Depuis son retour à la Maison-Blanche en janvier 2025, Donald Trump a repris le ton offensif qui avait marqué son premier mandat. Les annonces de hausses tarifaires unilatérales sur des produits stratégiques, y compris ceux en provenance d’alliés traditionnels, n’ont pas tardé à faire réagir. L’Australie, pourtant pilier de l’AUKUS et fidèle partenaire militaire de Washington, n’a pas été épargnée. Cette politique commerciale, perçue comme unilatérale et imprévisible, a ravivé les interrogations sur la fiabilité à long terme du soutien américain. Dans ce climat de méfiance croissante, certains à Canberra envisagent désormais de diversifier les partenariats de défense, y compris dans le domaine ultrasensible de l’aviation de combat.
Canberra explore d’autres horizons technologiques
Lors du dernier salon aéronautique organisé à Avalon, près de Melbourne, les autorités australiennes ont étudié de près une initiative conjointe portée par le Royaume-Uni, l’Italie et le Japon. Baptisé GCAP (Global Combat Air Programme), ce projet vise à concevoir une nouvelle génération d’avions de chasse intégrant des innovations avancées. Les responsables de la défense australienne se sont montrés attentifs aux démonstrations techniques qui mettaient en avant une interface de pilotage enrichie par la réalité augmentée, des systèmes de combat en essaim coordonnés par intelligence artificielle, et des armements énergétiques aux performances inédites.
Ce programme soulève un intérêt particulier du fait qu’il pourrait représenter une alternative crédible aux équipements américains, omniprésents jusqu’ici dans l’arsenal australien. L’idée d’équiper la Royal Australian Air Force avec plusieurs centaines d’appareils issus du GCAP d’ici la prochaine décennie est désormais sur la table. Cette perspective reflète un glissement discret mais significatif dans les choix stratégiques de Canberra.
Redéfinir les équilibres industriels et militaires
Le GCAP va bien au-delà de la livraison d’un nouvel avion : il repose sur une coopération industrielle poussée entre partenaires égaux, avec des retombées technologiques partagées. En s’ouvrant à ce type de projet, l’Australie pourrait accéder à un système plus souple, moins verrouillé que celui offert par les programmes américains. Le potentiel de participation à certaines étapes de fabrication ou de développement renforce aussi l’attrait de ce partenariat alternatif.
L’adoption de ce programme représenterait une rupture avec la dépendance structurelle à l’égard des États-Unis dans le secteur de la défense aérienne. Cette évolution pourrait susciter des répercussions sur les marchés de l’armement, en redéfinissant les alliances de production et en redistribuant les cartes dans les zones d’influence technologique. Un engagement australien au sein du GCAP serait scruté de près par d’autres puissances moyennes cherchant, elles aussi, à desserrer l’étreinte des standards américains.
Une stratégie de précaution dans un environnement incertain
Si les discussions restent exploratoires, elles traduisent un état d’esprit de plus en plus répandu parmi les décideurs australiens : sécuriser l’avenir en diversifiant les sources d’approvisionnement stratégique. Les secousses provoquées par la politique commerciale des États-Unis ont souligné la vulnérabilité de certaines dépendances, même au sein d’alliances anciennes. L’intérêt porté au GCAP reflète une volonté d’élargir les options opérationnelles, mais aussi diplomatiques.
Choisir un avion, c’est aussi choisir un cadre de coopération, un rythme de développement, un niveau d’autonomie. En se tournant vers des partenaires européens et asiatiques, l’Australie envoie un message : elle reste ancrée dans les alliances occidentales, mais entend peser davantage dans les décisions qui engagent sa sécurité. Le combat se joue autant dans les airs qu’autour des tables de négociation.



