Comme un pavé dans la marre, le CRAN, le Cercle de Réflexion pour une Afrique nouvelle, fait entendre sa voix dans le concert des réactions initiées à propos des résultats provisoires de la présidentielle du 13 mars tels proclamés par la Cena et la Cour constitutionnelle. Conduit par Salomon Kérékou, l’un des fils de son père le général Kérékou, le CRAN se dit prêt à barrer la route aux fossoyeurs de la démocratie béninoise chèrement acquise. Lire l’intégralité de la déclaration parvenue à notre rédaction.
DECLARATION DU CERCLE DE REFLEXION POUR UNE AFRIQUE NOUVELLE (CRAN)
Béninoises et Béninois ;
Mes chers compatriotes
Notre pays, le Bénin vit l’un des moments les plus difficiles de son histoire depuis l’historique Conférence Nationale des Forces Vives de la Nation de Février 1990.
L’organisation et la proclamation des résultats provisoires du premier tour de l’Election Présidentielle du 13 Mars 2011 ont laissé les populations sur leur faim.
Pour la première fois depuis l’avènement du Renouveau Démocratique, le Peuple béninois regarde l’avenir avec une vive anxiété. Les Béninois ont peur face au pouvoir du Président de la République sortant le Candidat Boni YAYI qui exploite avec démesure tous les avantages de la fonction présidentielle pour imposer sa réélection à la tête du pays en 2011.
Pendant cinq ans le Président Boni YAYI a mis abusivement à contribution l’argent, l’administration, la police, la gendarmerie et la justice aux seules fins de se rallier l’opinion, d’écraser ses adversaires, d’étouffer les velléités de l’opposition et d’empêcher la manifestation de la vérité.
Pendant cinq ans, les prérogatives constitutionnelles de l’Assemblée Nationale ont été bafouées ou contournées sous le prétexte que la haute institution nationale se trouve sous la coupe de l’opposition. C’est ainsi que le Président de la République se substitue à l’Assemblée Nationale de façon systématique et à tort pour adopter le budget de l’Etat et ratifier les accords de prêts rejetés par l’Assemblée Nationale en évoquant les dispositions de l’article 68 de la Constitution qui permettent au Président de la République de prendre des mesures exceptionnelles dans des cas extrêmes.
Ce recours abusif et très fréquent du Président de la République aux mesures exceptionnelles de l’article 68 de la Constitution, met la paix et la démocratie en danger en créant une situation de non droit qui remet le pouvoir législatif dans les mains du Président de la République à qui par ailleurs le pouvoir judicaire et celui des médias semblent avoir fait allégeance.
En conséquence, les députés de la majorité parlementaire convaincus que le régime du changement est un régime autocrate dont toutes les actions n’ont pour but que d’assurer le renouvellement du mandat de son chantre se rebellent et rejettent tous les projets de loi qu’ils jugent de nature à renforcer la propagande politique personnelle du Chef de l’Etat.
Pendant cinq ans, toutes les institutions de l’Etat se sont regardées en chiens de faïence. Ce qui a hypothéqué dangereusement les précieux acquis de la Conférence Nationale et a ruiné la réputation du laboratoire africain de la démocratie que notre pays a chèrement acquise.
De 1996 à 2006, le Bénin n’était-il pas classé au premier rang des pays africains respectueux de la liberté de presse et au deuxième rang des pays africains ou l’insécurité publique était la moins élevée? De 1996 à 2006 le Bénin n’était-il pas le Champion africain de la paix, de la Concorde nationale, de la stabilité politique et de l’unité nationale?
Aujourd’hui hélas, le Bénin est entrain de connaître pour la première fois une période de crise postélectorale de l’ère du renouveau démocratique.
Les appartenances régionales, tribales, religieuses et politiques sont agitées avec passion pour opposer les Béninois entre eux et créer les conditions objectives de la remise en cause de la paix, de la concorde nationale, de la stabilité politique et de l’unité nationale.
Cette atmosphère délétère engendrée suscite les interrogations suivantes:
Comment comprendre qu’après 21 ans de pratique démocratique, le régime du changement puisse innover avec la LEPI sans permettre aux acteurs politiques de connaître d’avance la liste électorale et le nombre de bureaux de vote pour l’organisation du scrutin présidentiel d’une si grande importance sur le plan national et international?
Comment comprendre qu’après 21 ans de Démocratie, le taux de participation ne puisse pas être connu 48h au moins après la clôture du scrutin organisé sur la base d’une LEPI?
Qu’avons-nous gagné avec cette LEPI pour laquelle BAKO nous rassurait tant?
De quelle crédibilité dispose aujourd’hui la Cour constitutionnelle si l’application de la médiation des anciens présidents n’entache pas leur décision qui tord quotidiennement le cou au consensus?
