Face aux défis climatiques et énergétiques, le nucléaire connaît un regain d’intérêt mondial. Alors que de nombreux pays réévaluent leur mix énergétique, cette technologie s’impose comme une option de choix pour produire de l’électricité décarbonée à grande échelle. Ce renouveau s’accompagne d’importants investissements dans la recherche et le développement de technologies nucléaires avancées, visant à améliorer la sûreté, l’efficacité et la gestion des déchets. Dans ce contexte, les réacteurs de nouvelle génération, tels que ceux à sels fondus, suscitent un enthousiasme croissant au sein de la communauté scientifique et industrielle.
Une propriété inattendue du trichlorure d’uranium
Une équipe du laboratoire national Oak Ridge aux États-Unis vient de franchir une étape significative dans la compréhension des matériaux utilisables pour les futurs réacteurs nucléaires. Leurs travaux, publiés dans le Journal of the American Chemical Society, portent sur le comportement des sels liquides de trichlorure d’uranium (UCl3), un composé envisagé comme combustible potentiel pour les réacteurs à sels fondus.
La découverte majeure réside dans une caractéristique surprenante de l’UCl3 : contrairement à la plupart des matériaux, il ne se dilate pas sous l’effet de la chaleur, mais se contracte. Cette propriété atypique pourrait révolutionner la conception des réacteurs nucléaires, en remettant en question les principes établis depuis des décennies. Santanu Roy, co-directeur de l’étude, souligne l’importance de cette avancée pour élaborer des modèles prédictifs plus précis, essentiels à la conception des réacteurs du futur.
Une technologie prometteuse en quête de perfectionnement
Les réacteurs à sels fondus ne sont pas une idée nouvelle. Étudiés depuis les années 1960, ils promettent une production d’énergie plus sûre, plus efficace et générant moins de déchets radioactifs que les réacteurs conventionnels. Cependant, leur développement a longtemps été freiné par des défis techniques et un manque de connaissances approfondies sur le comportement des matériaux en conditions extrêmes.
La récente étude d’Oak Ridge apporte un éclairage inédit sur les mécanismes à l’œuvre dans les sels fondus d’uranium. Les chercheurs ont réussi à mesurer, pour la première fois au monde, la longueur des liaisons atomiques au sein de ces sels à l’état liquide. Ils ont ainsi mis en évidence un cycle d’éloignement et de rapprochement des atomes, ainsi que la formation de liaisons covalentes, expliquant certaines incohérences observées dans des études antérieures.
Des applications au-delà du nucléaire
Les implications de cette découverte dépassent le cadre strict de la fission nucléaire. Les modèles améliorés qui en découleront pourraient trouver des applications dans la gestion des déchets nucléaires et le pyrotraitement, une technique de recyclage du combustible usé. Cette approche, qui consiste à chauffer les combustibles irradiés pour en extraire les éléments valorisables, pourrait contribuer à réduire significativement le volume et la dangerosité des déchets nucléaires à long terme.
Alors que la fusion nucléaire reste un horizon lointain malgré des progrès constants, ces avancées dans le domaine de la fission ouvrent de nouvelles perspectives pour une énergie nucléaire plus performante et durable. Elles illustrent comment la recherche fondamentale sur les propriétés de la matière peut conduire à des innovations majeures dans le domaine énergétique, contribuant ainsi à relever les défis du changement climatique et de la transition énergétique.
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