Secteur agricole en Afrique

/food/ogm.jpg » hspace= »6″ alt= » » title= » » border= »0″ style= »float: right; » />Une  nouvelle révolution verte: des inquiétudes persistent
Une nouvelle révolution verte est depuis peu, évoquée dans les instances de prise de décisions en Afrique, face à l’inégalable crise alimentaire  qui sévit sur  tout le continent. Les points de vue divergent cependant quant au processus de mise en œuvre de cette nouvelle tentative après l’échec subie par la première.

« La première révolution verte a raté l’Afrique », ou c’est « l’Afrique qui a raté  la première révolution verte ». D’une thèse à l’autre, les   arguments  varient selon les visions des différents acteurs qui s’investissent dans le secteur agricole en Afrique. Le débat  s’est amplifié   depuis  le début de la nouvelle crise alimentaire qui frappe durement le continent noir. Dans la foulée, un nouveau projet, l’Alliance  pour une  révolution verte  en Afrique, a été  conçu pour mettre en application ce concept ; non sans  les réticences de certains cadres scientifiques africains qui  ne manquent pas d’arguments  pour se  justifier.
Les partisans de la révolution verte, en effet,  la désignent comme une stratégie de lutte contre la faim dans le monde, rassemblant dans les pays en développement la recherche scientifique internationale et les variétés de plantes cultivées. Le modèle a été proposé dans les années 50 par les Fondations Ford et Rockefeller comme un moyen de contrecarrer la menace de la «Révolution rouge»: l’expansion du communisme dans les pays pauvres. En commençant par le Mexique, les Philippines et l’Inde, les nouvelles variétés de blé, de riz et de maïs se sont rapidement propagées sous les tropiques et ont remplacé les variétés des agriculteurs. Mais celles-ci n’ont produit les résultats attendus de «hauts rendements» que s’il y avait de l’irrigation, de la mécanisation et de grosses quantités d’engrais chimiques (le seul moyen pour que ça fonctionne) et de pesticides.
La conséquence de cet effort a   été une augmentation des rendements pour des cultures spécifiques et dans des pays bien précis, au moins sur leurs terres irriguées, fertiles et plates. Par exemple, pendant ce programme, l’Inde a multiplié par dix sa production de blé et par trois sa production de riz. Norman Borlaug, considéré comme l’un des pères de la révolution verte, a reçu le prix Nobel de la paix en 1970 pour sa contribution.

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 Un énorme prix à payer

Mais derrière les rendements accrus, il y avait un énorme prix à payer, en termes économiques, agricoles et sociaux. L’utilisation de grosses quantités d’eau, d’engrais et de pesticides chimiques ont appauvri les sols, les laissant moins fertiles et gravement pollués. La biodiversité locale a été considérablement réduite, rendant les agriculteurs dépendants des fabricants de pesticides et des fournisseurs de semences extérieurs.
 Les profonds changements culturels et sociaux provoqués par la révolution verte ont aussi entraîné un exode rural massif et avec lui, une perte des savoirs et des savoir-faire traditionnels. Pour la majorité des agriculteurs, les profits des débuts se sont bientôt transformés en dettes et nombre d’entre eux, dans l’incapacité d’y faire face, se   sont donné la mort.
 En réalité, pensent certains acteurs agricoles,  la première révolution verte a  été ignorée par les Africains. Et pour cause. Entre 1960 et 1970, l’Afrique était occupée à gérer son indépendance nouvellement acquise, et n’a pas été intégrée à l’élaboration des premiers projets de la révolution verte. L’agriculture familiale était encore la norme en Afrique et la recherche officielle était menée par les systèmes de recherche agricole des pouvoirs coloniaux.
Les instituts de recherche comme l’Iita (Institut international d’agriculture tropicale du Nigeria) et l’Icrisat (Institut international de recherche sur les cultures des zones tropicales semi-arides), ont été parachutés en Afrique pour développer des programmes inspirés de la révolution verte pour certaines des plantes alimentaires du continent. Mais ils n’ont pas pris en compte les réalités de terrain et peu de ces «variétés améliorées» ont été acceptées par les agriculteurs et consommateurs africains.
 La révolution verte, basée sur un réductionnisme scientifique, a abouti donc  à des monocultures, l’utilisation d’intrants chimiques (comme des engrais et des pesticides) et une mécanisation inappropriée. C’est une approche totalement étrangère au système agraire du paysan d’Afrique qui a une approche plus holistique de l’agriculture dans laquelle les plantes sont associées à l’élevage, où on utilise du fumier organique et prend soin des sols, et où il y a un profond respect de l’environnement plus large.
Maintenant, avec un apport financier des fondations Bill Gates, Rockefeller et d’autres donateurs des Etats- Unis, beaucoup d’organisations   qui avaient fait une première tentative veulent encore  s’essayer à la chose, face à une crise alimentaire  qui gagne  davantage du terrain. Un nouveau saut dans l’inconnu, semblent s’en méfier bien d’observateurs, craignant  de voir resurgir les mêmes erreurs comme par le passé, si toutes les conditions ne sont pas réunies pour une bonne application de cette nouvelle révolution verte.

Christian Tchanou

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