Blanchiment d’argent au Maghreb : un pays muscle sa riposte

Alors que le blanchiment d’argent demeure un défi majeur pour les États confrontés à des circuits financiers opaques et à des réseaux criminels de plus en plus sophistiqués, l’Algérie semble vouloir renforcer de manière décisive son arsenal juridique et institutionnel. Deux projets de loi adoptés par le Conseil des ministres marquent une inflexion stratégique dans la volonté du pays de se doter d’un système de prévention et de contrôle à la hauteur des enjeux actuels.

Un cadre renforcé pour affronter les crimes financiers

Le projet de loi relatif à la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme vient actualiser le texte fondateur de 2005. Plus qu’un simple toilettage législatif, cette révision introduit des ajustements permettant de coller aux réalités mouvantes des pratiques illicites. Elle tient compte des recommandations du Groupe d’action financière (GAFI), une référence mondiale en matière de normes contre la criminalité financière. Les modifications apportées traduisent aussi la volonté de mieux encadrer les flux financiers suspects et d’augmenter l’efficacité des mécanismes de détection et de répression.

Il ne s’agit pas uniquement d’améliorer les instruments nationaux : cette réforme vise également à restaurer la crédibilité de l’Algérie sur la scène internationale, notamment en levant les réserves encore formulées par le GAFI. Être retiré de la « liste grise » de cet organisme est un objectif que les autorités souhaitent atteindre dans les meilleurs délais, et ce texte constitue l’un des leviers essentiels pour y parvenir.

Protéger les données pour mieux prévenir

La lutte contre les délits financiers ne peut s’envisager sans une régulation rigoureuse des données personnelles. C’est dans cette logique que le second projet de loi, examiné et adopté au même moment, modifie la législation de 2018 sur la protection des données à caractère personnel. À travers ce texte, l’Algérie cherche à garantir que les traitements de données, qu’ils soient opérés par des institutions publiques ou privées, ne puissent servir de relais à des opérations illicites, qu’il s’agisse de fraude fiscale, de blanchiment ou de financement occulte.

La sécurisation des données devient ainsi une condition nécessaire à la transparence et à la traçabilité des mouvements financiers. Cette réforme prévoit un encadrement plus strict des accès aux données sensibles, ainsi qu’une harmonisation avec les standards internationaux, facilitant ainsi la coopération transfrontalière. Le pays se donne ainsi les moyens de croiser les sources d’information sans compromettre les libertés individuelles.

Des signaux envoyés aux partenaires internationaux

En approuvant ces deux textes lors de la même séance du Conseil des ministres, le gouvernement algérien envoie un signal fort : il ne s’agit plus seulement de réagir aux critiques, mais d’anticiper les exigences d’un environnement financier de plus en plus interconnecté et réglementé. Ces nouvelles lois sont aussi le reflet d’une volonté politique d’aller au-delà des déclarations d’intention.

L’Algérie ambitionne ainsi de ne plus être perçue comme un maillon faible dans la chaîne de la lutte contre la criminalité financière. Pour cela, elle entend prouver sa capacité à adopter des normes robustes, à mettre en œuvre des mécanismes de surveillance efficaces et à assurer une justice capable de sanctionner les infractions avec rigueur.

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