Brésil : la tempête judiciaire Bolsonaro enfle

L’étau judiciaire se resserre autour de Jair Bolsonaro. L’ancien président du Brésil, déjà privé de ses droits politiques jusqu’en 2030, fait désormais face à une requête formelle de condamnation pour tentative de renversement de l’ordre démocratique. Le parquet a franchi un nouveau seuil ce mardi 15 juillet, en sollicitant une lourde peine contre l’ex-chef de l’État, qu’il accuse d’avoir orchestré une entreprise coordonnée pour rester au pouvoir, indépendamment de l’issue des élections de 2022. Une affaire à la fois judiciaire, politique et diplomatique, qui cristallise les tensions entre le Brésil et les États-Unis.

Une stratégie assumée

Aux yeux des procureurs brésiliens, les faits ne laissent guère de place à l’ambiguïté : Jair Bolsonaro aurait dirigé un groupe structuré pour bloquer l’investiture de son successeur, Luiz Inacio Lula da Silva. En mobilisant son entourage proche, dont plusieurs anciens collaborateurs sont également visés, il aurait planifié des actions pour empêcher l’alternance démocratique, y compris par des moyens violents ou inconstitutionnels.

Le parquet le qualifie de figure centrale d’une organisation ayant cherché à contourner le verdict des urnes. Cette accusation s’accompagne d’une batterie de chefs d’inculpation : complot contre l’État de droit, constitution d’un groupe criminel armé, atteinte aux biens publics. En cas de condamnation, la peine pourrait aller jusqu’à 40 ans de réclusion.

Jair Bolsonaro, lui, ne reconnaît aucun des faits. Il évoque une tentative légale, selon lui, d’explorer des mécanismes constitutionnels pour contester les résultats électoraux, tout en dénonçant un acharnement judiciaire motivé par des raisons politiques. Il affirme que son procès vise avant tout à l’écarter de la scène politique pour de bon.

Un procès à forts relents diplomatiques

Le dossier dépasse les frontières du Brésil. À Washington, le procès de Jair Bolsonaro agace profondément les cercles conservateurs. Donald Trump, soutien de la première heure, a dénoncé une « chasse aux sorcières » et annoncé en représailles une taxe de 50 % sur certaines importations brésiliennes, à compter du 1er août. Dans le même temps, Alexandre de Moraes, juge de la Cour suprême chargé de l’affaire, fait l’objet de critiques répétées de la part d’élus américains proches des républicains. Le magistrat est notamment dans le viseur pour ses décisions de restriction à l’encontre de certaines plateformes sociales américaines accusées d’avoir relayé de fausses informations électorales.

Le climat diplomatique s’envenime encore davantage avec le rôle actif d’Eduardo Bolsonaro, député et fils de l’ancien président, désormais installé aux États-Unis. Très engagé auprès de figures de l’aile dure républicaine, il tente d’influencer la politique étrangère américaine à l’égard du Brésil, appelant à un durcissement des positions contre les institutions brésiliennes.

Bolsonaro face à une recomposition de l’espace politique

La trajectoire descendante de Jair Bolsonaro contraste avec la stratégie de son camp, qui cherche à maintenir une forme d’influence via des relais à l’étranger et une rhétorique de victimisation interne. Malgré son inéligibilité jusqu’en 2030, l’ancien président continue de fédérer une base militante active, notamment sur les réseaux sociaux, où il joue la carte du patriote trahi.

Sa défense repose sur l’idée d’un complot judiciaire visant à neutraliser toute alternative conservatrice crédible à Lula. Mais dans un contexte où les institutions démocratiques brésiliennes entendent affirmer leur solidité, cette posture pourrait se heurter à la lassitude d’une opinion publique lassée des tensions permanentes.

Laisser un commentaire