Wilfried Léandre Houngbédji: et de trois !

Entre le 6 mai 2008 et le 9 décembre 2009, il y a un intervalle de 19 mois. Ce qui fait à peu près un an et demi. C’est dans cet espace de temps que notre confrère Wilfried Léandre Houngbédji, a écrit et mis dans les mains du public trois livres de bonne facture. C’est un exploit. Cela ne peut que le signaler comme l’un des observateurs les plus avisés de la scène sociopolitique de notre pays, un observateur doublé d’un essayiste à la plume sûre et acérée. Wilfried Léandre Houngbédji est entré dans le cercle des « porte-plume », pour ainsi dire, de notre pays avec « Liberté et devoir de vérité » le 6 mai 2008. Essai autobiographique pour l’essentiel, l’ouvrage retrace un parcours, explique certains engagements, souligne, en les recadrant, certains combats, ouvre des boulevards d’avenir. Ce premier essai est transformé le 10 décembre 2008 avec « Scandales sous Yayi ». C’est l’évaluation à mi parcours, sous l’angle de la gouvernance, du quinquennat de Boni Yayi. Le talent de l’essayiste est confirmé le 9 décembre 2009 avec le lancement de « 2011… ?! Chroniques d’une élection annoncée fatidique ».

Il s’agit d’un ensemble de 21 textes plus ou moins indépendants les uns des autres. En somme des chroniques politiques, pour coller au titre de l’ouvrage, mais qui se resserrent toutes sur un centre d’intérêt unique et commun : l’élection présidentielle de mars 2011. Difficile exercice, puisqu’il s’agit de projeter l’avenir proche en faisant émerger, pour chacun, pour tout un pays, pour aujourd’hui et pour demain, le sens, la signification, l’enjeu de cette importante échéance électorale.

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Pour ce faire, Wilfried Léandre Houngbédji examine un large éventail de facteurs et de données ; émet des hypothèses « invraisemblables, mais tout de même possibles » selon son préfacier Mathias Hounkpè; lorgne du côté de l’argent dont l’importance est allée grandissante dans nos différents scrutins ; cible l’armée, ainsi que l’espace public, voire informel de la rue ; passe en revue les principaux acteurs, candidats potentiels ou déclarés dont il pèse et soupèse les chances ; pose des équations à plusieurs inconnues ; égrène des combinatoires des plus complexes aux plus absurdes, ceci dans la perspective des consignes de vote ou des reports de voix possibles entre les deux tours.

Comme on le voit, c’est à un jeu de grande patience qu’il se livre. Ceci à la manière de quelqu’un qui s’attelle à rassembler, pour le reconstituer, les éléments épars d’un immense puzzle. L’extérieur reste-t-il sans influence notable sur nos élections ? La question mérite d’être posée. L’auteur, parexemple, ne fait aucun cas d’un grand partenaire comme la France, d’un grand voisin comme le Nigeria.

Arrêtons, ici, la lecture du livre. Autorisons-nous de dégager, chez l’auteur, au fil de ses livres, le sens d’un engagement intellectuel sans concession qui se double d’un engagement citoyen sans faille. C’est là tout le mérite de Wilfried Léandre Houngbédji.

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Il y a, d’abord, la constance d’un jeune confrère sur le chemin difficile de l’écriture. Nous sommes payé pour le savoir : on ne prend jamais la plume impunément. Dans cet exercice aussi ardu que délicat, on prend toujours le risque de perdre des plumes. N’empêche. Wilfried Léandre Houngbédji, avec une régularité de métronome, depuis un an et demi, ne cesse de nous inviter à le lire. A peine avions-nous refermé un de ses ouvrages qu’il nous rappelle pour une nouvelle fête de l’esprit.

Il y a, ensuite, que l’effort fourni, les sacrifices consentis par Wilfried Léandre Houngbédji sont tout à l’honneur d’une génération de jeunes Béninois, et plus précisément d’une génération de jeunes journalistes Béninois. Il en est consciemment ou inconsciemment, l’une des locomotives, l’un des éléments moteurs. Sur le plan personnel, c’est une responsabilité. Sur le plan professionnel, c’est la valeur ajoutée qu’il apporte à notre beau et difficile métier, le métier de journaliste.

Il y a, enfin, la force et la valeur du témoignage attachées au travail de Wilfried Léandre Houngbédji. Nous sommes appelés, nous aussi, à libérer notre part de témoignage, en nous libérant d’une sorte de dette envers la société. Nous avons besoin d’être présents à notre temps. Nous avons besoin de prendre notre place dans la mémoire des temps. C’est valable autant pour les jeunes que pour les moins jeunes. Nous sommes tous interpellés. « Le temps n’a pas de rive, écrit Lamartine, il coule et nous passons » Cela n’est vrai que pour ceux qui n’ont pas ou pour ceux qui n’auront pas su ancrer leur barque dans le temps. Mais quoi faisant ? En prenant la plume comme Wilfried Léandre Houngbédji.

Jérôme Carlos
La chronique du jour du 11 décembre 2009

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