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Discours de Talon sur l’Etat de la nation: Les talons d’Achille de la gouvernance de la rupture

Aujourd’hui 20 décembre 2024, le président béninois Patrice Talon prononcera son discours annuel sur l’état de la nation devant l’Assemblée nationale à Porto-Novo. Cette allocution, conforme aux dispositions constitutionnelles, offre au chef de l’État l’occasion de dresser le bilan de l’année écoulée et de présenter les priorités gouvernementales pour l’année à venir. Ce discours intervient dans un contexte où la gouvernance dite de la « Rupture » fait face à plusieurs défis majeurs.

C’est l’avant dernier discours sur l’Etat de la nation que prononcera Patrice Talon depuis son accession au pouvoir en 2016. Depuis lors, le gouvernement de la rupture a initié plusieurs réformes visant à moderniser l’économie et à renforcer les institutions. Cependant, sa gouvernance a suscité des critiques, notamment concernant la cherté de la vie, l’absence de dialogue politique et l’ombre qui plane sur les élections de 2026, les tensions diplomatiques, les défis sécuritaire, la restriction des libertés fondamentales.

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Cherté de la vie et pouvoir d’achat des populations

Des acteurs sociaux soulèvent des mécontentements face à la hausse du coût de la vie, attribuant cette situation à des facteurs internes tels que la mal gouvernance et une politique fiscale jugée écrasante. Les béninois expriment une déception croissante face à la hausse des prix des produits de première nécessité, tels que le maïs, le riz et le gari, entraînant une baisse significative du pouvoir d’achat. L’inflation, souvent liée à des hausses des prix des produits de base (alimentation, carburant, logement), affecte directement le coût de la vie, même si selon les statistiques officielles, le Bénin connait l’un des taux d’inflation les plus bas de la sous-région. La hausse des prix réduit l’accès des populations les plus vulnérables à des biens et services essentiels. Du coup, les ménages consacrent une part croissante de leurs revenus à l’alimentation et aux transports.

La majorité de la population active travaille dans l’économie informelle, où les revenus sont souvent irréguliers et insuffisants pour couvrir les besoins fondamentaux. Les salaires dans le secteur formel et public sont relativement faibles par rapport à l’évolution du niveau de vie. Les charges fiscales, combinées à une augmentation des coûts des services (électricité, eau, santé), réduisent davantage le pouvoir d’achat. Les efforts qui sont faits pour rehausser le panier de la ménagère restent insuffisants pour compenser les hausses généralisées des prix.  

Relations avec les voisins

Des tensions diplomatiques ont émergé, notamment avec le Niger. Des différends liés au coup d’état survenu en 2023 à Niamey, ont conduit à la fermeture de la frontière entre les deux pays, affectant les relations bilatérales et ayant des répercussions économiques significatives. Depuis lors, et malgré tout ce qui est fait, le rétablissement des relations entre les deux pays reste toujours à espérer pour les jours, mois et années à venir. Même si dernièrement, l’ambassadeur du Bénin a été accepté au Niger et que ce dernier a nommé le tien au Bénin, la frontière reste fermée.

Avec le Burkina Faso, le Bénin n’est pas non plus en parfaite harmonie. Le président de transition de ce pays a en effet accusé ouvertement, et à plusieurs reprises, le Bénin d’abriter des bases militaires françaises, avec pour objectif, la déstabilisation du Burkina Faso.

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Absence de dialogue politique et élections générales de 2026

Sur le plan politique, des arrestations de personnalités proches du président, accusées de complot contre la sûreté de l’État, ont été observées, alimentant les débats dans l’opinion. Ces éléments pourraient constituer des points sensibles que le président Talon abordera lors de son discours, afin de répondre aux préoccupations des citoyens et de l’opposition, et de clarifier les orientations futures de sa gouvernance.

L’opposition a souvent dénoncé le fait que des décisions sont prises sans recherche de consensus. Elle souhaite une approche plus inclusive, privilégiant le dialogue et la participation active de la population dans les réformes entreprises. Les partis politiques et acteurs clés divergent sur les approches de gouvernance, les priorités nationales et les questions électorales. Ces différences freinent l’émergence d’un terrain d’entente.

