Qui pour garantir la paix ?

L’information a fait la une de nos principaux journaux. Le chef de l’Etat, le Docteur Yayi Boni a reçu en audience les trois anciens Présidents de la République Mathieu Kerekou, Nicéphore Soglo et Emile Derlin Zinsou. On prête à cette rencontre l’objectif d’apaiser les tensions qui rythment la vie politique de notre pays en ce moment. Les trois leaders devraient en faire de même avec les ténors de l’opposition. C’est ce qui est prévu.

Sauvegarder à tout prix la paix surtout en cette veille de joute électorale. Gageons que leur aura suffise à tempérer les ardeurs de tout un chacun. A voir l’actualité du moment, le pari est loin d’être gagné !
Si l’initiative n’est pas nouvelle il n’en demeure pas moins qu’elle est plutôt la bienvenue, les échanges de nos acteurs politiques tendant de plus en plus vers le jusqu’au-boutisme. Encore qu’il faille que cette démarche soit dénuée de tout arrière- pensée politicienne. En effet il n’est pas tout à fait exclu qu’on n’ait pas assisté là à un véritable jeu de dupes, tant toute occasion paraît bonne à exploiter dans l’optique des prochaines élections présidentielles.

Toutefois, il n’est pas sûr que ce soit celui qui ait prit le premier l’initiative qui puisse en tirer un quelconque bénéfice. En l’occurrence, autant Yayi Boni peut se prévaloir ainsi par ce geste d’être celui qui se soucie le plus de préserver la paix sociale, autant cette audience pourrait être interprétée comme un aveu d’impuissance. C’est dire que chacun a de quoi tirer la couverture à soi.

Ce constat ayant été fait, il y a un aveu d’impuissance plus général celui-là du système dans son entièreté. En effet, prévenir de toutes dérives pouvant remettre en cause la quiétude des populations, rappeler les règles du jeu démocratique, servir de garde-fou, tels sont entre autres des rôles dévolus aux institutions issues du projet politique choisi par notre pays et ce en toute conscience.
C’est dire que la sauvegarde pérenne de la paix échoit en premier lieu aux institutions.
Si le recours aux interventions ponctuelles de nos anciens présidents à l’instar de celles plus régulières des chefs religieux ou autres chefs traditionnels peut incliner les actions des différents acteurs politiques à plus de retenue et apaiser par de même l’opinion publique, il n’en demeure pas moins vrai que notre architecture démocratique s’en trouve autrement plus fragilisée.

Les institutions de la République doivent être la véritable soupape de sécurité de notre démocratie.D’autant plus que dans le cas présent, le «trio faiseur de paix » (je m’autorise un brin de provoc !) ne peut s’affranchir de couleurs politiques. En effet, seul Kérékou dans cette affaire pourrait se départir de toute appartenance politique. Du moins, factuellement. Et de fait, l’impartialité de leur intervention pourrait légitimement être sujette à caution. Autant de pompiers de service pour autant de potentiels pyromanes !

Par ailleurs, ni les chefs religieux, ni les chefs traditionnels ne peuvent plus se mettre au dessus du lot. La faute à de trop nombreuses accointances avec le milieu politique et les milieux d’affaires. Ils ont fini par y prendre goût comme dirait l’autre. La corruption a gagné les rangs. Ce qui leur confère une capacité de nuisance encore plus grande proportionnellement à leur degré d’influence dans une population en majorité analphabète et miséreuse.

Il faut se résoudre à admettre que ce qui a fait recette hier ne serait plus d’actualité aujourd’hui. Notre système a su cultiver jusqu’ici une très belle particularité : la reconnaissance de la prépondérance des anciens, de la chefferie et des religieux en termes d’opinions. Rien de plus normal ! Ce n’était que le reflet de notre culture. Mais depuis, l’impartialité qui crédibilisait leurs prises de position n’est plus si évident.

Mais heureusement nous avons fait un choix : celui de la démocratie. Il est donc temps que les institutions que nous avons mises en place et jugées garantes de l’intérêt général puissent enfin jouer pleinement leur rôle et ce au-delà de tout soupçon. Le système est fragile. Nos institutions sont faibles ou sont affaiblies. C’est selon. Et Il n’y a rien de plus dangereux en démocratie.
Aura -t-on besoin que la situation explose avant de s’en rendre compte ? Çà n’arrive pas qu’aux autres.

[discussion proposée par le démocrate]

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