Afrique: la France perd un grand projet face à la Chine

Photo d'illustration de afiq fatah - Unsplash

La France, jadis puissance coloniale majeure en Afrique, a longtemps dominé les marchés d’infrastructures sur le continent. Grâce à ses liens historiques, son influence diplomatique et l’expertise de ses entreprises, l’Hexagone s’est taillé la part du lion dans de nombreux secteurs, de l’énergie aux transports en passant par les télécommunications. Cette mainmise s’est traduite par l’obtention de contrats lucratifs pour la construction de ports, de centrales électriques et de réseaux routiers dans plusieurs pays africains. Cependant, cette hégémonie française se trouve aujourd’hui bousculée par l’émergence de nouveaux acteurs, en particulier la Chine, dont l’appétit pour les ressources et les marchés africains ne cesse de croître.

Un revers symbolique pour Paris

Le projet d’autoroute Nairobi-Malaba illustre parfaitement ce changement de paradigme. Initialement attribué à un consortium français composé de Vinci et Meridiam en 2019, ce chantier titanesque vient d’être récupéré par la Chine, sur décision du président kényan William Ruto. L’annonce, faite lors du Forum de coopération Chine-Afrique à Pékin, sonne comme un coup dur pour les intérêts français dans la région.

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Cette infrastructure stratégique, évaluée à plus d’un milliard d’euros, prévoit la construction d’une route à deux fois deux voies reliant la capitale kényane à la frontière ougandaise. Son importance dépasse largement les frontières du Kenya, puisqu’elle vise à faciliter le transport de marchandises vers l’Ouganda, le Rwanda, la République démocratique du Congo et le Soudan du Sud. Le modèle économique reposait sur un système de péage censé permettre aux entreprises françaises de rentabiliser leur investissement sur trois décennies.

La Chine, nouveau maître d’œuvre des grands chantiers africains

Le revirement du Kenya en faveur de la Chine s’inscrit dans une tendance lourde observée depuis plusieurs années. Pékin a su s’imposer comme un partenaire incontournable pour de nombreux pays africains, en proposant des financements massifs et des délais de réalisation souvent plus courts que ses concurrents occidentaux. Au Kenya, l’empreinte chinoise est déjà visible à travers des réalisations emblématiques telles que l’autoroute de Thika, la voie express de Nairobi ou encore la ligne ferroviaire Mombasa-Nairobi.

La décision de William Ruto surprend d’autant plus qu’elle semble contredire ses promesses de campagne. Le président kényan avait en effet critiqué la dépendance excessive de son pays envers les investissements chinois, promettant de diversifier les partenariats. Ce revirement souligne la complexité des enjeux géopolitiques et économiques qui sous-tendent les grands projets d’infrastructure en Afrique.

Un défi pour la diplomatie économique française

Pour la France, la perte de ce contrat majeur pose la question de sa stratégie d’influence sur le continent africain. Face à la concurrence chinoise, mais aussi à celle d’autres puissances émergentes comme la Turquie ou l’Inde, l’Hexagone doit repenser son approche. Les entreprises françaises, malgré leur expertise reconnue, peinent parfois à s’adapter aux nouvelles réalités du marché africain.

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L’enjeu pour Paris est désormais de trouver un équilibre entre la préservation de ses intérêts économiques et la nécessité de proposer des partenariats plus équilibrés aux pays africains. Cette quête passe par une meilleure prise en compte des aspirations locales, une plus grande flexibilité dans les modèles de financement et une capacité à s’intégrer dans des consortiums internationaux. La France doit également miser sur ses atouts, notamment dans les domaines de l’innovation technologique et du développement durable, pour se démarquer de la concurrence.

L’épisode de l’autoroute Nairobi-Malaba illustre les défis auxquels fait face la diplomatie économique française en Afrique. Dans un contexte de compétition accrue, la capacité à maintenir son influence tout en s’adaptant aux nouvelles dynamiques du continent sera cruciale pour l’avenir des relations franco-africaines. Le temps où la France pouvait considérer certains marchés comme acquis semble révolu, ouvrant la voie à une reconfiguration des rapports de force économiques sur le continent.

4 réponses

  1. Avatar de Yves Brozovic
    Yves Brozovic

    L’empire Occidental à domine le Monde depuis Christophe Colomb, c’est tout doucement la fin. U jour il faut accepter de partager le gateau.

    1. Avatar de Juju
      Juju

      L’empire occidentale, l’empire oriental….
      Pourquoi les africains ont-ils toujours besoin de partager leur super gâteau avec les autres ?
      Peut être qu’avec les autres, cela rapporte un peu plus à certains africains….

  2. Avatar de Le Baikal
    Le Baikal

    Allons du côté de l’Éthiopie pour comprendre les relations économiques avec la Chine. Depuis vingt ans, la Chine joue un rôle majeur dans la région en matière d’investissement dans les secteurs de l’énergie, des infrastructures de transport, des complexes industriels et du numérique. La liaison ferroviaire entre Addis-Abeba et Djibouti, l’un des projets phares des nouvelles Routes de la Soie, financé par la Chine et construit par des entreprises chinoises en 2018, contribue efficacement à la connectivité entre Djibouti et l’Éthiopie.
    L’Éthiopie a connu une forte croissance économique , grace a la Chine, depuis une quinzaine d’années avec un taux de croissance moyen d’environ 10 % par an, l’un des plus élevés au monde. Le succès de la politique économique à la chinoise en Éthiopie est devenu ainsi une référence en Afrique pour les pays participants à l’initiative des nouvelles Routes de la Soie.
    Les entreprises françaises ne pensent qu’à leurs propres intérêts sans travailler dans une relation donnant-donnant. C’est encore l’esprit colonial qui l’emporte.

  3. Avatar de Patrice DECHAUMONT
    Patrice DECHAUMONT

    il faut changer vos attitudes Commercial ! Surtout en Afrique ! vous vous faites raffler les Marchés car les Entreprises Françaises sont beaucoup trop cher, vous vous croyez encore au temps de France Afrique. Revoyez votre Politique Commerciale et Industrielle

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