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Démocratie en Afrique : Voici ce que le père Raymond Goudjo en dit dans son nouveau livre

Quelques jours après la publication de son nouveau livre :  « La Démocratie en Afrique. Le Réveil prévisible des vieux démons » sous-titré Essai de relecture de l’encyclique sociale   ‘’ Centessimus annus’’, le père Bernard Raymond Goudjo nous en dit plus sur ce choix qu’il a fait d’écrire sur la démocratie en Afrique. À la faveur d’une discussion à bâtons rompus avec certains hommes des médias, il a livré ses réflexions sur des sujets tels que les coups d’État, l’influence de la France en Afrique, l’homosexualité abordés dans le livre. Nous vous proposons de lire l’intégralité de cette discussion.

Pourquoi écrire un livre sur la Démocratie en Afrique ?

Depuis 1989, j’ai suivi le processus de démocratisation. Mgr Isidore de Souza de vénérée mémoire, m’avait demandé de faire des études de Doctrine sociale de l’Église pour vulgariser la pensée sociale de l’Église en matière de paix, de justice et au sein de la société béninoise. Le thème de ma thèse s’est intitulée : « La Liberté en Démocratie, l’Éthique sociale et la réalité politique en Afrique ». Plus de 20 ans plus tard, je vois que nous continuons de piétiner malgré tout ce qui a été mis en œuvre pour avoir un processus qui respecte le droit des consciences. C’est là où le bât blesse.  Si je me suis décidé à prendre ma plume, j’ai pris le temps d’observer le processus démocratique depuis 2016 dans mon pays. J’ai vu qu’il y a un changement pour ce que j’appellerais un hiatus. J’ai senti qu’il y a quelque chose de nouveau qui va se passer. Quoi ? Après le coup d’État au mois d’août avec le Niger, la réaction des présidents de la Cedeao m’a surpris. Ils admettent des coups d’État constitutionnels, mais n’admettent pas que les militaires règlent les problèmes de société avec le bâton ou avec les fusils.

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Qu’entend-t-on par Démocratie ?

La démocratie repose sur la liberté personnelle et non sur l’individualisme. Elle veut que le peuple puisse s’exprimer avec sa liberté de conscience et suppose que ceux qui veulent gouverner le peuple aient de hautes qualités morales. Voilà où le bât blesse. À un moment donné de l’histoire, ce n’est pas seulement en Afrique, la démocratie a été prise en otage par le monde de l’Économie. C’est l’Économie qui dirige aujourd’hui la politique. À partir de ce moment, la démocratie s’est tournée vers de propres intérêts privés. La démocratie de l’investisseur est une démocratie du profit. Tant pis pour le peuple ! Est-ce que le peuple peut s’exprimer librement, dire ce qu’il pense et oser aussi porter sa voix pour qu’on le comprenne ?  La démocratie n’est donc pas la gouvernance du peuple par le peuple et pour le peuple comme on le dit. Mais la démocratie est l’expression de la liberté profonde d’un peuple qui s’exprime en conscience en vertu du bien commun.

Que faut-il donc comprendre du titre « La Démocratie en Afrique, le réveil prévisible des vieux démons » ?

 Les militaires sont là pour défendre le territoire, les policiers sont là pour mettre de l’ordre et aider le gouvernement civil à mettre de l’ordre dans la société. Mais les militaires ne sont pas du tout là pour mater un peuple. Donc à partir de ce moment, quand on voit que ceux qui ont pris le pouvoir travaillent sur un jeu d’intérêt qui n’autorise pas les partis opposés ou un groupe de pensées opposées à s’exprimer, il faut se dire qu’il y a quelque chose qui allait revenir. Et ce qui allait revenir, ce sont les coups d’État que nous avons oubliés pendant quelques années vues que les situations partout en Afrique devenaient de plus en plus compliquées.

Les coups d’États sont donc justifiés selon vous ?

On ne justifie pas un coup d’État, mais on constate un coup d’État. Justifier un coup d’État serait une erreur. Mais on constate qu’il y a une situation qui a prévalu. Je prends cet exemple. On dit qu’il est interdit de voler. Mais nous est-il permis de laisser quelqu’un mourir de faim ? Alors, il faut donc se demander pourquoi il a volé ? Alors en cas d’ultime nécessité, la personne qui est en train de mourir de faim, s’il prend ce qui ne lui appartient pas, le prend pour survivre. S’il prend pour survivre, il n’a pas le droit d’être puni et tapé. On constate que s’il ne le prenait pas, il va mourir. À ce moment donc, c’est une faute de la société. Ça, c’est le droit moral ou la morale fondamentale. Au point de vue social, quand des pays se voient pris à la gorge par un piétinement des sociétés ou de la société civile ou de la société politique qui ne sait pas comment elle va réagir, surtout quand ces militaires constatent qu’ils sont devenus de la chaire à canon au profit de n’importe quel intérêt, n’ont-ils pas le droit de réagir ? Il faut qu’on se pose des questions de fond. Je ne dis pas qu’il faut des coups de temps.  Il ne faut ni coup d’État militaire ni coup d’État constitutionnel. Mettons les choses à terre et demandons pourquoi c’est arrivé. Mais on accuse une partie sans se poser la question. Et cela me rappelle la besace de Victor Hugo : <<nous mettons dans la besace les défauts des autres et nous mettons nos propres défauts dans notre dos>>. Il faut sortir tous les défauts.

