Le président Bassirou Diomaye Faye a reçu jeudi, au Palais de la République, le Livre blanc sur le massacre des tirailleurs sénégalais à Thiaroye. Ce document, élaboré par le comité de commémoration dirigé par le Pr Mamadou Diouf, retrace les faits, les responsabilités et les implications mémorielles de ce drame survenu en 1944. La cérémonie a été marquée par un appel à la transparence totale sur les archives françaises encore partiellement inaccessibles.
Une démarche nationale pour rétablir la vérité
Le professeur Mamadou Diouf, président du Comité de commémoration du massacre de Thiaroye, a salué un moment fondateur pour la mémoire collective sénégalaise. Dans son discours, il a rappelé que le Livre blanc est le résultat d’un « travail de recherche, de documentation et de concertation » mené durant plusieurs mois par des universitaires et des institutions nationales. Selon lui, ce document constitue une base solide pour « éclairer les circonstances du massacre, rendre hommage aux victimes et promouvoir une reconnaissance historique partagée entre les nations concernées ».
Le chef de l’État Bassirou Diomaye Faye, qui a officiellement reçu le rapport, a souligné la portée symbolique de cette démarche. Il a salué « un acte décisif dans la marche vers la vérité, la justice et la réconciliation avec notre mémoire ». Le président a évoqué la nécessité d’une introspection collective, affirmant que « Thiaroye n’est pas une page tournée, mais un chemin qui se poursuit ». Pour lui, la mémoire des tirailleurs reste un pilier de la dignité nationale et un socle de cohésion entre générations.
Toutefois, le président Faye a exprimé sa déception à l’égard de la coopération française, jugée insuffisante dans la mise à disposition complète des archives relatives au massacre. En présence de l’ambassadrice de France, il a regretté que les engagements pris n’aient pas permis un accès total aux documents historiques. Cette déclaration traduit la volonté du Sénégal d’obtenir une transparence intégrale sur un épisode longtemps occulté de la mémoire coloniale.
Un acte mémoriel à portée diplomatique et historique
Cette remise officielle du Livre blanc intervient à l’approche du 80ᵉ anniversaire du massacre de Thiaroye, célébré en décembre 2024. Cette commémoration, qui avait réuni plusieurs chefs d’État africains et des représentants d’organisations internationales, avait déjà marqué un tournant dans la reconnaissance du drame. L’événement de 1944, au cours duquel plusieurs centaines de tirailleurs démobilisés furent tués après avoir réclamé leurs soldes, reste une plaie encore vive dans l’histoire franco-africaine.
Le Livre blanc, long de plusieurs centaines de pages, ambitionne d’établir une vérité scientifique sur les faits, d’identifier les responsabilités institutionnelles et d’encourager une approche partagée de la mémoire coloniale. Il s’inscrit dans une dynamique régionale où d’autres pays africains plaident pour l’ouverture complète des archives coloniales, condition jugée essentielle pour la réconciliation des récits historiques.
La cérémonie du 16 octobre 2025 s’inscrit ainsi dans la continuité d’une politique mémorielle initiée depuis plusieurs années par le Sénégal, alliant exigence de vérité, dialogue diplomatique et devoir de transmission. Le Livre blanc devrait être mis à la disposition du public et des chercheurs afin d’alimenter de futures coopérations académiques et culturelles autour de la mémoire des tirailleurs africains.


