Sénégal : L’ARCOP révèle de graves irrégularités dans les marchés publics

Le rapport 2022-2023 de l’Autorité de régulation de la commande publique (ARCOP) fait état d’importantes anomalies dans la passation des marchés au Sénégal. Sur un total de 3 976 marchés évalués à 2 729 milliards F CFA, près de 1 139 milliards ont été attribués par entente directe. Les auditeurs signalent également des préjudices estimés à 3,2 milliards F CFA pour plusieurs collectivités locales. Ce document, désormais public, met en cause plusieurs institutions, dont la Ville de Dakar et certaines agences d’État.

Pratiques contraires au code des marchés publics

Selon le rapport, une part significative des marchés publics a été octroyée sans appel d’offres compétitif, favorisant ainsi les ententes directes et limitant la transparence. Ces procédures, bien que légales dans des cas spécifiques, sont jugées excessives par les auditeurs compte tenu de leur poids financier. Les vérifications ont porté sur 3 976 marchés, représentant un volume global de 2 729 milliards F CFA, un chiffre qui illustre l’ampleur du phénomène.

Plusieurs entités administratives figurent parmi les structures épinglées. La commune de Dakar, des ministères sectoriels et certaines agences publiques ont été pointés pour des pratiques jugées contraires au code des marchés : surfacturations, consultations biaisées, fournisseurs non qualifiés et absence de justification technique pour des attributions importantes. L’audit note aussi que des entreprises ont obtenu des contrats sans disposer des capacités requises, créant ainsi un risque financier pour les institutions concernées.

Le rapport relance le débat sur la gouvernance publique

Ce document s’inscrit dans la continuité des rapports précédents ayant mis en évidence les limites du contrôle de la dépense publique au Sénégal. Les cycles d’audit menés ces dernières années par des organes comme la Cour des comptes ou la CENTIF avaient déjà révélé des cas de détournements et de mauvaise gestion. Le rapport de l’ARCOP pour 2022-2023 vient confirmer la persistance de failles structurelles dans la régulation des marchés publics et pose la question de la responsabilité administrative des ordonnateurs.

Le rappel des chiffres reste parlant : 1 139 milliards F CFA de marchés attribués sans concurrence, 3,2 milliards F CFA de pertes constatées, et des procédures répétitives d’entente directe. Ces anomalies surviennent alors que l’État cherche à renforcer la gouvernance financière dans le cadre du Plan de redressement économique et social (PRES). Le contrôle de la commande publique est un enjeu central pour la stabilité budgétaire et la crédibilité du pays vis-à-vis de ses partenaires techniques et financiers.

À ce stade, aucune procédure disciplinaire n’a encore été officiellement annoncée. L’ARCOP recommande toutefois un renforcement des sanctions prévues par le code et un recours accru à la digitalisation des appels d’offres pour garantir la traçabilité et la transparence des marchés publics.

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