Ils n’ont même plus honte !

A mesure que le temps passe, érodant le terrain qui conduit à la présidentielle mais renforçant tout autant les incertitudes, s’enchevêtrent aussi les manœuvres de toutes sortes. C’est ainsi qu’opposition et mouvance présidentielle s’activent pour mettre en place leurs structures décentralisées et déconcentrées chargées d’aller à l’assaut des électeurs pour les décider à opter pour leurs candidats respectifs. Si l’opposition installe des coordinations provisoires, le pouvoir lui, dont le candidat n’est pas encore désigné mais que tout le monde sait devoir être Boni Yayi soi-même, installe des cadres dits de concertation de la majorité présidentielle.

Si cela est de bonne guerre, il reste que se développe actuellement, à l’occasion de ces installations, une tendance néfaste à décourager. Certains ministres en exercice, sous prétexte d’aller organiser des activités de leurs ministères, procèdent à un détournement d’objectif voire de moyens, pour procéder plutôt, en lieu et place des activités officiellement prévues sinon simultanément, à l’installation des cadres de concertation de la majorité présidentielle.

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Au moins deux ministres se sont déjà illustrés dans la manœuvre. En programmant des activités traditionnelles de leurs ministères mais on procédant, une fois sur le terrain, auxdites installations. L’un voulait aller voir des réalisations de son ministère, l’autre allait sensibiliser des producteurs. Un double emploi détestable qui confine au statut d’anecdotes, la célèbre marche verte de Boni Yayi contre la corruption ainsi que les éruptions volontaristes d’engagements à œuvrer pour la bonne gouvernance. Si l’on ne sent même plus le besoin de se cacher ou de mettre de la finesse dans la bassesse, c’est incontestablement parce que l’on a atteint un tel degré de laisser-aller, de démesure et de pourriture que cette attitude paraît certainement triviale voire normale aux yeux de ses auteurs. Ils ne peuvent même plus faire semblant de nous faire croire au moins que les professions de foi peuvent encore avoir quelque once de crédibilité. On savait déjà, à bien des égards, que la confusion entre l’Etat et le parti au pouvoir, du moins le conglomérat difforme qui en tient lieu, était évident. On ne savait pas encore qu’elle pouvait atteindre un tel niveau.

A l’évidence, en agissant comme ils l’ont fait, ces ministres suggèrent définitivement à ceux qui en doutaient encore, que rien n’a véritablement changé. Tant leur attitude incline à penser que leur majorité présidentielle n’a même pas les moyens pour s’entretenir et qu’elle veut exister aux crochets de l’Etat. Tans pis pour les deniers publics, tant pis aussi pour la morale publique dont on sait d’ailleurs qu’elle a, depuis longtemps, déserté le forum pour laisser place aux prévarications. Il faut, sans être méchant pour un sou, convenir désormais qu’avec un tel niveau atteint dans la bassesse et la mauvaise gouvernance, la vertu n’a jamais été vraiment la préoccupation de nos princes actuels. De sorte que les efforts des rares parmi eux qui veulent encore projeter une image positive dans l’opinion, sont pris en otage par les méfaits, infiniment plus nombreux des autres, qui doivent certainement se dire qu’il faut profiter au maximum de l’Etat, autant qu’on le peut. De toutes les façons, disent certains parmi ceux-là, l’Etat, ce n’est pas notre propriété privée et quelle que soit la façon dont il est désagrégé, dépouillé, il ne disparaîtra jamais ! Ils auront pris leur part. Et ils n’ont même plus honte. Damnation !

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