Les germes d’une LEPI non consensuelle et tronquée par la fraude informatisée ne peuvent que déboucher sur la proclamation des résultats biaisés, base des contestations actuelles.
C’est une honte nationale pour notre pays le Bénin.
Le Cercle de Réflexion pour une Afrique Nouvelle (CRAN), par ma voix, élève une vive protestation contre cet état de choses qui n’honore guère notre démocratie acquise au prix de luttes héroïques.
Béninoises, Béninois, l’heure est grave. La Démocratie béninoise est en péril et il faut une mobilisation générale et un sursaut patriotique pour la sauver.
Cette menace qui se profile à l’horizon contre notre pays et sa démocratie remet naturellement le Général Mathieu KEREKOU, à l’ordre du jour.
Les Béninois expriment aujourd’hui avec beaucoup d’amertume leur profond regret qu’il ne soit plus dans les conditions de garantir les libertés individuelles et collectives de tous les citoyens qu’ils fussent de l’opposition, syndicalistes, de la presse et de la société civile, comme il avait su bien le faire pendant ses deux derniers mandats à la tête de notre pays.
Dans le contexte béninois actuel, le Général Mathieu KEREKOU reste à nos yeux l’homme politique le plus populaire de ces vingt dernières années. S’il n’a pas pu gagner l’élection présidentielle de 2001 au premier tour, ce n’est pas celui par qui le peuple béninois a connu les pires scandales de son histoire à savoir ICC-Services, CEN-SAD, Avion présidentiel, machines agricoles, fonds d’escorte, privation des libertés de presse, disparition suspecte de cadres, mensonges d’Etat, recrutements fantaisistes dans l’administration publique, régionalisme et ethnicisation de la fonction publique qui pourrait le faire.
Le peuple béninois est suffisamment mûr et ne se laissera jamais duper par des gens assoiffés de pouvoir, lesquels sont promptes à tordre le cou à la démocratie béninoise.
Les signes annonciateurs d’un hold-up électoral pointaient déjà à l’horizon et la proclamation des grandes tendances par GNONLONFOUN d’abord enfermé dans son bureau fortement militarisé, oubliant de donner les différentes statistiques, et après chez lui à sa résidence n’a fait que confirmer notre crainte. Mais lorsque Robert Dossou l’homme de tous les régimes depuis la période révolutionnaire est venu confirmer, à trois heures du matin les chiffres de GNONLONFOUN, représentant, chargé de mission de YAYI BONI à la CENA, nous avions alors compris que la démocratie venait d’être assassinée.
C’est le lieu ici de saluer l’intégrité morale des deux femmes devenues béninoises par alliance qui ont précédé Robert DOSSOU à la tête de la haute juridiction. Elles ont servi la Nation mieux que ceux qui se disent Béninois de souche.
Il y a de cela quelques jours, Jacques TEVOEDJRE, fils de Albert TEVOEDJRE et chef de la cellule de traitement informatique et statistique de la CENA en a rajouté au doute des candidats quant à la sincérité des tendances proclamées de façon unilatérale par le Représentant du Président BONI YAYI à la CENA, Joseph GNONLONFOUN.
Après avoir affamé et volé le bas peuple à travers ICC-Services, les ennemis de la Démocratie viennent de lui voler son vote. Le peuple ne se laissera pas faire. Nous ne sommes pas des manchots. Nous attirons l’attention de tous que c’est l’accumulation de frustrations qui amène les soulèvements et la guerre.
Le Président Boni YAYI seul peut décrisper la tension en tant que Père de la Nation. Et nous n’imaginons pas que dans les conditions actuelles de menace de la paix sociale, il prête serment le 6 Avril prochain.
Celui qui n’a pas participé à la fondation d’un édifice et qui par extraordinaire a été invité à y séjourner quelques moments ne peut pas détruire l’édifice et la fondation avant de se retirer. Autrement, il se heurtera à la farouche résistance des occupants des lieux.
Nous mettons toutes entités du pouvoir en garde contre toutes velléités d’intimidation, de répression, de bâillonnement et de confiscation du pouvoir d’Etat.
Nous ne sommes pas loin du scénario de la Côte-d’Ivoire et l’exemple de Guillaume Kigbafori SORO doit nous édifier. En toute connaissance de cause, le CRAN est déterminé à user de tous les moyens pour faire barrage à l’imposture politique et juridico-constitutionnelle engendrée.
Mobilisons nous tous pour sauver la patrie.
Vive la Démocratie,
Vive le Bénin uni et prospère.
Que DIEU protège le Bénin et ses fils.
Je vous remercie.
Fait à Natitingou, le 25 Mars 2011
Salomon Oyend KEREKOU
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