Entretien avec abbé Mensah, de l’association «Mémoires d’Afrique»

/food/abbemensah.png » hspace= »6″ alt= »Abbé Israël Mensah, pdt de Mémoire d’Afrique » title= »Abbé Israël Mensah, pdt de Mémoire d’Afrique »  » />{joso}«Le conte constitue la substance de la pensée d’un peuple»

Père fondateur de l’association «Mémoires d’Afrique», le Révérend Père Israël Mensah évoque dans cet entretien la décennie de son organisation. Un événement qu’il entend célébrer  par une série de manifestations majeures. Entre autres, une table ronde télévisuelle et une conférence sur les fonctions sociales du conte en Afrique, ainsi que la 3ème édition de la Nuit des contes. Très engagé dans la promotion de la culture africaine il plaide pour une unification de l’Afrique dans toute sa diversité.  {/joso} {joso}L’Association Mémoires d’Afrique dont la vocation première est la promotion et la sauvegarde des valeurs culturelles africaines s’apprête à célébrer ses dix années d’existence. Quelles sont les activités phares programmées pour commémorer cet évènement ?
Trois grandes activités focaliseront l’attention du public pour les 10 ans de Mémoires d’Afrique. Une table ronde sur le plateau d’une chaîne de télévision de la place afin de pouvoir permettre à quelques personnalités de s’entretenir sur l’historique de Mémoires d’Afrique, ses objectifs et les différentes activités menées depuis 10 ans. Il est également prévu au Codiam de Cotonou, une conférence publique animée par les Professeurs Adrien Houannou et Jean Pliya sur le thème: «Les fonctions sociales des contes dans la culture africaine». Et le clou des manifestations est la nuit des contes.  Pour cette 3ème édition de la nuit des contes, quatre villes ont été choisies pour accueillir les contes béninois: Tchaourou, Cotonou, Possotomé et Natitingou. Dans ces localités auront lieu simultanément des soirées de contes à partir de 20 heures 30. A Cotonou, deux sites ont été choisis pour l’instant: Le complexe scolaire Saint Michel et l’école primaire privée Saint Jean.

Vous semblez attacher beaucoup d’attention à la promotion des contes en Afrique. Pourtant, on sait que le conte ne constitue pas exclusivement l’essence de nos traditions. Qu’est-ce qui explique cette part belle faite au conte ?
Quand on se réfère à notre situation sociale, on peut dire que les contes n’ont pas de valeur financière. Ils ne permettent pas d’engranger des millions de francs d’un coup. On peut donc se demander pourquoi on s’acharne à sauvegarder quelque pan de ce genre littéraire oral qui est en train de disparaître face aux Technologies d’information et de communication. Je pense que pour le développement d’un pays, il faut que la culture soit au point. Car, le développement est une manière de penser. Il faut donc redonner une certaine identité à l’Homme africain afin qu’il se réapproprie ses propres origines. Il doit pouvoir répondre à la question «Qui suis-je ?». Je pense que mieux on se connaît, mieux on s’ouvre aux autres. Les contes constituent ce qu’on va appeler le substrat de la pensée d’un peuple. Ils constituent des lieux où nous avons une certaine philosophie de pensée de la cité. Tous les peuples ont une approche philosophique différente de la vie et de la société. Déserter les lieux où nous puisons notre propre conception de la vie, c’est nous perdre. Comme le dit Amadou Hampaté Bâ, «Il n’y a pas de contes qui ne soient pas un lieu d’enseignement». Si je me bats pour la sauvegarde des contes, c’est parce que j’ai envie que les Africains eux-mêmes disent ce que c’est que le conte et comment on les conte aux autres.

