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Après l’interdiction de la tontine « adogbé » au Bénin, la tontine numérique comme alternative ?

Finie la tontine dite « adogbé ». Par une décision interministérielle, il est « interdit sur toute l’étendue du territoire national, l’activité illégale de collecte de l’épargne dénommée « adogbé » ou toutes autres formes ou appellations du genre ». Cependant, toute personne désireuse de se lancer dans cette activité devra se conformer aux dispositions de l’article 7 de la loi N° 2012 du 24 mars 2012 portant réglementation des systèmes financiers décentralisés, souligne la même décision. Il s’agit d’un coup dur pour de nombreuses populations béninoises qui s’adonnent à cette pratique depuis des dizaines d’années. Car ce mode d’épargne est très apprécié en raison de sa simplicité. Il suffit qu’une seule personne se décide à le faire. Il crée un groupe et convainc des amis ou les membres de sa famille d’épargner une petite partie de leur revenu. Le montant varie de 500 à 20.000 FCFA, voir plus.

La tontine se fait aussi avec des objets matériels, vaisselles, parcelles de terre. Les sommes sont collectées une fois par jour, par semaine ou par mois. A chaque rencontre, une seule personne empoche la totalité de l’argent et ainsi de suite jusqu’à ce que tous les adhérents puissent être servis. La tontine est au Bénin, un véritable exemple de solidarité et d’épargne traditionnelles. Lors des évènements importants de la vie, naissance, mariage ou deuil, les membres de la tontine sont tenus de manifester une solidarité humaine et financière. Et les réunions de tontine sont souvent pimentées de repas traditionnels au cours desquelles on partage les peines et les joies familiales. Malheureusement ce système est vicié par de nombreux cas de malversations.

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Dans la seule capitale béninoise Porto-Novo, plus de 600 plaintes ont été déposées à la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (CRIET) contre des gestionnaires de tontine qui ont disparu avec l’argent de leurs adhérents. C’est cela qui a amené le gouvernement béninois à les interdire, non pas pour porter un quelconque préjudice aux populations, mais, pour leur permettre de se formaliser et devenir des entités à part entière dans notre économie qui se modernise. Elles pourront dès lors bénéficier de tous les avantages légaux et même de la sécurité juridique en cas de conflit. Cependant, cette interdiction pourrait amener certaines personnes à se tourner vers la tontine numérique qui prend de plus en plus d’ampleur chez nous. Seulement voilà ! Cette autre tontine n’apporte pas de grandes assurances de crédibilité et de sécurité non plus.

Même pipe même tabac

Tout comme la tontine « adogbé » le système de tontine numérique s’appuie sur les mêmes fondamentaux avec l’acquisition rotative entre les adhérents. La seule différence est le fait que la collecte des sous se fait via le transfert d’argent. Pas besoin pour le gestionnaire de se déplacer avec une sacoche qui tenterait les voleurs. Chaque adhérent est averti par SMS de qui a cotisé et qui doit encore le faire. La discrétion est le premier avantage du système. Généralement, les gestionnaires de tontine aguichent leurs adhérents en mettant un numéro sur les réseaux sociaux, un groupe se forme et les activités commencent. Aujourd’hui, plusieurs personnes découvrent l’envie d’aller vers ce système numérique sans mesurer les conséquences qui sont les mêmes qu’on rencontre au niveau des tontines « adogbé ».

Parfois même pire, à cause de l’anonymat que l’on observe au niveau des réseaux sociaux. N’importe qui peut se cacher sous une fausse identité et créé sa tontine en ligne. Lorsqu’il a fait carton plein, il se fond dans le décor sans laisser la moindre trace. D’autres soucis peuvent également naître quand certains adhérents ne s’acquittent pas régulièrement de leurs cotisations. Le cas échéant, il est difficile de réunir la totalité de l’argent à remettre au récipiendaire. Commence un jeu du chat et la souris entre le gestionnaire et le récipiendaire. Parfois l’affaire se termine en justice. Un cas du genre a défrayé la chronique en octobre dernier, quand une adhérente a porté plainte pour atteinte à son honneur, contre la gestionnaire de sa tontine. Celle-ci a publié sa photo sur les réseaux sociaux pour la dénoncer et l’obliger à payer sa quote-part. Le dossier est toujours pendant. C’est donc clair : la tontine en ligne n’offre pas de garantie à ceux qui la choisissent pas plus qu’elle n’assure aucune sécurité. Avis défavorable à ceux qui sont prêts à placer leur argent en ligne.

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