L’idée d’un tunnel reliant le Maroc à l’Espagne à travers le détroit de Gibraltar a longtemps été perçue comme une avancée majeure pour la connectivité entre l’Afrique et l’Europe. Toutefois, ce projet ambitieux, envisagé dès la fin des années 1980, fait face à de nombreux défis, notamment en matière de faisabilité et de financement. Après plusieurs décennies d’études et d’adaptations, des incertitudes persistent quant à sa réalisation effective.
Pour répondre aux interrogations techniques et économiques qui entourent cette infrastructure, une nouvelle phase d’analyse a été confiée à une entreprise spécialisée. L’entreprise publique espagnole Ineco a récemment lancé un appel d’offres pour une étude approfondie des conditions d’excavation. Cette initiative vise à examiner la faisabilité du percement des brèches, un segment particulièrement critique du tracé du tunnel sous le seuil de Camarinal. Il s’agit notamment d’évaluer les techniques de construction les plus adaptées et de revoir les méthodes préalablement envisagées. L’appel d’offres met également l’accent sur l’analyse des caractéristiques géologiques des flyschs, des formations rocheuses qui pourraient poser des difficultés importantes pour le forage.
À l’issue du processus de sélection, c’est l’entreprise Herrenknecht Ibérica, filiale espagnole du groupe allemand Herrenknecht, qui a été retenue pour mener ces études. Leader mondial dans le domaine du forage et de la construction de tunnels, cette société sera chargée d’examiner les conditions géotechniques et structurelles du tracé envisagé. Le coût de cette mission s’élève à 296 400 euros, un investissement nécessaire pour préciser les modalités de réalisation de l’ouvrage.
Si l’expertise technique constitue un enjeu central, la question du financement demeure un obstacle majeur. L’estimation initiale du coût du tunnel, établie il y a trente ans à environ 13 milliards d’euros, a considérablement augmenté. Aujourd’hui, certaines projections laissent entendre que la facture pourrait dépasser le double de ce montant. Selon Rafael García-Monge, secrétaire général de la Société espagnole d’études pour la communication fixe à travers le détroit de Gibraltar (SECEGSA), la dimension financière constitue l’un des principaux freins à l’avancement du projet.
Malgré ces difficultés, le projet a connu une relance en avril 2023, à la suite d’une réunion de haut niveau tenue à Rabat en février de la même année. Initialement imaginé sous la forme d’un pont, puis réorienté en 1995 vers un tunnel ferroviaire de 38,7 kilomètres, dont 27,7 kilomètres sous-marins, il vise à faciliter la circulation des passagers et des marchandises entre les deux rives du détroit. Son ambition reste inchangée : renforcer les échanges économiques et humains entre l’Espagne et le Maroc, tout en consolidant un axe stratégique entre l’Afrique et l’Europe.
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