Les relations diplomatiques entre l’Algérie et le Maroc sont marquées depuis plusieurs décennies par des tensions persistantes, liées à des divergences profondes sur des questions géopolitiques et territoriales, notamment autour du Sahara occidental. La rupture des relations diplomatiques en 2021, suivie de la fermeture de l’espace aérien algérien aux avions marocains, a symbolisé un point de non-retour dans cette rivalité. Cette crise s’est aussi traduite par une paralysie des échanges bilatéraux et un durcissement des discours de part et d’autre. Toutefois, certains mécanismes régionaux et décisions d’envergure peuvent parfois forcer les lignes diplomatiques les plus figées à bouger, même contre la volonté initiale des États.
Le récent partenariat signé entre la Confédération africaine de football (CAF) et Royal Air Maroc (RAM) illustre cette dynamique. En devenant le transporteur officiel de toutes les compétitions organisées par la CAF, RAM se voit garantir un accès aérien à l’ensemble des 54 pays membres. Ce qui signifie concrètement que l’Algérie, malgré la fermeture de son ciel au Maroc depuis septembre 2021, est tenue de permettre à la compagnie marocaine de survoler son territoire et d’y opérer des vols lors des événements sportifs de la CAF.
Le pays ne peut ignorer les implications d’un refus : exclusion potentielle de ses équipes nationales des tournois de la Confédération, pertes économiques liées aux droits de retransmission ou encore isolement diplomatique sur la scène sportive continentale. En ce sens, la pression dépasse le cadre purement sportif. Le football devient ici un levier diplomatique, incitant à une forme de coopération de circonstance.
Le président de la CAF, Patrice Motsepe, a salué cet accord comme un jalon décisif pour l’intégration africaine par le sport. Il a notamment mis en avant les ambitions du Maroc en matière d’infrastructures sportives, soulignant la capacité future du stade Hassan II de Casablanca à accueillir plus de 100 000 spectateurs. Selon lui, la prochaine Coupe d’Afrique des Nations, que le Maroc abritera, devrait battre des records de participation et d’organisation.
Dans cette perspective, RAM a déjà annoncé des dispositions pratiques pour faciliter les déplacements de supporters africains vers le Maroc : tarifs préférentiels, vols directs depuis les grandes capitales du continent, et services adaptés aux diasporas africaines établies hors d’Afrique. Pour le président de la compagnie, Abdelhamid Addou, l’accord dépasse les simples considérations commerciales. Il s’inscrit dans une démarche politique soutenue par le roi Mohammed VI visant à renforcer les liens entre les pays africains à travers la mobilité et la coopération.
L’Algérie, qui n’a pas été consultée dans la phase préparatoire de cette alliance, doit désormais s’y conformer, à contre-cœur. Un ajustement stratégique qui ne traduit pas un changement dans la posture politique d’Alger vis-à-vis de Rabat, mais qui montre que certaines logiques supranationales, comme celle du sport de haut niveau, peuvent temporairement imposer des concessions, même entre deux nations en froid.
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