Sénégal : Amadou Ba critique une faille sur la déclaration de patrimoine

Ce mercredi, l’Assemblée nationale est appelée à examiner en séance plénière quatre projets de loi adoptés récemment en Conseil des ministres. Parmi eux, celui portant sur la déclaration de patrimoine retient particulièrement l’attention. Alors que le gouvernement veut renforcer les outils de transparence, les discussions révèlent déjà de fortes dissensions. Amadou Ba, vice-président de l’hémicycle et membre influent du parti Pastef, a exprimé de vives réserves sur certaines dispositions du texte, les jugeant dangereusement permissives.

Son intervention, relayée dans l’émission Banc Public de Seneweb, met en lumière une faille peu commentée mais aux conséquences potentiellement lourdes. Le député pointe le cas d’un fonctionnaire qui détournerait des fonds publics puis décéderait sans jamais avoir été jugé. « S’il vole des milliards et meurt, on ferme le dossier. L’État perd son argent. Et sa famille se partage tranquillement l’argent public », déplore-t-il, en appelant à une refonte immédiate du mécanisme de poursuite post-mortem dans les affaires de corruption.

L’exception sénégalaise sous le feu des projecteurs

Pour Amadou Ba, cette situation reflète une spécificité nationale difficilement justifiable. Il s’étonne du silence juridique entourant des fortunes personnelles qui défient toute logique salariale dans l’administration. « Il n’y a qu’au Sénégal qu’on voit des fonctionnaires milliardaires ! », s’est-il insurgé, mettant en doute l’efficacité des contrôles internes et externes de l’État. Sa proposition est claire : rendre la déclaration de patrimoine obligatoire pour l’ensemble des agents de la fonction publique, sans distinction de grade ni de responsabilité budgétaire.

Cette extension ne serait ni bureaucratiquement lourde, ni techniquement irréalisable, selon lui. Pour illustrer son propos, le député évoque la France où « plus de 40 millions de citoyens remplissent chaque année leur déclaration d’impôts », un exercice qu’il compare à celui attendu des fonctionnaires sénégalais dans le cadre d’une politique anticorruption rigoureuse.

Une occasion de rompre avec la culture de l’impunité

Le débat lancé par Amadou Ba dépasse la question technique d’une réforme administrative. Il remet en cause un rapport à l’autorité publique trop souvent marqué par l’absence de reddition de comptes. En suggérant que des familles pourraient hériter en toute légalité du produit de détournements, il soulève un paradoxe moral et juridique de taille : comment une société peut-elle lutter contre la corruption si les bénéficiaires finaux de ces actes restent intouchables ?

La proposition de revoir la loi ne vise pas uniquement à combler un vide. Elle appelle à un changement de posture de l’État face aux infractions économiques. À quelques heure de l’ouverture des discussions parlementaires, cette prise de position risque de susciter de nouveaux débats au sein de la majorité comme de l’opposition, dans un pays où l’attente citoyenne en matière d’intégrité publique n’a jamais été aussi forte.

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