Algérie : la nouvelle provocation d'Eric Zemmour

Éric Zemmour n’a jamais reculé devant la controverse, et sa dernière sortie n’échappe pas à la règle. Le président du parti Reconquête a de nouveau enflammé les réseaux sociaux après avoir affirmé que l’Algérie ne s’était pas « libérée », mais qu’elle avait « reçu son indépendance » de Charles de Gaulle. Cette déclaration, lancée sur X, a déclenché une violente tempête politique et mémorielle, notamment après un échange houleux avec l’imam Ismaïl, figure très suivie sur la plateforme.

Une querelle qui ravive les blessures de la mémoire coloniale


Tout est parti d’un message publié il ya quelques jours par Sarah Knafo, eurodéputée du même parti, comparant la relation franco-algérienne à un « divorce non consommé ». Selon elle, la France « continue de verser une pension alimentaire » à son ancien territoire. La métaphore, jugée méprisante, a aussitôt provoqué l’indignation. L’imam Ismaïl a répliqué en dénonçant une obsession « maladive pour les Arabes » et en rappelant le prix sanglant de l’indépendance algérienne : plus de sept ans de guerre, des villages rasés, des centaines de milliers de morts et une lutte reconnue aujourd’hui par Paris comme un véritable conflit armé.

Zemmour a choisi de défendre la sortie de sa proche collaboratrice en redoublant de provocation. Selon lui, l’Armée de libération nationale (ALN) n’a pas arraché l’indépendance par les armes, mais c’est De Gaulle qui aurait « offert » la souveraineté à l’Algérie. Il est même allé jusqu’à affirmer que la colonisation avait « civilisé » et « assaini » le pays. Des propos qui ont fait bondir historiens, responsables politiques et simples internautes, exaspérés par ce qu’ils perçoivent comme une réécriture délibérée de l’histoire.

Une stratégie de la provocation permanente

Les outrances verbales d’Éric Zemmour ne sont pas un accident de parcours : elles constituent la colonne vertébrale de sa communication politique. Depuis des années, l’ancien polémiste converti en candidat d’extrême droite s’est imposé par sa capacité à transformer chaque sujet en champ de bataille idéologique. Ses prises de position sur la colonisation, l’immigration ou l’islam nourrissent un récit nostalgique d’une France fantasmée, où l’Empire aurait représenté un âge d’or d’ordre et de grandeur.

En s’en prenant à la mémoire de la guerre d’Algérie, Zemmour touche à un sujet explosif. Pour beaucoup de Franco-Algériens, ces propos ne relèvent pas seulement d’une provocation politique, mais d’une blessure identitaire. Les mots employés réveillent une histoire encore douloureuse des deux côtés de la Méditerranée, où la reconnaissance du passé colonial reste un sujet de tension. À chaque fois qu’il ravive ce débat, Zemmour semble poursuivre un double objectif : renforcer son électorat le plus radical et occuper le terrain médiatique en imposant son agenda.

Mais cette stratégie de la tension permanente pourrait aussi finir par se retourner contre lui. En s’attaquant à des symboles aussi sensibles que la guerre d’indépendance algérienne, il risque de renforcer l’image d’un homme coupé des réalités historiques et incapable de rassembler au-delà d’un noyau dur.

Une provocation aux airs de déjà-vu

Cette nouvelle controverse illustre une fois encore la difficulté de la France à dépasser le poids de son passé colonial. Chaque sortie d’Éric Zemmour agit comme une piqûre de rappel. Les cicatrices de la guerre d’Algérie n’ont jamais vraiment guéri. Et si certains y voient une stratégie politique habile pour exister dans un espace médiatique saturé, d’autres y lisent le signe d’un blocage collectif à repenser sereinement la relation entre Paris et Alger.

En tentant de réécrire l’histoire au nom d’une vision idéalisée de la France, Zemmour rouvre un vieux dossier dont personne ne sort grandi. Sa « provocation » n’est pas seulement une déclaration polémique : c’est le miroir d’une mémoire toujours fragmentée, que ni la politique ni les mots n’ont encore réussi à réconcilier.

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