Le gouvernement sénégalais a annoncé un effort financier d’envergure pour soutenir la campagne agricole 2025, avec une enveloppe de 130 milliards FCFA. Ce budget, réparti entre l’achat d’engrais (63 milliards), de semences certifiées (42 milliards), et l’amélioration des infrastructures et de la commercialisation, reflète une volonté d’accélérer la transformation du secteur rural. Dans le département de Mbacké, les autorités ont confirmé la réception de 1 472 tonnes de semences d’arachide, une livraison jugée conforme aux prévisions. Mais sur le front des engrais, les préparatifs stagnent : bien que les plannings soient prêts, la distribution n’a toujours pas démarré, soulevant des interrogations récurrentes sur la synchronisation entre décisions politiques et actions concrètes.
Les séquelles des précédentes campagnes
Les souvenirs de la campagne 2024 restent encore vifs. Malgré un financement généreux, les résultats sur le terrain avaient été ternis par des difficultés logistiques majeures. Les intrants, souvent livrés en retard ou de qualité discutable, n’avaient pas permis d’améliorer les rendements ni de garantir une meilleure rentabilité pour les exploitants. De nombreux agriculteurs avaient également dénoncé un ciblage mal calibré des bénéficiaires, créant des inégalités dans l’accès aux subventions. Ces échecs répétés ont fragilisé la confiance entre les acteurs du monde rural et les institutions chargées de les accompagner. Aujourd’hui, la réussite de la campagne 2025 repose donc autant sur les montants engagés que sur la capacité à corriger ces erreurs structurelles.
Une course contre la montre
Alors que la saison des pluies s’installe progressivement, chaque semaine de retard dans la livraison des engrais peut compromettre les semis, particulièrement pour les cultures à cycle court. Dans ce contexte, le temps devient un facteur aussi stratégique que les moyens financiers. Pour éviter de retomber dans les travers passés, plusieurs voix dans le monde agricole appellent à une décentralisation plus efficace des mécanismes de distribution, un contrôle rigoureux de la qualité des produits, et une traçabilité claire des bénéficiaires. Si la volonté politique semble au rendez-vous, seule une exécution fluide et rigoureuse pourra transformer cette ambition budgétaire en récoltes fructueuses. Le compte à rebours est lancé.
Vers un changement d’approche structurelle ?
Certains acteurs plaident désormais pour une révision du modèle de subvention, afin de passer d’une logique de distribution massive à une stratégie orientée vers la performance agricole. Cela impliquerait de mieux identifier les zones à fort potentiel, de diversifier les cultures appuyées et d’introduire des indicateurs d’impact économique au-delà de la simple quantité d’intrants livrés. Le suivi de terrain et le rôle des services de développement rural deviennent alors essentiels pour accompagner les agriculteurs dans l’adoption de bonnes pratiques.
Face aux enjeux de transparence, la société civile commence aussi à se mobiliser. Dans certaines régions, des comités locaux d’agriculteurs s’organisent pour vérifier les livraisons, alerter sur les anomalies et réclamer une gestion participative des ressources. Ce regain d’attention publique sur la campagne agricole témoigne d’un intérêt croissant pour un secteur longtemps relégué aux marges du débat national, mais qui reste crucial pour la sécurité alimentaire, l’emploi et la stabilité sociale du Sénégal.


