À travers les décennies, le Magal de Touba a traversé vents et marées sans jamais fléchir. En 1989, alors que le Sénégal faisait face à une crise diplomatique avec la Mauritanie, des tensions extrêmes avaient fait craindre des débordements. En 2007, la suspicion de récupération politique avait jeté un trouble sur l’événement. Plus récemment, des menaces terroristes évoquées en 2015 et 2022 avaient alimenté l’inquiétude des fidèles. Pourtant, à chaque fois, Touba a su démontrer une constance remarquable : celle d’une cité où la foi s’élève au-dessus des conjonctures, et où les rassemblements religieux se déroulent avec dignité et ordre. Cette capacité à surmonter les épreuves forge aujourd’hui la réaction face aux alertes récentes.
Des rumeurs en coulisses, une foi inébranlable
Alors que les préparatifs du Magal du 12 août s’intensifient, une rumeur sourde agite certains cercles religieux et citoyens : des voix rapportent l’existence d’un plan occulté visant à troubler le bon déroulement de l’événement. Ces soupçons, relayés par des fidèles préoccupés, évoquent des tentatives de perturbation fomentées par des acteurs invisibles, déterminés à nuire à la célébration. Une situation qui aurait pu semer l’anxiété dans les foyers.
Mais Serigne Bassirou Mbacké Abdou Khadr, porte-parole du Khalife général des Mourides, a tenu à faire entendre une parole apaisante. Face aux bruits persistants, il appelle à la retenue et à la confiance, rappelant que le Magal n’est pas un simple rassemblement, mais l’expression d’une tradition spirituelle indéracinable. Il martèle que « personne ne pourra faire obstacle à la paix de Touba », et réaffirme l’engagement de toute l’organisation à assurer une commémoration sans incidents.
Une posture de vigilance mais sans agitation
Au lieu de céder à la panique, le comité d’organisation multiplie les concertations discrètes avec les forces de sécurité et les cellules de veille. Le choix des responsables religieux est clair : répondre à l’inquiétude par le calme, à la menace par la préparation, à l’ombre par la lumière de la discipline collective. La volonté est de ne pas donner d’écho excessif à des éléments non identifiés, mais d’anticiper toute éventualité par une organisation renforcée.
L’appel du porte-parole dépasse le simple cadre logistique : il est aussi un rappel à l’ordre moral. En ce sens, Serigne Bass condamne toute tentative d’instrumentalisation politique de l’événement. Pour lui, « la célébration du départ en exil de Cheikh Ahmadou Bamba n’est ni un outil de prestige ni une scène d’ambitions ». Cette prise de position vise à décourager les récupérations partisanes et à préserver l’esprit originel du Magal : celui d’un acte de dévotion désintéressé.
Le Magal comme point de repère national
L’écho du Magal dépasse largement les frontières de Touba. Chaque année, des centaines de milliers de pèlerins convergent vers la cité sainte, transformant l’événement en un point d’ancrage social, spirituel et économique majeur. C’est ce rayonnement, à la fois puissant et pacifique, qui est aujourd’hui en jeu. En rappelant les précédents épisodes de menaces surmontées, Serigne Bass Abdou Khadr veut raviver la mémoire collective d’une ville qui ne cède ni à la peur ni à la provocation.
Le message est limpide : la vigilance reste de mise, mais aucune force ne pourra fissurer l’édifice spirituel bâti autour de Cheikh Ahmadou Bamba. En écho à l’histoire, la réponse du Mouridisme reste celle de la constance, du calme et de la foi. À mesure que le 12 août approche, Touba se prépare, non dans l’agitation, mais dans la certitude que la lumière l’emporte toujours sur les ombres.



