Il en est de la politique comme de la guerre. A savoir que la politique est une chose trop sérieuse pour qu’elle soit laissée aux initiatives des seuls politiciens. Les enjeux de la politique sont de nature à brouiller le regard des hommes politiques, à affecter leur opinion et leur jugement. Il est difficile, dans ces conditions, d’attendre du politicien l’objectivité nécessaire. Il lui est tout aussi difficile qu’il montre sens de l’équilibre ou qu’il sache tenir la bonne distance pour une mise en perspective correcte. Le parti-pris est le marigot du politicien. Est-ce un hasard qu’au lendemain d’une élection, le Bénin soit à ce point divisé ? Tout le monde voit la même chose. Mais chacun a son interprétation de la chose vue. Tout le monde prétend détenir la vérité. Mais, à la vérité, c’est chacun qui prêche sa vérité. Et la vérité de chacun est aux couleurs de ses intérêts bien compris.
La presse béninoise, à cet égard, dans le contexte de l’élection présidentielle, est à l’image d’un kaléidoscope. Il s’agit de cet instrument composé des fragments mobiles de verre colorié. Ces fragments, en se réfléchissant sur un jeu de miroirs, produisent d’infinies combinaisons d’images aux multiples couleurs. La presse s’éparpille ainsi dans les dédales des querelles politiciennes. Qu’on ne s’étonne pas qu’elle soit tirée à hue et à dia, ballotée entre les différentes chapelles politiques rivales.
Cette cacophonie apparente vaudra toujours mieux que l’unanimisme idiot qui a cours dans les régimes totalitaires et autocratiques. La sagesse des nations nous enseigne que « qui n’entend qu’une cloche, n’entend qu’un son ». (Fin de citation). C’est insuffisant pour se faire une idée des choses. C’est édifiant pour conclure que la pensée unique n’est pas une richesse. Ce que confirme la nature autour de nous, marquée qu’elle est au coin de la diversité, dans l’infinie variété des espèces végétales, animales ou minérales.
Mais la diversité n’exclut pas l’objectivité, définie comme la qualité de ce qui est exempt d’impartialité, de préjugés. Aussi, si, comme nous l’avions dit, la politique est une chose trop sérieuse pour être laissée aux seuls politiciens, il ne nous reste plus qu’à inviter, voire convoquer, dans le champ politique, ceux et celles qui, par leur action, peuvent faire œuvre utile et preuve d’impartialité.
Cela reviendrait à faire du champ politique un espace de recherche. La science y aurait droit de cité, sous la direction de nos chercheurs. Ceux-ci auraient à se distinguer dans leurs différents domaines de compétences. La diversité des réponses de la science sur différentes thématiques politiques, serait toujours préférable au mélange confus des opinions politiques qui confinent souvent au slogan et à l’incantation.
La science ferait le rappel des statisticiens autour de divers chiffres querellés. A commencer par les chiffres ayant servi de base à la confection de la Liste électorale permanente informatisée (Lépi). Ceci en référence aux résultats d’un recensement fort controversé.
La science offrirait des moyens aux sociologues. Ils auraient, par exemple, à diligenter des enquêtes appropriées sur les bureaux fictifs allégués. Nous avons besoin de preuves aussi bien sur l’existence de ces bureaux que sur l’impact des suffrages relevés à leur niveau sur le scrutin en général.
La science offrirait une tribune à nos informaticiens. Ils auraient à se prononcer sur la validité des approches et des méthodes informatiques retenues, sur les logiciels utilisés, sur la gestion de toutes les données numériques engrangées, le souci étant d’avoir les résultats les plus fiables possibles.
La science du droit donnerait le droit à nos juristes de se prononcer sur les diverses dispositions légales qui encadrent nos élections. Des contributions d’experts sont nécessaires à l’information et à la formation du commun des citoyens. Et la science du Fâ ? Elle existe et fait ses preuves. Elle peut peser sur le cours des choses. Elle peut nous faire lire demain dans les replis d’aujourd’hui. Mais qui y pense ?
Que nos intellectuels, que nos gens de sciences se le tiennent pout dit : s’ils ne vont pas à la science pour éclairer nos élections, ce ne sont pas les élections qui iront à eux. Et ce serait tant pis pour eux et pour leur science!.