Sénégal : Le premier ministre fixe le cap d’une transformation sous haute pression

Le Premier ministre a réuni l’ensemble de son gouvernement pour une réunion stratégique d’une rare intensité, centrée sur le pilotage du programme Sénégal 2050. En toile de fond, une situation économique jugée critique, marquée par la révélation de dettes dissimulées qui s’élèvent à plus de 7 milliards de dollars. Le taux d’endettement, désormais estimé à 119 % du PIB, impose un rythme de redressement inédit pour éviter l’embolie financière. Dans ce contexte tendu, la réunion a pris des allures de séminaire de crise, mêlant félicitations pour les efforts récents — comme le vote rapide de la loi de finances rectificative — et instructions strictes pour une réorganisation complète de l’action publique.

La nouvelle méthode annoncée repose sur un principe de responsabilité directe. Chaque projet devra désormais être associé à un calendrier, des objectifs quantifiables et des rapports trimestriels obligatoires. Le Premier ministre a averti ses collaborateurs : chaque retard, chaque inertie administrative aura désormais un visage, une hiérarchie, et des conséquences. Les promesses de l’État ne pourront plus se diluer dans les lenteurs bureaucratiques.

Huit chantiers pour réarmer l’action publique

Le plan présenté repose sur huit priorités clairement définies. La première cible les lourdeurs administratives, souvent responsables du gel de projets structurants. Une refonte des circuits de traitement du courrier sera engagée dès les trois prochains mois, accompagnée de la généralisation du suivi digitalisé. Le deuxième pilier porte sur l’accélération systématique des projets déjà financés. La Primature assurera un contrôle rapproché pour empêcher toute dispersion ou report abusif.

Le troisième point concerne le lancement immédiat du projet MUR, inscrit dans la loi de finances rectificative. Toutes les démarches préparatoires devront être finalisées dans un délai de 30 jours. Le quatrième axe prévoit la création d’une task force composée d’organismes tels que le Box, l’APIX, le FONSIS ou la CDC. Sa mission : finaliser la structuration des projets en attente, avec le concours de cabinets privés, sous la coordination de la DGPPE.

Autre point critique, la gouvernance des projets interministériels. Pour éviter les chevauchements ou conflits de compétences, tous les dossiers impliquant plusieurs ministères seront désormais hébergés à la Primature jusqu’à la mise en place d’un cadre plus stable. En parallèle, les engagements internationaux et présidentiels feront l’objet d’un suivi renforcé. Des feuilles de route actualisées, cohérentes avec les grandes orientations nationales, sont attendues de chaque ministère avant la fin juillet, avec des livrables détaillés à remettre avant le 15 août. Le Premier ministre a également souligné la nécessité de préparer rigoureusement les Jeux olympiques de la jeunesse 2026, considérés comme un rendez-vous stratégique. Enfin, un plan de redressement national sera présenté d’ici quelques semaines, assorti d’un programme de communication massif pour en assurer la diffusion et l’adhésion populaire.

Une feuille de route à la fois technique et politique

Derrière ce discours méthodique, c’est un changement de ton qui se dessine. Le gouvernement souhaite faire de l’agenda 2050 un levier d’action immédiate, capable d’amortir les tensions budgétaires tout en relançant la dynamique de transformation. Dans un pays où la défiance vis-à-vis des promesses officielles reste forte, le Premier ministre semble vouloir rompre avec la culture du pilotage flou. La centralisation du suivi à la Primature, l’obligation de reporting systématique, et la création d’équipes mixtes avec le privé marquent une volonté d’efficacité pragmatique.

Mais la réussite de cette stratégie dépendra moins des intentions que de l’aptitude à exécuter sans délai. La crédibilité du plan repose sur sa capacité à produire des résultats visibles dès les prochaines semaines. Le premier bilan est attendu pour fin septembre. Ce calendrier, resserré et exigeant, constitue autant une épreuve de vérité pour l’équipe gouvernementale qu’un test de confiance pour l’opinion publique.

La transformation évoquée ne sera pas un slogan de plus. Elle devra se traduire, ligne par ligne, action par action, dans un contexte où chaque manquement pourrait faire vaciller l’équilibre déjà fragile du pays. Le cap est fixé. Le temps des excuses semble clos.

Laisser un commentaire