Sonia Dahmani, avocate et chroniqueuse tunisienne reconnue pour son engagement contre le racisme et les discriminations, représente une voix courageuse dans le paysage médiatique tunisien. Cette juriste engagée, qui n’hésite jamais à dénoncer les injustices sociales, particulièrement envers les migrants subsahariens, se trouve aujourd’hui derrière les barreaux pour avoir osé questionner les pratiques discriminatoires de son pays.
La répression comme réponse au débat public
L’arrestation spectaculaire de Sonia Dahmani le 11 mai dernier illustre la dureté de la réponse étatique face aux voix dissidentes. Des policiers cagoulés en civil ont fait irruption dans la Maison de l’avocat à Tunis, où elle avait cherché refuge, pour l’interpeller devant les caméras de télévision. Cette mise en scène musclée témoigne d’une volonté d’intimidation envers ceux qui oseraient critiquer ouvertement les politiques gouvernementales.
Une cascade de poursuites judiciaires
La dernière condamnation en date, prononcée le 24 octobre, frappe lourdement la chroniqueuse : deux années de prison ferme pour avoir simplement ironisé sur la situation des migrants en Tunisie. Lors d’une émission sur la chaîne Carthage+, elle avait répondu avec sarcasme à un confrère vantant l’attractivité de la Tunisie pour les migrants subsahariens : « De quel pays extraordinaire parle-t-on ?« . Cette simple phrase lui vaut aujourd’hui d’être poursuivie pour « diffusion de fausses nouvelles » et « incitation à la haine » selon le tristement célèbre décret-loi 54, promulgué en 2022 par le président Kaïs Saïed. Cette condamnation s’ajoute à une première peine de huit mois prononcée en appel en septembre, tandis que trois autres affaires l’attendent encore devant les tribunaux.
L’instrumentalisation de la justice contre la liberté d’expression
Le cas de Sonia Dahmani révèle l’utilisation politique du système judiciaire tunisien. Le décret-loi 54, censé lutter contre la désinformation, sert désormais d’arme pour museler les voix critiques. Journalistes, avocats et opposants politiques subissent les foudres de ce texte aux contours volontairement flous, comme le dénonce le Syndicat national des journalistes tunisiens. La secrétaire générale d’Amnesty International, Agnès Callamard, n’hésite pas à qualifier la situation de « recul drastique » des droits humains en Tunisie, pointant une justice instrumentalisée par le pouvoir. Le combat de Sonia Dahmani, au-delà de sa personne, symbolise la résistance face à l’érosion des libertés fondamentales dans un pays où la parole critique devient un délit.
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