Or au Burkina Faso : Ibrahim Traoré veut reprendre le contrôle du secteur

La récente entrée en production de la mine de Kiaka n’a pas tardé à susciter une réaction du pouvoir burkinabè. Par un courrier adressé fin août à West African Resources, les autorités ont annoncé leur intention de monter à hauteur de 35 % supplémentaires dans le capital du projet. Cette décision marque une étape nouvelle dans la stratégie d’Ibrahim Traoré de consolider l’influence de l’État sur l’or, principal levier d’exportation du pays. Au cœur de cette démarche se trouve la volonté de limiter le poids des investisseurs étrangers et d’assurer un meilleur contrôle national des revenus miniers.

Un tournant assumé par Ouagadougou

La mine de Kiaka, entrée en phase de production en juin, a rapidement pris une place centrale dans les débats sur la gestion des ressources. Le ministre de l’Énergie, des Mines et des Carrières, Yacouba Zabré Gouba, a indiqué que l’État était prêt à investir pour porter sa participation à hauteur de la moitié du capital. Officiellement, il s’agit d’une option ouverte par la réforme du code minier de 2024, et non d’une contrainte imposée à l’opérateur australien West African Resources. Le message reste néanmoins clair : le Burkina Faso entend renforcer son rôle décisionnel dans l’exploitation aurifère.

L’annonce a provoqué une suspension des actions de la société sur l’Australian Securities Exchange, signe de l’inquiétude des investisseurs face à une telle initiative. Pour Ouagadougou, cette démarche vise à sécuriser davantage de revenus et à orienter leur usage vers des priorités locales, quitte à susciter des tensions avec certains partenaires économiques.

Des initiatives qui se multiplient au Sahel

Le Burkina Faso n’est pas le seul pays de la région à chercher à reprendre la main sur ses ressources minières. Le Mali a révisé son code minier dès 2022, augmentant la part de l’État dans les projets aurifères pour mieux contrôler un secteur vital pour son économie. Le Niger, quant à lui, a revu les termes de ses contrats autour de l’uranium, cherchant à obtenir une répartition plus favorable de la valeur créée. Ces décisions traduisent une dynamique partagée : limiter le rôle passif des États et s’affirmer comme acteurs centraux de la gestion des richesses naturelles.

Cette orientation régionale éclaire le choix du Burkina Faso. En rejoignant ses voisins du Mali et du Niger, Ouagadougou confirme que l’Alliance des États du Sahel veut définir de nouvelles règles avec les compagnies étrangères.

Vers une redéfinition des rapports de force

L’or constitue la principale ressource d’exportation du Burkina Faso, et la décision d’Ibrahim Traoré d’accroître l’intervention de l’État envoie un signal fort aux acteurs internationaux : les projets miniers ne seront plus dictés uniquement par les capitaux étrangers. Cette stratégie pourrait également influencer les discussions à venir concernant d’autres sites en préparation.

Ce choix illustre un changement d’équilibre. Comme lorsqu’un pays reprend la gestion de ses infrastructures stratégiques, Ouagadougou cherche à éviter que ses gisements soient gérés comme des enclaves extérieures. L’impact est double : il rassure une partie de la population qui voit l’État défendre ses intérêts, mais il crée aussi des incertitudes pour les investisseurs, soucieux de stabilité juridique et financière.

L’avenir dira si ce repositionnement permettra d’attirer des partenaires prêts à composer avec ce nouveau cadre. Mais une chose est acquise : l’or burkinabè est désormais au cœur d’un projet politique visant à renforcer la souveraineté économique du pays, en écho aux démarches de ses voisins du Sahel.

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