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Les actions de l’Association Mémoires d’Afrique sont matérialisées par la publication de deux ouvrages majeurs «Contes et Légendes du Bénin» et «La femme panthère et autres contes du Bénin». Quel bilan faites-vous de ces ouvrages qui rehaussent l’image de votre association ?
Ces deux ouvrages couronnent le rêve qui nous a poussés dès le début. Il nous a été difficile de collecter 1.500 contes. Mémoires d’Afrique peut être fière d’avoir mis sur le marché «Les contes et Légendes du Bénin». Ce livre permet aux touristes de découvrir les contes du Bénin. J’ai été surpris un jour quand mes amis m’ont téléphoné pour me dire qu’ils ont trouvé «Les contes et Légendes du Bénin» au musée Quai Branly. C’est une manière de faire connaître notre pays et c’est déjà une satisfaction. Notre prochaine étape, c’est de sortir un livre purement dans la langue d’origine des contes. Pour cela, nous sommes en négociation avec le ministre de l’alphabétisation et de la promotion des langues nationales afin de créer un partenariat avec son ministère. Quelle fierté de voir les contes du Nord dans un même livre avec ceux du Centre et du Sud Bénin. Les élèves qui vont lire ce livre sauront qu’il s’agit d’une unité nationale.

Quel rêve nourrissez-vous pour «la Nuit des contes» ?
Je souhaiterais que «La nuit des contes» devienne une fête nationale. C’est mon rêve. Je voudrais qu’un jour, nous puissions innover quelque chose qui puisse faire  tache d’huile dans toute l’Afrique. On ne vend pas une culture, mais on la vit. Quand vous vivez la culture, les autres qui vous voient vivre, ont envie de vous copier. La fête de la musique était une fête nationale créée par l’ancien ministre français Jack Lang. Aujourd’hui, elle est devenue un événement mondial. De cette même manière que nous copions les autres, nous pouvons aussi inventer quelque pour permettre aux autres de nous copier aussi. Ainsi, nous serons en partenariat avec les pays du Nord. Car, nous ne pouvons pas parler de partenariat si nous sommes en position d’assistés, de recevoir, d’attendre. Sur le plan culturel, nous voulons provoquer ce que j’appelle «la rencontre», une sorte d’échange culturel sans aucun préjugé. Le commencer par les jeunes, c’est préparer l’avenir.

A quand remontent les éditions précédentes de «la Nuit des contes» ?
La première édition de la nuit des contes a eu lieu en 2006 à Possotomè entre des habitants de cette localité et de jeunes français. La deuxième édition a eu lieu en 2007 simultanément à Possotomè avec les jeunes français et à Tchaourou entre les autochtones. La troisième édition qui coïncide avec le dixième anniversaire de l’Association Mémoires d’Afrique est une occasion pour renforcer ce que nous avons démarré en 2006. C’est encore peu de chose quand nous voyons ce qui reste à faire.

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Vous défendez souvent que l’Afrique n’est pas démunie mais désunie. Que voulez-vous dire par là ?
Je le dis parce que nous avons assez de richesses. Et la terre est la première richesse que Dieu a donnée à tous les peuples. C’est la première richesse sur laquelle l’Homme est assis. La première richesse qui va lui permettre de se développer, c’est-à-dire, passer d’un moins-être à un mieux-être. Le mieux-être n’est pas identique partout. Le mieux-être aux Etats-Unis est beaucoup plus élevé que le mieux-être en France. Le mieux-être en France est au-dessus du mieux-être en Afrique ou en Inde. Quand nous regardons tout autour de nous, nous nous rendons compte que toutes les richesses dont les pays du Nord ont besoin aujourd’hui pour faire tourner leur économie, la grande partie de ces produits proviennent du continent africain. Pourtant, nous sommes incapables de les exploiter jusqu’à leur finition. Si on était solidaire à parler d’une seule voix, la chose serait faisable. Ce n’est pas le fait d’avoir plusieurs points d’appui qui fait qu’on soulève quelque chose, mais c’est l’union qui fait la force.

Propos recueillis pour La Nouvelle Tribune par
Fortuné Sossa{/joso}

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