Vie et mort de Pascal Fantodji

Comme promis dans notre édition du jeudi 08 avril , nous publions ce jour, deux témoignages , en attendant d’autres tout aussi édifiants sur la vie et la mort du leader communiste Pascal Fantodji. Le rôle éminent que ce grand patriote a joué dans l’évolution politique de notre pays ces trente dernières années ,  mérite cette attention particulière. En attendant qu’un éventuel conseil des ministres ne lui consacre la minute de silence hebdomadaire qu’elle accorde aux pères, mères,  beaux pères et belles mères des hauts fonctionnaires de la République !

En attendant aussi qu’un jour,  la République reconnaissante le consacre (ô combien il le mérite !) héros national à l’image de Béhanzin, Bio Guéra ou Abdoulaye Issa et Ignace Bocco Adjo qui eux , savaient qu’il était de la lignée des grands révolutionnaires de notre temps.

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« Pascal Fantodji est un véritable  patriote et un ami de vieille date » Le ministre Jean Roger Ahoyo

Ancien ministre du Président Soglo et  Professeur d’Université à la retraite, Jean Roger Ahoyo   garde de très bons souvenirs de Pascal Fantodji pour l’avoir côtoyé durant des années, depuis les bancs du Lycée Victor Ballot de Porto-Novo jusqu’en France.. Pour lui, le Président du Parti communiste du Bénin, décédé, il y peu, fut un véritable patriotique, car, il aimait véritablement son pays. 

Le leader des communistes du  Bénin, Pascal Fantodji a rendu l’âme, il y a peu. Comment avez-vous accueilli  la nouvelle de son décès ?

Je suis surpris et abattu par cette nouvelle, simplement parce que je n’ai  pas appris qu’il était malade. Et abattu parce que c’est un camarade de promotion  depuis les bancs du Lycée Victor Ballot de Porto-Novo. Nous avons mené beaucoup de combats ensemble, même si  par la suite  on a divergé.

Que retenez – vous de la vie de ce grand homme du monde communiste béninois ?

Je retiens fondamentalement  que Pascal Fantodji fut un véritable  patriote. Il aime profondément son pays. Il aurait pu  faire une brillante  carrière universitaire, mais il a préféré un engagement politique, un engament personnel et radical. Je voudrais souligner ici le rôle politique important que le Parti  communiste du Bénin a joué dans la lutte contre le régime du Prpb. On  doit le reconnaître et lui rendre hommage après sa mort.

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Fait de hasard, Pascal Fantodji s’en va  dans une année où le Bénin célèbre les 20 ans de son expérience démocratique  et les 50 ans de son indépendance. Qu’en dites-vous ?

Je considère tout simplement qu’il s’agit là d’une coïncidence malheureuse. Mais c’est le lieu de regretter une fois encore que le Pcb ait commis l’erreur  de rester  à l’écart de la conférence nationale. Ils y auraient dû participer pour apporter  leur touche particulière.

Vous disiez tantôt que Pascal Fantodji est un ami personnel à vous. Quels sont alors les grands moments qui ont marqué cette amitié ?

Nous somme rentrés  la même année, précisément en 1954, au Lycée Victor Ballot, et nous en somme ressortis également  la même année en 1961, après avoir fait la même classe de Terminale, la classe des mathématiques élémentaires. Nous sommes parti en France  la même année. Nous avons fréquenté là-bas, deux lycées voisins. Donc on se voyait presque tous les jours. Après l’année préparatoire, nous sommes tous allés en faculté la même année aussi. Et nous nous sommes retrouvés encore ensemble dans la même cité universitaire qui appartenait à la Faculté des sciences d’Orsay où il était inscrit. Moi je m’étais inscrit à la Sorbonne.  Mais nous nous sommes perdu de vue quelques années et ceci pendant longtemps. Je le regrette, parce que  nous devrions continuer à nous revoir régulièrement pour échanger  même si  nous n’étions plus d’accord sur certains sujets. Je regrette surtout sa mort, car elle est prématurée.

Quel  avenir vous entrevoyez désormais  pour le Pcb, après le décès de son plus grand leader ?

Je  souhaite aux autres responsables qui sont encore en vie, de se retrouver rapidement pour redonner un nouveau souffle à leur parti. Et aussi,   je leur demande de mieux penser la situation nationale du pays et  de partager leur point de vue. Je le repète aujourd’hui,  que c’est à la mort de Pascal Fantodji   que le Pcb doit  continuer à participer aux élections   et s’engager dans la bataille politique aussi. Mais tels qu’ils le font aujourd’hui, ils risquent d’être considérés comme un parti à l’état théorique. De temps en temps, ils feront des communiqués, et ce sera tout. Même s’ils développent des positions qu’ils croient conformes aux intérêts des masses, il faut qu’ils amènent les preuves que les masses  les écoutent et les suivent.

