Le Bénin n’est malheureusement pas épargné par la montée insidieuse des discours de haine. Ces expressions, qu’elles soient proférées sur les réseaux sociaux, dans les médias traditionnels ou lors de rassemblements publics, constituent une menace grandissante, qui met en péril la cohésion sociale et la paix. Loin d’être de simples paroles en l’air, elles sont le terreau fertile de la division, des tensions intercommunautaires et pire dans les cas les plus extrêmes. Les discours de haine au Bénin se manifestent souvent sous la forme de stigmatisations verbales ciblant des groupes précis, qu’il s’agisse d’ethnies, de régions, ou de groupes sociaux. Tensions intercommunautaires et conflits agriculteurs-éleveurs, rivalités régionales et ethniques, discours de haine dans la sphère politique sont autant d’éléments qui fragilisent le vivre-ensemble des populations béninoises. Bien que les conflits entre agriculteurs et éleveurs aient des racines foncières et économiques, ils sont régulièrement exacerbés par des discours haineux qui polarisent les communautés. Des invectives et des généralisations accusatrices circulent, imputant la totalité des torts à l’un ou l’autre groupe en fonction de l’appartenance ethnique ou de l’activité. Ces paroles transforment un litige en un conflit identitaire, attisant la méfiance et la soif de vengeance entre les parties. Dans l’arène politique ou sur les forums en ligne, il n’est pas rare d’entendre des attaques verbales fondées sur l’origine géographique ou l’ethnie d’un individu ou d’un groupe. Les plaisanteries anodines peuvent rapidement dériver vers des stéréotypes offensants et des jugements péjoratifs sur la prétendue intelligence, la moralité ou les ambitions politiques des ressortissants d’une région donnée. Ces propos, souvent diffusés par des comptes anonymes, créent des clivages artificiels et nourrissent un ethnocentrisme délétère, qui contrevient aux principes d’égalité et de non-discrimination inscrits dans la Constitution. À l’approche des élections ou lors de débats houleux, la rhétorique politique pourrait parfois glisser vers l’incitation à la haine. Des hommes politiques pourraient être dépeints comme des ennemis de la nation ou des traîtres sur la base de leur appartenance régionale, incitant certains militants à l’intimidation. L’usage de la calomnie et de la désinformation ciblant un groupe social ou professionnel participe également à cette atmosphère délétère.
Les conséquences dévastatrices sur la société
L’impact des discours de haine va bien au-delà de la simple offense. Ils empoisonnent la société et menacent ses fondements démocratiques. La propagation de stéréotypes négatifs et de messages de rejet mine la confiance mutuelle entre les citoyens. Lorsque les gens commencent à voir l’« autre » non plus comme un compatriote, mais comme une menace potentielle, le vivre-ensemble harmonieux s’effrite. En transformant les désaccords en antagonismes irréductibles, les discours de haine provoquent une polarisation de la société. Dans des contextes de tensions préexistantes, ces discours peuvent servir de catalyseur, ouvrant la voie à des actions contre les groupes ciblés. Une société divisée et instable ne peut pas prospérer. Les conflits internes détournent les énergies et les ressources des objectifs de développement, perpétuant les inégalités économiques et sociales qui, paradoxalement, peuvent alimenter de nouveaux ressentiments et de nouveaux discours de haine.
La réponse du Bénin : un cadre légal et des initiatives de paix
Face à cette menace, le Bénin a pris des mesures législatives fortes pour réprimer ces dérives. La Constitution du pays garantit l’égalité de tous devant la loi, sans distinction d’origine, de race ou d’ethnie. De manière cruciale, le Code pénal de 2018 incrimine explicitement les discours de haine et l’outrage à la tribu ou à l’ethnie. La loi portant Code de l’information et de la communication de 2015 pénalise également les discours de haine, y compris ceux qui incitent à la violence. Ce cadre juridique montre une volonté politique de protéger l’unité nationale. Des initiatives concrètes ont été lancées, en particulier dans le Nord-Bénin. Le déploiement de messagers de paix vise à diffuser des contre-messages et des messages alternatifs face aux discours de haine, afin de renforcer la résilience et la cohésion sociale au sein des communautés.
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