Terrorisme au Niger : La douloureuse piqûre de rappel de AQMI

La France est sous le choc. Le Niger n’en revient pas. Les français en sont désorientés, les nigériens décontenancés. Ce n’était pourtant pas très irrationnel de penser que la branche nord-africaine de Al Qaïda pouvait frapper partout à travers le Sahel, où et quand l’envie lui viendrait. C’était surtout inconséquent de n’y avoir pas plus souvent songé. Et on se réveille avec la gueule et la langue de bois. A Niamey et à Paris bien sûr, mais aussi à Bamako. Al Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) l’a pourtant déjà fait, s’en prendre à des ressortissants expatriés dans le Sahel. Le 8 août 2009 à Nouakchott  par exemple. Peut-être trop loin de Niamey pour donner un avertissement strident. Mais Nouakchott, c’est à peu près la même latitude que Bamako ou Niamey. Et même si lors de leur retrait d’Afrique, les organisateurs de la course automobile du Paris-Dakar, logée désormais sur le continent sud-américain n’ont pas convaincu du caractère totalement sécuritaire de leur démarche, bien d’autres indices militaient en faveur de la prudence : Nouakchott, c’est une capitale. Et à ce titre, elle est présumée être sécurisée du mieux possible. C’est aussi le siège d’un gouvernement dirigé par un ancien chef de junte militaire reconverti à la vie civile sans que l’on ne puisse assurer que ses amours militaires se soient estompées. Et si donc Nouakchott est touchée, Bamako et Niamey pouvaient l’être.

Nouakchott Hier, Niamey aujourd’hui… peut-être demain Dakar, Ouagadougou, N’Djamena et après-demain Bissau, Freetown, Monrovia, Abidjan, Accra, Lomé Lagos et …Cotonou. Le terrorisme est à nos portes ! Alarmisme et improbabilité, sans doute. Comme l’était cette incursion d’AQMI au cœur de la capitale nigérienne, jusqu’au moment où ce n’était pas encore arrivé. Et là, surviennent bien de questions :

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Comment se peut-il que des terroristes, armés jusqu’aux dents, aient pu si facilement pénétrer jusqu’au centre-ville de la capitale nigérienne sans avoir été interceptés, ni même repérés ? Réponse toute simple : négligences, manque de moyens, peut-être également complicité ou corruption. Le Niger ne serait alors pas un cas sui generis, nul besoin d’en rougir.

Par ailleurs, pourquoi donc les Français ont-ils été particulièrement visés ? Evidences géopolitiques, géostratégiques, religieuses et économiques : Le Groupe Salafiste pour la Prédication et le Combat (GSPC) reconverti en Al Qaïda au Maghreb islamique  a ses origines et ses bases principales en Algérie. L’histoire de la relation tumultueuse de ce pays avec la France est bien connue. Quand on y ajoute les ingrédients de l’islamisme intégriste d’un côté et les stigmatisations des musulmans de l’autre, le tout sur fond de choc des civilisations, on comprend encore mieux. Enfin, les Français, plus que les autres expatriés sont nombreux dans les pays du Sahel d’où, ni le climat rude, ni les risques sécuritaires ne les renverront jamais tous. Et les dirigeants de AQMI ont déjà pu s’en rendre compte, à quelques exceptions près, le monnayage d’expatriés blancs peut rapporter au-delà de la libération de quelques copains islamistes détenus ici ou là, quelques milliers voire millions d’euros dont personne n’assumera jamais la responsabilité de les avoir versés. La récente opération de la nébuleuse Al Qaïda rentre bien dans cette logique. Il parait évident que n’eût été la dramatique, mais musclée intervention des Forces spéciales françaises, il n’aurait pas fallu bien longtemps pour voir apparaître sur les chaînes de Télévision internationales les deux jeunes français, ligotés, suppliant sous la menace des armes la France de leur sauver la vie.

Dernière question : qui a tué Vincent Delory et Antoine de Léocour ? Saura-t-on jamais si ce sont bien les terroristes d’AQMI qui ont exécuté les otages en se sentant pris au piège ? les deux jeunes gens seraient-ils morts dans un échange de tirs entre leurs ravisseurs et leurs poursuivants ? La vérité de l’autopsie et de la balistique sera-t-elle révélée au grand jour ? Aurait-on vraiment pu agir autrement et sauver les deux jeunes gens ? Mystère et boule de gomme. Ce qu’il importe de constater, c’est que la France revendique une action énergique et déterminée, dans l’optique de décourager les terroristes. Le risque est pourtant grand que AQMI, loin d’abandonner, se venge sur d’autres otages français détenus quant à eux depuis quelques mois déjà. Et rien ne prémunit contre de nouveaux enlèvements ou attentats terroristes dans cette immense bande sahélienne que toute l’armée française, en dépit de ses moyens technologiques serait bien incapable de contrôler.

Moralité de ce drame, le terrorisme est irrationnel. Lutter contre est complexe. Mais la relative sanctuarisation du Burkina Faso dans cette instabilité sous-régionale pourrait-elle inspirer quant aux moyens les plus efficaces de se prémunir du mal rampant… pour autant que cette immunité ne soit pas qu’un simple fait du hasard.

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