Depuis le début de la guerre en Ukraine en février 2022, le conflit entre Kiev et Moscou a connu de nombreux rebondissements. Les forces ukrainiennes, soutenues par l’Occident, ont réussi à repousser l’offensive initiale russe et à mener des contre-offensives audacieuses. Cependant, la ligne de front s’est largement stabilisée ces derniers mois, avec des gains territoriaux limités de part et d’autre. Dans ce contexte d’enlisement, l’Ukraine cherche à obtenir de nouvelles armes capables de frapper en profondeur le territoire russe, espérant ainsi inverser le rapport de force sur le champ de bataille. Cette quête d’armement plus sophistiqué met Washington dans une position délicate, entre soutien à son allié et crainte d’une escalade du conflit.
Une requête audacieuse de Kiev
Le ministre ukrainien de la Défense, Rustem Umerov, a récemment fait une démarche inhabituelle auprès de l’administration Biden. Lors de réunions à Washington, il aurait présenté une liste de cibles en Russie que l’Ukraine souhaiterait frapper à l’aide de missiles ATACMS américains. Ces systèmes de missiles tactiques à longue portée permettraient à Kiev d’atteindre des objectifs bien au-delà de la ligne de front actuelle, jusqu’à 300 kilomètres à l’intérieur du territoire russe.
Umerov justifie cette demande par la nécessité de « protéger les citoyens contre la terreur russe ». Pour l’Ukraine, disposer de telles capacités offensives serait un moyen de rééquilibrer le rapport de force face à une Russie qui utilise sans restriction son arsenal de missiles contre les villes ukrainiennes. Le ministre espère ainsi avoir convaincu ses interlocuteurs américains du bien-fondé de cette requête, qui marquerait un tournant dans le soutien occidental à l’effort de guerre ukrainien.
Washington temporise face aux risques d’escalade
Malgré l’insistance de Kiev, l’administration Biden reste pour l’instant sur sa position initiale concernant l’utilisation des armes américaines par l’Ukraine. Le porte-parole du Pentagone, le général Pat Ryder, a réaffirmé que la politique américaine n’avait « pas changé » concernant les frappes à longue portée contre la Russie. Washington craint en effet qu’autoriser de telles frappes ne mène à une dangereuse escalade du conflit, pouvant potentiellement impliquer directement l’OTAN.
Au-delà des considérations stratégiques, des contraintes logistiques freinent également la livraison de missiles ATACMS à l’Ukraine. Les stocks américains de ces armes sont limités et leur production prend du temps. L’armée américaine doit ainsi jongler entre ses propres besoins opérationnels et le soutien à son allié ukrainien. Cette situation illustre les dilemmes auxquels font face les pays occidentaux dans leur aide à l’Ukraine : jusqu’où aller dans le soutien militaire sans risquer une confrontation directe avec la Russie ? La demande ukrainienne de frapper le territoire russe en profondeur place ainsi Washington face à un choix cornélien, entre renforcement de la capacité offensive de Kiev et maintien d’une certaine retenue dans l’escalade militaire du conflit.
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