Arrestation de Gbagbo: la France défend ses intérêts et non la démocratie

L’arrestation de Laurent Gbagbo relance la polémique sur le rôle plus ou moins confus joué par l’armée française en Côte d’Ivoire. Alors que bon nombre d’africains déplorent son implication trop directe dans la guerre, la France, elle, prétend défendre la démocratie. Une option bien curieuse pour ce pays coutumier des sinuosités et des ambivalences politico-diplomatiques

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« La France n’a pas d’amis, elle n’a que ses intérêts ». Cet aphorisme du général Charles de Gaulle est encore d’actualité aujourd’hui. Plus de cinquante ans après, les autorités politiques françaises n’ont pas réussi à gommer du subconscient de maints africains cela. En lieu et place de ce brillant président de la France, Sarkozy et son staff semblent en faire, eux aussi, leur leitmotiv. Le cas ivoirien en donne aujourd’hui une vivante illustration. Et, en dépit de leurs multiples explications, les autorités françaises auront du mal à convaincre sur les accusations portées contre elle surtout en ce qui concerne son implication trop directe dans la guerre en Côte d’Ivoire et l’arrestation de Laurent Gbagbo. Il sera difficile pour la France de montrer qu’elle n’a pas participé à l’arrestation de Laurent Gbagbo et qu’elle n’était pas intervenue dans la résidence présidentielle au moment de l’arrestation. Sur l’acte militaire, passons. C’est François Fillon, premier ministre français qui nous donne de la matière. Hier au Palais Bourbon- Assemblée nationale française- alors qu’il tentait de défendre l’implication de son pays dans cette guerre, il a tenu des propos difficilement acceptables pour quelqu’un qui connaît les méandres de la françafrique. « On a donné un signal à tous les dictateurs », a-t-il déclaré avant de conclure : « Je suis fier que la France ait participé à la défense de la démocratie en Afrique ». La défense de la démocratie en Afrique ?! Bien que la Côte d’Ivoire fasse partie de l’Afrique, on se demande si le fait de chasser un président proclamé, en dépit de tous, par l’organe constitutionnel, participe de la défense de la démocratie. La démocratie peut-elle s’accommoder de violation des décisions des institutions de la république et par ricochet des lois de la république. Revenons à la défense de la démocratie en Afrique. C’est pourtant la France qui a défendu et protégé pendant des années des présidents comme Gnassingbé Eyadema, Mobutu Séssé Séko qui ont piétiné tout le temps la démocratie. Tout récemment, elle a soutenu Idriss Déby- putschiste reconverti en pseudo-démocrate- au Tchad. Ce n’est pas évident que la France défendait la démocratie dans ces pays. C’est la même France qui a soutenu Sassou N’guesso contre Pascal Lissouba, élu démocratiquement. En Côte d’Ivoire, l’enjeu est énorme pour la France. Il y a le pétrole, le cacao, le café, le port d’Abidjan avec la présence du magnat français Bolloré. En Côte d’Ivoire, c’est encore une société française qui gère l’eau et l’électricité. Au regard de tout cela, la France n’a pas de quoi se pavoiser et se proclamer défenseur de la démocratie. Elle semble bien plus préoccupée par la protection de ses ressortissants et des nombreux intérêts économiques qu’elle y tient. Le reste n’est que discours diplomatique et alibi pour déstabiliser un homme qui ne servait pas bien la mère-patrie. Sacrée Françafrique !

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