La récente décision du ministère américain du Commerce d’augmenter les droits de douane sur les engrais phosphatés en provenance du Maroc a envoyé des ondes de choc à travers l’industrie agricole américaine. Cette mesure intervient à peine quelques mois après une réduction significative des droits de douane, conçue pour stimuler l’accès à des intrants agricoles moins coûteux. Cependant, le revirement soudain met en lumière les tensions persistantes dans les relations commerciales entre les deux nations.
Initialement saluée comme une bouffée d’air frais pour les agriculteurs américains, la réduction des droits de douane sur les produits de l’Office Chérifien des Phosphates (OCP) en novembre 2023 a été de courte durée. Les droits, passés de 19,97% à 2,12%, ont maintenant subi une augmentation remarquable, atteignant 14,21%. Cette fluctuation abrupte est justifiée par le gouvernement américain comme une réponse aux subventions présumées accordées à l’industrie marocaine des phosphates.
Les répercussions de cette décision ne se feront pas attendre, affectant directement les agriculteurs américains qui dépendent fortement des importations d’engrais phosphatés pour leurs cultures, en particulier le maïs. Avec une hausse anticipée des prix du phosphate, les marges bénéficiaires des cultivateurs sont menacées, exacerbant les difficultés économiques déjà présentes dans le secteur agricole.
La National Corn Growers Association (NCGA) a vivement critiqué cette décision gouvernementale, la jugeant contre-productive pour les fermiers. Dans le même temps, l’OCP, principal acteur mondial de la production de phosphates, conteste la méthodologie utilisée par le ministère américain pour calculer les droits d’importation et envisage une procédure d’appel devant le Tribunal du commerce international des États-Unis.
Les droits de douane sur les engrais marocains sont depuis longtemps une pomme de discorde entre les États-Unis et le Maroc, comme en témoigne la plainte déposée en 2021 par Mosaic, un producteur américain d’engrais, contre la concurrence marocaine. Bien que l’OCP ait remporté une victoire juridique en novembre 2023, la décision récente du ministère américain semble être une nouvelle offensive visant à affaiblir la position concurrentielle du Maroc sur le marché international.
Les arguments en faveur d’une augmentation des importations d’engrais phosphatés sont étayés par les perturbations de la chaîne d’approvisionnement en 2021, qui ont entraîné une réduction de l’offre et une augmentation des prix. Cependant, les agriculteurs américains soutiennent que des droits de douane accrus ne feraient qu’alourdir leurs charges financières dans un contexte économique déjà difficile.
La décision du Département du Commerce est particulièrement préjudiciable pour les agriculteurs, comme le souligne Harold Wolle, président de la NCGA. Elle intervient à un moment où les entreprises américaines d’engrais enregistrent des bénéfices en baisse, en partie à cause de la diminution des prix. Mosaic, par exemple, a rapporté une chute de 26% de son chiffre d’affaires au premier trimestre par rapport à l’année précédente.
Bien que les droits de douane aient été présentés comme un moyen de neutraliser l’effet des subventions gouvernementales accordées aux exportateurs étrangers, ils ont également créé une volatilité sur le marché. Bruce Bodine, PDG de Mosaic, a reconnu cette volatilité mais a soutenu que les droits de douane ont « fonctionné comme prévu ».
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