Les chaines de télévision …

{ic_doc}{/ic_doc}et la petitesse des informations

Un universitaire togolais, ayant séjourné au Bénin pendant trois jours, m’a dit toute sa surprise de voir à quel point les programmes de la télévision nationale, l’ORTB, ressemblaient, comme deux gouttes de larmes, à ceux de la télévision togolaise aux temps bénis d’Eyadema père. Sur le champ, je me suis hérissé contre sa réflexion, estimant peu crédible cette manière de voir les choses. Mais il m’a confirmé, arguments à l’appui, son constat en se référant aux contenus des journaux diffusés à longueur de temps sur les quatre chaînes.

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Les sujets, ici, ne tournent qu’autour des soutiens à apporter au chef de l’Etat. Meetings, marches, messes, création de groupuscules, déclarations de quidam sorti d’où on ne sait quelle grotte de l’arrière-pays. A l’époque du Timonier national, l’ambiance était toute aussi abêtissante : animations politiques de groupes chocs venus de Trifouillis les Anes, meetings, marches, motions de soutien à l’occasion des réunions. Même les sourds et muets qui organisaient, au sein de leurs associations, des concertations sans tambour (c’est le cas de le dire) étaient obligés d’aller ânonner des déclarations à la télévision pour exprimer officiellement leur allégeance à l’ex-père du Togo nouveau. Le résultat est qu’on a fini par faire de nos frères togolais un peuple lessivé, endormi et même chloroformé dont le réveil tardif a produit les résultats que nous savons.

Certes, on n’est pas encore arrivé, sous l’ère Yayi, à cette extrémité-là. Mais, à l’allure où vont les choses, à voir la débauche d’énergie déployée par les experts en communication, à entendre le montant des sous injectés dans ces opérations, la situation est inquiétante. Non pas parce que je crains que les béninois deviennent des zombis – ils ne l’ont pas été au temps de la révolution, ce n’est pas aujourd’hui qu’ils le deviendront – mais parce que le gouvernement Yayi donne l’impression de vouloir, à chaque fois, se rassurer sur le soutien du peuple, comme s’il était toujours en campagne électorale, comme s’il avait besoin de cacher des choses. De sorte qu’on se demande pourquoi ce qui devrait relever de la communication est devenu carrément de la propagande. Et qui dit propagande dit montage, images surfaites ou tronquées. Des témoignages concordants rappellent que les meetings, les marches et autres danses de ventre qui se succèdent sur le vaste territoire du pays n’ont rien de spontané. Au contraire, ils sont orchestrés et même démarchés. Ce qui a provoqué l’émergence (c’est sans jeu de mot) des professions de circonstance : désormais existent des marcheurs, des rassembleurs, des lecteurs de motion, des porteurs de haut-parleurs et des mêmes des fournisseurs de pure water, ces sachets d’eau qu’on mobilise pour étancher la soif des marcheurs. De mauvaises langues ajoutent que des lavandières souhaiteraient se mêler de la partie, puisque, estiment-elles, la poussière étant ce qui colle le plus souvent aux pantalons et aux pagnes des marcheurs, elles seraient disponibles pour des lessives en bonne règle.

Mais ce qui m’inquiète le plus, c’est justement l’impression que cette messe donne des Béninois. Serions-nous devenus un peuple mouton ? N’y a-t-il plus d’intelligence dans le pays ? Devrions-nous avaler sans rechigner toutes ces inepties ? Pourquoi obliger les téléspectateurs à subir, sur les quatre chaînes de télévision, aux mêmes heures, presque simultanément, les mêmes documents sur le chef de l’Etat ? Pourquoi ne diffuser uniquement que les déclarations des louangeurs qui rivalisent d’ardeur et de petitesse ? Que dit la HAAC ?

Quand je revois tout ça, il me vient à l’esprit deux images de Mobutu roi du zaïre du Belge Thierry Vincent. La première montre le maréchal au faîte de sa gloire où des partisans, au pied de son balcon, sont tous hystériques, dansant et chantant en son nom. « Vous croyez que c’est moi qui les fait agir, sourit Mobutu à l’adresse du journaliste, c’est Dieu ». La deuxième image nous montre le même Kuku Bengu, quelques années plus tard, en train d’être mis en terre, au Maroc, avec pour témoins les seuls membres de sa famille ». Déduction ? Il arrivera à Dieu de connaître un jour le destin des hommes : la mort

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