Rivalités au Maghreb : ce pays devient le centre des intérêts

La défense a toujours été l’un des piliers des relations bilatérales dans la région sahélo-maghrébine. Dans ce jeu d’alliances et de rapprochements stratégiques, la Mauritanie se retrouve désormais au cœur d’un duel silencieux entre les deux géants du Maghreb, l’Algérie et le Maroc. Terrain d’opérations et d’influence, ce pays de transition entre le monde arabe et l’Afrique subsaharienne attire de plus en plus les regards militaires de ses voisins du nord.

Nouakchott au centre d’une attention convoitée

En l’espace de quelques semaines, la capitale mauritanienne a vu se succéder deux délégations militaires de haut niveau. Après les Marocains, ce sont les Algériens qui ont foulé le sol de Nouakchott. Chaque camp vient défendre ses intérêts, affiner ses partenariats et consolider ses positions dans un contexte régional tendu où la coopération sécuritaire prend une dimension stratégique.

Les Forces armées royales marocaines, pionnières dans ce ballet militaire, ont récemment déployé une équipe du Deuxième Bureau – leur service de renseignement – pour renforcer les liens avec la division mauritanienne de la sécurité militaire. L’initiative, pilotée par le colonel Idriss Hadd Zine, visait à établir des mécanismes de coordination, notamment dans le renseignement opérationnel, secteur névralgique dans la lutte contre les menaces transfrontalières.

Face à cette offensive diplomatico-militaire du Maroc, l’Algérie n’a pas tardé à envoyer sa propre délégation, conduite par des officiers supérieurs. Cette mission de trois jours a permis à ses membres de s’immerger dans les structures de formation mauritaniennes, notamment à l’École nationale de commandement et d’état-major. Cette visite intervient dans le prolongement des accords signés au printemps, scellant une coopération sur les questions de défense et sur le traitement confidentiel de certaines données.

Coopérations sécuritaires : le jeu des équilibres

La Mauritanie, forte de sa position géographique charnière, devient une pièce stratégique dans les projections sécuritaires de ses voisins. À mesure que les menaces se déplacent – trafics, instabilité au Sahel, infiltration terroriste – les puissances régionales multiplient les canaux d’influence pour s’assurer une présence dans ce pays considéré comme un verrou de stabilité.

L’Algérie, traditionnellement très active au Sahel, voit dans la Mauritanie un partenaire naturel pour ses ambitions sécuritaires au sud. Le renforcement des liens formalisé à Alger en avril dernier avec la signature de deux accords, illustre cette volonté de verrouiller ses alliances dans la zone. En parallèle, Rabat investit également dans cette relation stratégique, misant sur une coopération technique plus ciblée, notamment dans le domaine du renseignement militaire et de la formation.

Chacun, à sa manière, tente donc de gagner du terrain. Mais dans cet échiquier régional, Nouakchott semble bien décidé à jouer sa propre partition en tirant parti de cette dualité pour maximiser ses intérêts.

Mauritanie : de l’ombre à la lumière

Longtemps considérée comme un acteur discret dans les dynamiques maghrébines, la Mauritanie s’impose progressivement comme un carrefour stratégique. Sa stabilité institutionnelle, sa posture de neutralité affichée et son engagement croissant dans les enjeux sécuritaires régionaux en font une destination prioritaire pour les initiatives de coopération militaire.

Ce regain d’intérêt n’est pas anodin. Il illustre une redistribution subtile des cartes dans la région, où les puissances militaires cherchent à sécuriser leurs arrières tout en étendant leur réseau de partenaires fiables. La Mauritanie devient alors bien plus qu’un simple voisin : elle incarne une plateforme de projection pour les ambitions géopolitiques de l’Algérie et du Maroc.

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