Depuis plus de deux décennies, les relations entre le Venezuela et les États-Unis se nourrissent d’accusations réciproques et de provocations diplomatiques. Les sanctions économiques, les soupçons d’ingérences et les divergences idéologiques ont transformé les rapports bilatéraux en bras de fer permanent. Avec Donald Trump à la Maison-Blanche, le ton est monté d’un cran. L’ancien président américain a ordonné le déploiement de forces navales dans la mer des Caraïbes, justifiant cette opération par la lutte contre les cartels de la drogue. Caracas y voit plutôt une stratégie d’encerclement, une manière à peine voilée de fragiliser le régime chaviste. De cette rivalité géopolitique découle aujourd’hui une initiative qui surprend par sa radicalité : Nicolás Maduro exhorte ses concitoyens à se former au maniement des armes.
Des casernes transformées en écoles de tir
Au lieu de se contenter d’un discours patriotique classique, le chef de l’État vénézuélien invite désormais chaque citoyen à franchir la porte des casernes. Communautés de quartier, réservistes, jeunes militants et miliciens sont appelés à suivre une formation pratique sur les champs de tir. L’idée est simple : faire de la population une force prête à épauler l’armée régulière en cas d’agression. Devant un auditoire de la jeunesse de son parti, Maduro a insisté sur la nécessité d’une vigilance permanente et présenté son peuple comme à la fois joyeux et festif, mais aussi prêt à se muer en guerriers lorsque la souveraineté est menacée. L’image d’un pays où la défense nationale devient une compétence civique illustre bien cette volonté de transformer la peur en mobilisation collective.
Entre rhétorique et stratégie de survie
Ce message martial, diffusé en direct à la télévision, ne se réduit pas à une bravade politique. Il traduit une conviction : face à la puissance militaire américaine, le Venezuela doit compenser son déséquilibre stratégique par une mobilisation populaire de masse. À la manière d’un entraîneur préparant une équipe en difficulté, Maduro cherche à inculquer l’idée que l’endurance et la discipline peuvent rivaliser avec la supériorité technique de l’adversaire. Reste à savoir si cet appel rencontrera un écho concret au sein d’une population fragilisée par la crise économique et l’exode massif de ses ressortissants.
Une équation encore ouverte
En appelant son peuple à apprendre à tirer, Maduro ne livre pas seulement un message de défense nationale : il tente de renforcer sa légitimité intérieure et de souder les rangs autour de lui. Mais l’image d’une société appelée à se préparer aux armes interroge. Elle évoque autant la détermination d’un pays assiégé que le risque d’un glissement vers une militarisation de la vie civile. Entre la rhétorique guerrière et la réalité sociale, le Venezuela se trouve face à une équation délicate : transformer la peur de l’invasion en force de résistance sans précipiter la nation dans une spirale de violence interne.