Si vous devez utiliser  deux mots pour caractériser Pascal Fantodji ?

Intelligence brillante et amour de la patrie. 

« Le décès de Pascal Fantodji est une perte immense pour le Bénin »  Séraphin Agbaghoungbata, ex membre influent du Bureau politique de Pcb

Juriste de formation,  Vice-Président  du parti Nep-Mixalodo et ancien membre influent du Bureau politique national du Pcb,  Séraphin Agbaougbata  revient ici sur la  vie et la parcours de Pascal Fantodji. Pour lui,  ce fut un grand homme de l’histoire de notre pays, un politique  inégalable et un humaniste. Lire ci-après l’intégralité de sa déclaration.

«

.. Je veux réagir sur la mort de  Pascal Fantodji pour trois raisons fondamentales. La première raison est historique, la seconde politique  et la troisième  purement  humanitaire pour ne pas dire humaniste. La première raison est historique, parce qu’à un moment de l’évolution de l’histoire de notre pays, Pascal Fatondji et moi, avec beaucoup d’autres camarades, nous étions des  centaines, pour ne pas dire des milliers accompagnés de tout le peuple, nous nous étions donné la main dans la lutte pour la conquête des libertés démocratiques,  pour l’émancipation de notre peuple, et la survie  de notre Etat. Cet engagement citoyen  aux côtés des opprimés, de ceux qui souffrent, de la jeunesse, des travailleurs, des femmes, des commerçantes, des soldats, des artistes, etc, nous a coûté, la clandestinité avec ses  conséquences, la prison, la torture, de douloureuses séparations avec nos camarades.

Ceux qui ont perdu leur vie à cause de ce lourd tribut,  je les ai vus aux côtés de Pascal Fantodji, parce qu’il était notre responsable, c’est  au regard que je dis que c’est une perte immense. Parce ces pages noires de notre histoire, nous les avons tournées  au prix de notre sueur, notre énergie et   notre sang. Ne pas reconnaître aujourd’hui le rôle que Pascal Fantodji a joué dans  ce grand combat serait une lâcheté. Ce fut un duel à mort face à un régime autocratique agonisant qui a fini  par  disparaître. C’est une victoire qu’on doit saluer, et  rien qu’à cause de cela,  lorsqu’on  évoque le nom de Pascal Fantodji,  les gens doivent savoir qu’il  s’agit là d’une immensité. Parce la vie de ce grand homme, en tant qu’éducateur de la jeunesse,  en tant que  conseiller de prolétariat est une vie pleine de prodiges à enseigner  aux jeunes, aux travailleurs et aux citoyens tout court, dans cette période de pillage systématique du patrimoine nationale, de corruption, d’âpreté, de concussions  de népotisme et que sais-je encore.

La deuxième raison est liée à l’évolution  actuelle de notre société. Nous sommes arrivés à une époque  de l’exacerbation des luttes des classes,  de l’oppression, de spoliation, où le capital financier ne ménage rien à travers   la globalisation et la mondialisation pour mettre en branle la force brutale sévère contre les peuples. A cette époque, on a besoin de toutes les intelligences nécessaires, de tous les efforts dans la réponse qu’il faut donner  aux défis économiques qui se posent à nous aujourd’hui.  Même le capitalisme est encore  en train de rechercher toutes les pièces qu’il faut pour se donner de l’oxygène malgré qu’il soit suffisamment ancré. Ce n’est donc pas le moment où l’on doit constater des disparitions de ce genre, où l’on doit se disperser à tout vent. C’est un appel que je lance à tous les combattants d’hier ou d’aujourd’hui.  L’heure n’est plus à la démagogie, aux discutailleries, aux règlements de compte de tous genres. Nous devons fédérer toutes les énergies pour remblayer à jamais le fossé entre un passé fuyant  et les échos d’un avenir proche, et  ceci  par le biais d’un changement radical des structures, des hommes, des méthodes et des formes de lutte.

La troisième raison comme je l’ai dit tantôt est humanitaire. Pascal Fantodji est  un homme profondément humaniste. C’est un humaniste révolutionnaire.  Si vous allez le voir, il est débordant d’enthousiasme. Il aime la vie. Il aime vivre. Et c’est pour cela qu’il s’est mis aux côtés de ceux qui souffrent, pour dire,  je vais les aider. Il a enseigné dans de grandes universités de la sous-région et a été plusieurs fois primé pour ses recherches scientifiques, ce n’est pas donc n’importe qui, et il sait de quoi il parle. Il faut même organiser des conférences pour retracer le parcours  et  la vie de Pascal Fantodji sur cette terre, pour que ceux qui ne connaissaient  pas l’homme puissent découvrir  les  grandes œuvres patriotiques et citoyennes  qu’il a accomplies pour   notre cher et  beau pays le Bénin…. »

Propos recueillis par C.T.

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