Sénégal : Des pièces pillées au XIXᵉ siècle présentées dans une exposition inédite

Huit objets confisqués par des soldats français en 1875 lors de la bataille de Samba Sadio sont présentés depuis le 23 octobre au musée de Thiès. Provenant du musée de Dunkerque, ces pièces rejoindront ensuite Saint-Louis avant de regagner la France. Cette initiative culturelle, fruit d’une coopération entre institutions sénégalaises et françaises, relance le débat sur la restitution du patrimoine historique africain.

Des reliques de guerre symboliques temporairement revenues au pays

Une bride de cheval, un mors, une planchette coranique, un porte-monnaie ou encore un collier d’amulette de guerre : ces objets modestes mais chargés d’histoire ont traversé les siècles. Ils furent saisis à des combattants sénégalais par des troupes françaises il y a près de 150 ans, lors de la bataille de Samba Sadio, affrontement emblématique de la résistance locale face à la colonisation. Conservés depuis dans les collections du musée de Dunkerque, ils font aujourd’hui l’objet d’une exposition temporaire intitulée « Samba Sadio 1875 », inaugurée au musée régional de Thiès.

Cette exposition, conçue dans le cadre d’un projet lancé en 2021, est portée par une convention quadripartite réunissant les musées de Dunkerque, Thiès et Saint-Louis ainsi que l’association française Alter Natives. Après leur passage à Thiès, les objets seront exposés à Saint-Louis jusqu’en février 2026, avant de retourner dans le nord de la France. Si le Sénégal souhaite obtenir leur restitution définitive, une demande officielle devra être formulée auprès des autorités françaises, ce qui n’a pas encore été fait, selon plusieurs sources médiatiques.

Une coopération culturelle qui s’inscrit dans une dynamique plus large

Le retour temporaire de ces objets historiques s’inscrit dans un processus de reconnaissance patrimoniale amorcé entre la France et le Sénégal depuis plusieurs années. Le 24 décembre 2020, l’Assemblée nationale française a adopté une loi autorisant la restitution de biens culturels à la République du Sénégal et à celle du Bénin. Ce texte a permis notamment la restitution du sabre attribué à El Hadj Oumar Tall, symbole de la résistance toucouleur au XIXᵉ siècle, jusque-là conservé par le musée de l’Armée à Paris. Cette loi, dérogeant au principe d’inaliénabilité des collections publiques françaises, a ouvert la voie à des accords bilatéraux ponctuels et à un dialogue renouvelé autour du patrimoine africain.

Pour les acteurs du secteur culturel sénégalais, l’exposition « Samba Sadio 1875 » représente une étape symbolique : elle montre la faisabilité de projets de coopération équilibrés entre musées et partenaires institutionnels, tout en posant la question de la souveraineté culturelle. Les autorités sénégalaises envisagent d’enrichir les collections nationales par des démarches officielles de restitution, dans la continuité du travail amorcé avec le sabre d’Oumar Tall.

L’exposition restera ouverte au public à Thiès jusqu’à la fin de l’année 2025 avant son transfert à Saint-Louis, où elle constituera l’un des événements culturels majeurs du premier semestre 2026.

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