Maghreb – UE : les différends exposés par ce pays

Les relations entre l’Union européenne et les pays du Maghreb ont connu de nombreuses initiatives de partenariat depuis les années 1960. Des accords commerciaux préférentiels, comme celui entre le Maroc et la CEE en 1969, ont posé les premiers jalons de cette coopération. La Politique européenne de voisinage, lancée en 2004, visait à renforcer les liens avec les pays méditerranéens, incluant l’Algérie, le Maroc et la Tunisie. Le Processus de Barcelone de 1995 ambitionnait même de créer une zone de libre-échange euro-méditerranéenne d’ici 2010, un objectif qui n’a pas été concrétisé. Ces expériences mettent en lumière la complexité des relations euro-maghrébines, marquées par des asymétries économiques persistantes et des divergences d’intérêts.

Un accord d’association aux résultats mitigés

L’accord d’association entre l’Algérie et l’Union européenne, en vigueur depuis 2005, fait l’objet de critiques croissantes de la part des autorités algériennes. Le ministre des Affaires étrangères, Ahmed Attaf, a récemment souligné les déséquilibres engendrés par cet accord. Les chiffres sont éloquents : sur quinze ans, le volume des échanges commerciaux a atteint 1.000 milliards de dollars, tandis que les investissements européens en Algérie n’ont pas dépassé 13 milliards de dollars, principalement dans le secteur des hydrocarbures. Cette disparité est d’autant plus frappante que ces investissements ont généré un transfert de 12 milliards de dollars de dividendes vers l’Europe entre 2005 et 2020.

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Cette situation révèle un modèle économique axé sur les importations, au détriment du développement d’une économie productive diversifiée en Algérie. Le déficit chronique de la balance commerciale hors hydrocarbures illustre cette dépendance et souligne la nécessité de revoir les termes de l’accord pour équilibrer les intérêts des deux parties.

Tensions commerciales et quête d’autonomie économique

Un différend commercial a éclaté en juin dernier entre l’Algérie et l’Union européenne, cristallisant les tensions accumulées. Bruxelles a engagé une procédure de règlement des différends contre l’Algérie, suite aux mesures prises par Alger pour rationaliser ses importations et encourager l’utilisation d’intrants locaux, notamment dans le secteur automobile. L’Algérie défend ces actions comme essentielles à la préservation de ses réserves de change et à la relance de son industrie nationale, tandis que l’UE les perçoit comme protectionnistes.

Paradoxalement, malgré ces restrictions, les échanges commerciaux entre l’Algérie et l’UE ont connu une croissance significative, avec une augmentation de plus de 20% en 2023 par rapport à 2022, et de 15% au premier trimestre 2024 comparé à la même période en 2023. Ces chiffres remettent en question la justification de la procédure européenne et soulignent la complexité des enjeux en présence.

Vers une redéfinition des partenariats économiques

Face à ces défis, l’Algérie appelle à une révision approfondie de l’accord d’association, article par article. Cette démarche, initiée par le président algérien, vise à établir un nouveau cadre de coopération basé sur le principe du gagnant-gagnant, tout en préservant les intérêts des producteurs algériens. L’objectif est de créer un tissu industriel local robuste et de générer des emplois durables.

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Cette volonté de rééquilibrage s’inscrit dans une réflexion sur l’avenir des relations entre l’UE et les pays du Maghreb. Elle met en lumière la nécessité de repenser les modèles de partenariat économique pour qu’ils soient plus équitables et mutuellement bénéfiques. Le cas algérien pourrait ainsi influencer l’évolution des accords euro-méditerranéens, en prenant davantage en compte les aspirations de développement et d’industrialisation des pays du Sud.

L’issue de ces négociations aura des répercussions importantes non seulement pour l’Algérie et l’UE, mais aussi pour l’ensemble de la région méditerranéenne. Elle pourrait ouvrir la voie à une nouvelle ère de coopération économique, où le développement industriel et la création de valeur ajoutée locale seraient au cœur des échanges, plutôt qu’un simple flux de marchandises et de matières premières. Cette évolution potentielle des relations euro-maghrébines pourrait redéfinir les équilibres économiques dans la région et influencer les stratégies de développement des pays concernés pour les années à venir.

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