À chaque fois que la question de Taïwan revient dans les déclarations des grandes puissances, une onde de choc diplomatique traverse Pékin. Pour la Chine, l’île n’est ni un partenaire potentiel ni un voisin indépendant : c’est une région insoumise, qui doit impérativement revenir sous l’autorité du continent. Et toute tentative de contestation, même symbolique, est interprétée comme une provocation directe. Lorsqu’un pays occidental ose mettre en doute cette vision, même par allusion, la riposte est immédiate, parfois brutale. Emmanuel Macron vient d’en faire l’expérience, après des propos qui ont provoqué une vive colère de la part du régime chinois.
Une déclaration présidentielle qui ravive les tensions
Ce vendredi 30 mai, le président français a comparé l’éventualité d’une invasion chinoise de Taïwan à l’agression militaire russe en Ukraine. Une sortie qui n’a pas laissé place à l’ambiguïté et que Pékin a très mal digérée. Comparer la situation taïwanaise à celle de l’Ukraine revient, aux yeux des autorités chinoises, à qualifier la Chine de puissance expansionniste, prête à imposer sa volonté par la force contre un territoire qu’elle considère comme sien.
La réaction ne s’est pas fait attendre : la diplomatie chinoise a dénoncé une ingérence inacceptable et a rappelé que la question de Taïwan relevait exclusivement de la souveraineté nationale. Pour Pékin, aucun parallèle n’est acceptable, car il s’agit d’un contentieux intérieur, non d’un conflit international. Or, en établissant une analogie avec un théâtre de guerre impliquant toute l’Europe, Macron donne à Taïwan un statut politique qui dépasse les limites que la Chine est prête à tolérer.
Un terrain diplomatique de plus en plus glissant
Les déclarations d’Emmanuel Macron ne sont pas isolées. Elles s’inscrivent dans un climat de crispation grandissante entre la Chine et plusieurs pays occidentaux sur la question taïwanaise. Ces derniers mois, Pékin a intensifié ses démonstrations de force autour de l’île : vols militaires, exercices navals, cyberattaques. Face à cela, les États-Unis, mais aussi certains pays européens, ont renforcé leurs contacts avec Taipei, provoquant une série de mises en garde chinoises.
En évoquant ouvertement le scénario d’une agression chinoise, le président français rompt avec la prudence diplomatique traditionnelle de la France sur le dossier taïwanais. Il envoie ainsi un message implicite de soutien à Taïwan, tout en s’alignant sur les postures plus offensives de ses alliés. Mais ce positionnement pourrait lui coûter cher : la Chine a déjà prouvé par le passé qu’elle n’hésite pas à user de mesures économiques, voire de gel diplomatique, face aux pays qui franchissent ses lignes rouges.
Macron face à une stratégie chinoise de dissuasion
La virulence de la réaction chinoise n’est pas anodine. Elle s’inscrit dans une stratégie plus large de dissuasion verbale : il s’agit d’alerter, de contenir et, si nécessaire, de punir les pays qui accorderaient à Taïwan une légitimité politique ou stratégique. En s’attaquant frontalement à la France, Pékin envoie un signal à l’ensemble de l’Europe : tout soutien, même indirect, ne sera pas sans conséquence.
Le choix des mots d’Emmanuel Macron, comparant Taïwan à l’Ukraine, dépasse donc le simple registre de l’opinion. Il réactive une ligne de fracture déjà bien entamée entre deux visions du monde : l’une, fondée sur la souveraineté des peuples et le droit à l’autodétermination ; l’autre, centrée sur l’unité nationale telle que la Chine la définit pour elle-même. Dans ce duel narratif, chaque déclaration pèse lourd.
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