La réponse officielle du ministère de la Justice à une question parlementaire replace au premier plan les paiements effectués en faveur d’Ellipse Project SA dans le cadre du Programme de modernisation des infrastructures judiciaires. Entre 2021 et 2023, l’État a versé des montants très élevés pour un taux d’exécution faible, selon une note interne. Le projet du Palais de justice de Mbour, longtemps bloqué faute de terrain, apparaît aujourd’hui comme l’un des chantiers les plus sensibles du programme. L’affaire intervient dans un moment où les débats autour de pratiques financières supposées au sein de personnalités publiques attirent fortement l’attention.
Un programme financé, mais très peu avancé
Le document transmis au député Guy Marius Sagna éclaire la situation du Tribunal de grande instance de Mbour, dont les services sont dispersés sur trois sites. Le ministère rappelle que la construction d’un bâtiment unique figurait dans le premier lot du Programme de modernisation des infrastructures judiciaires, piloté par Ellipse Project SA. Cette société était chargée d’opérer le programme dans son ensemble, et plusieurs contrats avaient été conclus pour lancer les travaux à l’échelle nationale.
Une note technique datée du 14 février 2025, rédigée par la Direction des constructions des Palais de justice, indique que l’État du Sénégal a versé 75 milliards de francs CFA entre 2021 et 2023, soit 25 milliards par an. Ces paiements étaient destinés à financer l’avancement de plusieurs chantiers, dont l’édifice de Mbour. L’information met en évidence une contradiction majeure : malgré ces sommes importantes, la note souligne que le taux d’exécution global du programme n’atteint que 11 %. Ce faible niveau d’avancement avait suscité, dès 2023, plusieurs demandes d’explications internes, dont certaines pourraient être rendues publiques dans un rapport institutionnel à venir.
Des interrogations renforcées par une actualité judiciaire parallèle
L’envoi de ces précisions intervient alors que des affaires financières impliquant des personnalités publiques sont largement commentées. L’arrestation de l’épouse du journaliste Madiambal Diagne, de deux de ses fils et d’un marabout a alimenté de nombreuses spéculations. Le journaliste devait comparaître le 28 octobre devant le tribunal de Versailles, pour des soupçons de flux financiers illicites estimés à 21 milliards de francs CFA, avant que l’audience ne soit reportée au 25 novembre à la demande de ses avocats. Plusieurs observateurs estiment que cette séquence contribue à renforcer l’attention portée à la transparence dans la gestion de fonds publics, en particulier dans les programmes impliquant des opérateurs privés liés à l’État.
Le courrier adressé au député souligne que l’urgence signalée au Ministère des Infrastructures vise à clarifier la relance du chantier et à s’assurer que les ressources déjà engagées trouvent une traduction concrète. Les autorités rappellent que les besoins du Tribunal de grande instance de Mbour restent importants et que la centralisation de ses services constitue un objectif prioritaire.
Le ministère conclut sa réponse en réaffirmant que l’ensemble des éléments financiers et techniques relatifs à Ellipse Project SA ont été notifiés aux services compétents pour éclairer les prochaines décisions administratives.


