Fondé le 4 janvier 2014 par un petit groupe de fonctionnaires animés par une volonté de rupture, Pastef – Les Patriotes a connu une ascension fulgurante sur l’échiquier politique sénégalais. Porté par la figure d’Ousmane Sonko, puis par celle de Bassirou Diomaye Faye devenu président de la République en mars 2024, le parti se prépare aujourd’hui à franchir une nouvelle étape institutionnelle : l’organisation de son tout premier congrès national. Une échéance inédite dans l’histoire de cette formation qui, jusqu’à présent, avait construit sa force sur la mobilisation populaire et l’activisme politique, plutôt que sur des processus internes codifiés.
Le secrétaire d’État au Développement des PME/PMI, Ibrahima Thiam, a confirmé cette échéance ce mercredi, évoquant une tenue prévue « d’ici la fin de l’année ». À l’écouter, le parti travaille depuis plus de six mois à un profond processus de réorganisation : renouvellement du bureau politique, relance des secrétariats nationaux, nominations stratégiques… Autant de chantiers qui traduisent une volonté de structuration durable, à un moment où l’accès au pouvoir exige de nouvelles méthodes et une discipline de parti plus formalisée.
Vers un nouveau mode de gouvernance interne
Le futur congrès ne se limitera pas à une simple vitrine médiatique. Il devrait sceller un changement de méthode dans la gestion interne de Pastef. L’installation du Conseil national, instance décisionnelle appelée à valider les orientations politiques, est attendue très prochainement. Ce conseil devrait incarner une forme de collégialité dans la prise de décision, à l’heure où le parti doit composer avec un double leadership : celui du président de la République Bassirou Diomaye Faye, aujourd’hui en retrait du parti, et celui d’Ousmane Sonko, Premier ministre et toujours président de Pastef.
Ce nouvel équilibre pourrait permettre de redéfinir les responsabilités et les lignes d’autorité au sein du mouvement. La séparation entre l’exécutif étatique et la direction partisane devient un enjeu central pour éviter toute confusion de rôles et garantir l’autonomie de fonctionnement du parti. Le congrès, en tant qu’instance suprême, devra probablement statuer sur ces questions, tout en clarifiant le rôle de ses principales figures historiques dans le paysage politique de demain.
L’agenda politique de Sonko, entre attentes et stratégies
Si Ousmane Sonko n’a pas encore dévoilé les contours précis de son calendrier politique, Ibrahima Thiam a confirmé que des tournées et initiatives politiques étaient en préparation. Ce retour progressif sur le terrain, après une période d’installation au sommet de l’État, pourrait marquer une nouvelle phase d’expansion de Pastef, notamment en direction des bases régionales et des jeunesses militantes.
Le congrès, en cristallisant ces dynamiques, pourrait aussi servir de rampe de lancement pour un nouveau projet politique à moyen terme. Entre 2014 et 2024, Pastef a incarné l’opposition contestataire et radicale. Le défi des dix prochaines années sera de traduire cette énergie en gouvernance, en cohérence et en enracinement institutionnel. La tenue d’un congrès national, dans ce cadre, est bien plus qu’un rituel de parti : c’est le passage de l’oralité militante à l’organisation pérenne, du combat de rue au compromis politique.
Face à des adversaires plus anciens mais parfois en perte de repères, cette mue pourrait faire de Pastef une force politique durable, capable d’allier engagement de terrain et culture de gouvernance. Encore faut-il que ce premier congrès pose les fondations solides d’un parti qui a jusqu’ici souvent préféré l’élan aux structures.



