L’activation de la Haute Cour de Justice dans plusieurs procédures contre d’anciens ministres du régime Macky Sall suscite une réaction notable sur le plan juridique. Pour la première fois depuis l’arrivée au pouvoir du président Bassirou Diomaye Faye, cette juridiction spéciale traite des dossiers relatifs à l’enrichissement illicite et au détournement de fonds publics impliquant cinq anciens ministres. Un fait inédit qui attire désormais l’attention d’acteurs internationaux du droit.
C’est dans ce contexte que le cabinet Vey & Associés, basé à Paris et Genève, a décidé d’apporter un appui à ses confrères sénégalais. Lors d’un point de presse tenu à Dakar, les avocats ont annoncé qu’ils allaient étudier en profondeur une quinzaine de procédures judiciaires en cours, jugées préoccupantes. Certaines d’entre elles visent des responsables politiques, tandis que d’autres concernent des journalistes poursuivis dans le cadre de l’exercice de leur métier.
Dérives présumées et préoccupations juridiques
Me Antoine Vey, figure connue des cercles du droit international, a déclaré vouloir examiner les conditions de détention et la légalité des poursuites. Pour lui, plusieurs cas présenteraient des caractéristiques de détentions arbitraires et poseraient des questions sur l’impartialité du système judiciaire. Aux côtés de Me Oumar Youm et Me Amadou Sall, il a mis en garde contre « une succession de mises en cause judiciaires de personnalités politiques dans un contexte qui pourrait laisser craindre une instrumentalisation de la justice ».
Le cœur de leur préoccupation concerne la Haute Cour de Justice, dont le rôle exclusif dans le traitement des affaires d’anciens ministres soulève des critiques, notamment sur la composition et l’indépendance des magistrats y siégeant. Les avocats internationaux ont entamé une mission d’observation sur le terrain, afin d’analyser les procédures en cours et de recueillir des éléments permettant de mobiliser les instruments du droit international en cas de violations avérées.
Une stratégie tournée vers les leviers internationaux
L’objectif de l’équipe est de constituer des dossiers solides qui pourront être défendus devant des juridictions et instances internationales, en cas d’échec des recours internes. Cela inclut notamment les comités des Nations Unies, les cours régionales de justice, ou encore les tribunaux arbitraux spécialisés dans les droits humains.
Cette offensive juridique s’ajoute à un climat politique tendu, dans lequel l’État sénégalais cherche à faire toute la lumière sur les gestions passées, sans pour autant échapper à des accusations de règlement de comptes. Si la justice sénégalaise reste souveraine, l’intervention de figures du barreau international traduit une volonté de déplacer le débat vers des scènes où le droit ne peut pas être interprété uniquement à travers le prisme local.
Le suivi des prochaines audiences à la Haute Cour de Justice, et les éventuels recours que le cabinet Vey décidera de porter hors des frontières, donneront une indication claire sur le niveau de confrontation juridique à venir entre anciens dignitaires du régime sortant et les institutions de la République. Une dynamique nouvelle dans l’histoire des relations entre pouvoir politique, justice nationale et droit international.