Un climat de suspicion règne entre les acteurs politiques, chaque camp accusant l’autre de ne pas agir dans l’intérêt général. Cette absence de dialogue pousse les acteurs politiques à adopter des positions intransigeantes, rendant encore plus difficile toute tentative de réconciliation.

Quid des libertés ?

Ces dernières années, l’opposition a dénoncé des cas de non-respect des libertés fondamentales et des droits humains. Des organisations internationales, comme l’Onu, ont demandé la libération des opposants Joël Aïvo et Réckya Madougou, qualifiant leur détention d’arbitraire et contraire au droit international. En dehors de ces deux figures politiques, beaucoup d’autres cas suscitent des réactions et des critiques surtout en ce qui concerne les procédures judiciaires : l’arrestation il y a quelques jours de l’ancien directeur général de la police républicaine après des critiques à l’endroit du gouvernement, sans oublier le cas de Steve Amoussou enlevé par des individus reconnus coupable par la Criet au Bénin.

Les défis sécuritaires

Le Bénin est confronté à des défis sécuritaires croissants, notamment liés à l’insécurité dans certaines régions du nord Bénin. La population attend des mesures efficaces pour assurer la sécurité et la paix sur l’ensemble du territoire national. Ces dernières semaines encore, plusieurs hommes en uniforme ont trouvé la mort suite aux attaques terroristes dans la partie septentrionale du pays.

L’intégrité du territoire national est attaquée malgré tout ce que le gouvernement déploie comme efforts et moyens pour la garantir. Le discours du président Talon sera donc scruté attentivement, les citoyens espérant des réponses concrètes à ces préoccupations et une feuille de route claire pour les années à venir.

Les promesses non tenues

Depuis son discours sur l’état de la nation en décembre 2023, le président béninois a formulé plusieurs promesses, dont les Béninois souhaitent connaître le niveau d’avancement. En décembre 2023, le président Talon avait annoncé la construction de 32 lycées pour renforcer le système éducatif béninois. Cependant, un an plus tard, les Béninois se demandent où est ce qu’on en est clairement.

L’ambition clairement affichée par le gouvernement est d’inverser la tendance actuelle et d’aboutir à 70% d’apprenants dans l’enseignement technique et la formation professionnelle contre 30% dans l’enseignement secondaire général, d’ici 2030. Selon le dernier bilan fait par le ministre Kouaro Chabi sur le secteur de l’enseignement technique, les procédures en vue de la construction de ces infrastructures,  30 lycées techniques agricoles, 16 lycées techniques professionnels et 8 écoles de métiers, ont déjà commencé. Mais de façon concrète rien n’est encore visible. Pour l’heure, l’ambition affichée qui consiste à inverser la tendance actuelle et aboutir à 70% d’apprenants dans l’enseignement technique et la formation professionnelle contre 30% dans l’enseignement secondaire général, d’ici 2030, est compromise.

Le président avait également promis une amélioration significative de la stabilité de l’approvisionnement en électricité. Malgré des avancées, des difficultés persistent, et la promesse d’une fourniture énergétique stable reste partiellement accomplie. Depuis quelques semaines, on assiste à une série de coupure sauvage un peu partout dans le pays. Patrice Talon s’était engagé à ne pas solliciter un troisième mandat présidentiel, affirmant son attachement à la limitation des mandats. Toutefois, des observateurs expriment des doutes quant à la sincérité de cet engagement, rappelant des promesses antérieures non tenues, notamment celle de ne faire qu’un seul mandat.

Une réponse

  1. Avatar de Evivi Tahoun
    Evivi Tahoun

    C’est tout ce que vous vous avez tiré de ce brillant discours. Tout le peuple voit les grandes réalisations de Talon. Les étrangers l’apprécient à haute voix. Certains amis nigérians m’ont suggéré que le peuple béninois leur prête notre Président. Et vous, vous survolez tout ça en un paragraphe. C’est quoi cette attitude de tout peindre systématiquement en noir. Même si votre ligne éditoriale est pro opposition, votre discours sera plus crédible si vous prenez la peine de reconnaître à sa juste valeur, ce qui est bien fait. Nul N’est parfait, Talon aussi. Je souhaite bonne continuation à ce gouvernement. Deux autres présidents comme Talon, et on sera sur une autre planète.

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