Constatez-vous vraiment une séparation de pouvoir au Bénin ?

Attention je n’ai pas pris dans mon livre comme point de référence l’avènement du président Patrice talon. Pour scruter la démocratie j’ai pris comme référence l’encyclique social du pape Jean-Paul II. J’ai fait ressortir sur la 4e de couverture le texte majeur. C’est celui-ci qui m’a fait réfléchir. Mais en matière d’histoire, pour ne pas faire un gros livre insipide, il a fallu d’abord voir les situations, pas en partant d’abord du Bénin, mais en partant de ceux qui ont commencé les coups de temps. Il s’agit donc du Mali et de la Guinée. Il ne faut tout de même pas oublier que c’est la France qui a fait son coup d’État au Tchad. Sarkozy a aussi fait son coup d’État en Côte d’Ivoire et en Libye. Disons les choses clairement. Ce ne sont pas les présidents africains qui ont commencé les coups d’État. L’exemple est venu du colon. Quand l’armée française dirige des militaires et tire sur les populations au nom d’une reprise du droit. Quand Emmanuel Macron va installer le fils Déby en disant : << nous ne permettrons jamais que les intérêts de la France soient menacés>>. Comprenez que c’est un coup d’État.

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Vous avez abordé également, dans votre livre, le phénomène relatif à l’homosexualité. Ne pensez-vous pas que c’est aussi lié à la Démocratie ?  

Ce n’est pas lié simplement à la démocratie. C’est lié à la façon dont on considère le monde. C’est-à-dire la vision qu’on a du monde, de l’être humain. À partir du moment où ces peuples se déclarent athées, ils ne feront qu’à dorer des bêtes. La bête s’adore à partir de la bestialité. L’homosexualité était considérée même pas des médecins en neurosciences comme une maladie. Mais brusquement, le paradigme a changé. On demande de considérer ça comme une chose normale. Tout simplement parce qu’il y a eu la pensée de la déconstruction sociale qui veut renverser toutes les valeurs et même les valeurs dites chrétiennes. Friedrich Nietzsche nous prévenait de ce qui se passe actuellement quand on le lit très bien. Une liberté qui n’est pas personnelle, mais qui se concentre sur le plaisir de l’individu n’a pas de frontière. Le christianisme avait fait disparaître l’homosexualité de la société pendant des temps. Tout revient à partir du moment où l’Europe se déchristianise. Mais malheureusement, ce mouvement aussi s’est vu à l’intérieur même du clergé occidental surtout. Quand on ne veille pas à la pratique des vertus humaines, quel que soit ce qu’on vit ou ce qu’on est, quand on n’est pas dans la renonciation permanente, nous allons rencontrer toutes les défiances que nous allons accepter comme normal. La première société qui existe, c’est la famille. Elle est la base et le noyau, c’est de là que commence l’éducation. C’est la famille composée d’un père et d’une mère. Quand on confie l’éducation à la rue, on ne peut pas former des démocrates. Il faut qu’on aille plus loin. Pourquoi veut-on que nous soyons homosexuels ? Est-ce pour un bien ou est-ce qu’on veut donner place à l’intelligence artificielle qui va nous gérer ? Est-ce qu’on veut donner place aussi à la création de bébé éprouvette, des enfants dans la PMA ?  Posons-nous les questions de fond et allons plus loin. Voilà pourquoi je reviens à la base, il faut la famille.

Pourquoi avoir choisi cette période pour publier le livre ?

La première parution devrait sortir au mois de novembre. Chaque fois, il y a une nouvelle qui surgit et il faut compléter. Quand on écrit sur des questions actuelles, l’actualité va plus vite que nous. J’ai dû plusieurs fois de recommencer. J’aurais pu de nouveau attendre quand les pays de l’AES ont décidé de quitter la CEDEAO. Ce qui fait qu’il y a eu double publication. J’ai dû rajouter alors que ceci était chez l’imprimeur au Bénin. J’ai renvoyé une nouvelle publication un peu plus complète aux éditions universitaires européennes.

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