lit pouilleux :De qui se moque t-on ? ben de toi

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