Afrique : les USA ciblent cette région pour étendre leur présence

Donald Trump a longtemps relégué l’Afrique au second plan de la diplomatie américaine. Il n’y a jamais effectué de déplacement officiel et son administration a réduit de manière significative les budgets alloués à la coopération et à l’aide internationale. Plusieurs postes clés liés à l’Afrique sont restés vacants, traduisant une absence manifeste d’intérêt stratégique. Ses déclarations, parfois ouvertement méprisantes, ont contribué à refroidir davantage les relations avec plusieurs pays africains. Mais alors que cette approche semblait ancrée dans une certaine indifférence, les États-Unis, ces derniers mois, modifient leur posture et recentrent leur attention sur le cœur du continent. L’Afrique centrale, longtemps ignorée dans les calculs géopolitiques de Washington, devient aujourd’hui une plateforme de choix pour une nouvelle dynamique économique portée par des investissements ciblés.

Des investissements qui redessinent l’espace régional

Plusieurs engagements financiers ont été annoncés en l’espace de quelques jours, totalisant près de 2,5 milliards de dollars. Ils ne se résument pas à des effets d’annonce : des projets concrets prennent forme, montrant un basculement vers une stratégie d’ancrage économique. Ainsi, une entreprise américaine, Anzana Electric Group, a rejoint un consortium énergétique impliqué dans la mise en place d’une infrastructure hydraulique transfrontalière entre le Rwanda et la République démocratique du Congo. Avec une participation minoritaire mais stratégique, le groupe s’implique dans un projet énergétique de grande ampleur estimé à plus de 700 millions de dollars.

En parallèle, un autre acteur américain, Hydro-Link, a conclu un accord de partenariat de 1,5 milliard de dollars avec les autorités angolaises. L’ambition affichée est de développer une liaison électrique de très longue distance, permettant de transférer l’énergie produite par les barrages de l’Angola vers les installations minières situées à l’est, en RDC. Ce projet donne naissance à une artère énergétique traversant une portion majeure du continent, avec des implications industrielles et logistiques considérables.

Une stratégie économique centrée sur les connexions critiques

En intégrant des secteurs clés comme l’énergie et l’extraction minière, les États-Unis cherchent à établir des circuits fonctionnels contrôlés par leurs entreprises. Cette approche se démarque des pratiques du passé, souvent basées sur des programmes de développement ou des aides bilatérales. Ici, il s’agit d’occuper une place active dans la chaîne de valeur, de la production d’électricité jusqu’à son acheminement vers les pôles industriels.

Ce positionnement permet aussi de réduire la marge de manœuvre de concurrents déjà très présents, en particulier la Chine. En construisant une infrastructure qui relie l’ouest et l’est africain, Washington contribue à transformer une zone auparavant morcelée en un corridor économique structuré autour d’acteurs privés américains. La RDC, dotée de ressources stratégiques comme le cobalt, devient un nœud central dans ce nouveau jeu d’interconnexions, tandis que l’Angola fournit les capacités énergétiques nécessaires à son exploitation à grande échelle.

Un tournant pragmatique aux effets ambivalents

Ce regain d’intérêt pour l’Afrique centrale traduit une volonté de peser davantage dans les équilibres économiques du continent. Loin d’une simple présence diplomatique, les États-Unis choisissent d’agir directement sur les leviers de puissance : contrôle des flux d’énergie, structuration des corridors de production et influence sur les choix technologiques. Cette montée en puissance économique pourrait accélérer le développement d’infrastructures indispensables et combler certains déficits chroniques, notamment en matière d’énergie.

Mais cette dynamique soulève aussi des interrogations. Qui bénéficiera réellement de ces investissements ? Les populations locales verront-elles une amélioration tangible de leurs conditions de vie ou assisteront-elles à une nouvelle phase d’exploitation dirigée depuis l’extérieur ? Les États concernés auront-ils suffisamment de poids pour orienter ces projets dans le sens de leur souveraineté économique ? Ce que l’on observe, en tout cas, c’est un retour américain qui passe par les entreprises, par les réseaux, et par une redéfinition silencieuse mais déterminée de leur position sur le continent.

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